NOUVEAU JUGEMENT SUR L’EQUATION DRM = COPIE PRIVEE

Alors que le projet de loi DADVSI prévoit (initialement) une légalisation des Mesures Techniques de Protection (MTP ou DRM en anglais, pour : Digital Rights Management), destinées à limiter les copies d’oeuvres, la jurisprudence continue d’un préciser le régime, en l’absence même de textes.

Une décision récente vient encore de rappeler que les MTP sont interdites dès lors qu’elles rendent impossible la réalisation de copies de l’oeuvre, sur tout support. Ainsi s’est prononcé le Tribunal de Grande Instance de Paris, par un jugement du 10 janvier 2006 ; il confirme la jurisprudence de la Cour d’Appel de Paris, qui avait retenu la même solution dans un arrêt du 22 avril 2005.

Les faits de l’espèce sont somme toute classiques, par rapport aux précédentes affaires. L’objet du délit était cette fois-ci le disque compact Testify de Phil Collins. Une MTP en empêchait la lecture sur les ordinateurs portables ainsi que la possibilité d’en faire une copie numérique. Le consommateur concerné a naturellement attaqué les sociétés Warner et Fnac, productrice et distributrice dudit CD ; l’action en justice a été relayée par l’UFC Que Choisir, qui avait recueilli un certain nombre de plaintes.

La solution reste sensiblement la même que dans l’arrêt de la Cour d’Appel : la MTP en question est qualifiée de vice caché, empêchant l’utilisation normale du produit, lequel doit pouvoir être lu sur tout lecteur (ce que contestaient les sociétés défenderesses).

Il est rappelé que l’exception de copie privée est d’ordre public, ce qui reste néanmoins discutable pour beaucoup ; les juges se sont fondés également sur le test en trois étapes pour la légitimer. S’agissant de sa conciliation avec les MTP, une décision de la Cour de Cassation est attendue pour entériner cette jurisprudence.

Sur le plan purement informatif, le fabricant aurait pu a priori échapper à la sanction ; en effet, il était mentionné, sur la pochette du disque qu’une mesure de protection était incluse. Cependant, il semble que cette mention n’ait pas été suffisamment lisible ; pour les juges, elle équivaudrait à l’absence d’information du consommateur. Néanmoins, en présence d’un tel avertissement, le vice était-il vraiment caché ?

Cette solution d’espèce vient conforter une jurisprudence protectrice de la copie privée, dont on peut attendre une confirmation par la Cour de Cassation. Dans l’attente, le projet de loi DADVSI, dans sa version révisée, semble prendre en compte ces différentes évolutions. Ainsi, selon les derniers communiqués, le Ministre de la Culture, tout en maintenant le principe des MTP dans le texte, prévoit de reconnaître un droit à cinq copies privées au bénéfice des consommateurs.

Source :
http://www.zdnet.fr ;
http://www.legalis.net/ .

Philippe MOURON