Suite à une grande campagne anti-vulgarité lancée par le gouvernement chinois au début de cette année, le MII (Ministère de l’Industrie et de l’Information, l’autorité principale en charge de réguler le secteur des télécommunications) continue à lutter contre les informations pornographiques et violentes sur Internet sous l’angle d’imposer à tous les internautes l’installation du logiciel de filtrage « Barrage vert d’escorte de la jeunesse ».
Le 19 mai 2009 le MII a publié sans prévenir l’Avis relatif à la pré-installation sur les ordinateurs d’un logiciel de filtrage d’accès au réseau qui exige que tous les nouveaux PC mis en vente, qu’ils soient importés ou fabriqués à l’intérieur du pays, doivent être dotés du logiciel Barrage vert dans le but de protéger les jeunes chinois des informations nuisibles, surtout de nature pornographique et violente, auxquelles l’accès demeure extrêmement facile dans le monde virtuel sans frontière.
Très rapidement, la décision du MII a engendré de vives réactions en Chine. Le première des doutes concerne sa fonction de filtrage qui s’explique par l’identification automatique des mots-clé et des images déterminés préalablement par les fournisseurs du logiciel. La classification arbitraire du contenu risquera de bloquer les informations et les sites qui ne relèvent pas de l’obscénité et de la violence d’un point de vue moderne (ex, Barrage vert assimile l’homosexualité à la pornographie). La sécurité de l’usager constitue une autre raison aux réserves du fait que les bogues du logiciel sont susceptibles de mettre en danger les informations personnelles de l’utilisateur.
Malgré un téléchargement gratuit du logiciel offert par le gouvernement, le coût de la licence annuelle (environ 4 million euros) est supporté en réalité par les contribuables et donc fait partie du budget étatique qui aurait dû être approuvé par les représentants du peuple. Qui plus est, l’installation obligatoire du logiciel sur tous les ordinateurs sans différencier l’adulte et le mineur usurpe manifestement le droit de choisir des citoyens. Sous l’angle juridique, l’action du MII est susceptible de constituer un abus du pouvoir administratif qui a pour effet de restreindre le marché du logiciel de sécurité possédant les fonctions similaires.
De nos jours, l’Internet s’impose comme l’outil ultime pour la liberté d’expression en Chine. Face à cette brèche dans la citadelle du contrôle de l’opinion publique, l’autorité chinoise se donne du mal pour une censure sur Internet sans égal dans le monde. Cette pratique se vérifie par de nombreux sites entièrement ou partiellement inaccessibles qui portent sur les sujets sensibles comme l’opinion dissidente ou la critique à l’administration du gouvernement. En revanche, cette censure apparaît fragile dans la mesure où la technique du site anonymiseur permet de reprendre l’accès à une majorité des sites bloqués. A ce titre, la mise en place du logiciel de filtrage sur les terminaux devrait-elle être une nouvelle tentative du PCC (Partie Communiste Chinois) pour remédier aux défauts de la censure à travers la Grande Muraille pare-feu de Chine ? L’absence d’une tierce entité indépendante en charge de surveiller le contenu mis en cause permettrait à l’autorité chinoise de confondre la politique avec la pornographie et la violence.
Sources :
Derrière le Barrage vert, ZHAO Yayuan
www.chinatoday.com.cn
Des brèches dans le « barrage vert » ?, Suzanne Lehn
http://fr.globalvoicesonline.org
La divulgation du secret de Barrage vert (en chinois),GUO Jianlong
http://news.qq.com
Ying LOU