Amazon, le libraire et détaillant en ligne, a ouvert ce jeudi 3 novembre un nouveau service de prêt de livres électroniques qui permet d’emprunter gratuitement un titre à la fois et par mois. Les livres pourront être consultés grâce au Kindle. Cet instrument est un lecteur de livres électroniques commercialisé en novembre 2007 par Amazon.
Ce service de prêt découle du service Amazon Prime, un abonnement à 79 dollars (57 euros) par an qui permettait jusque là d’accéder à divers services tels que le visionnage de films en streaming ou la livraison gratuite d’articles achetés sur le site. Il n’existe pour l’instant qu’aux Etats-Unis, et ne s’adresse qu’aux possesseurs d’un Kindle, qui pourront désormais emprunter des livres numériques dans un catalogue de 5000 références dont « une centaine de livres qui figurent ou ont figuré dans la liste des meilleurs ventes du New York Times », affirme l’entreprise. Il sera également possible pour une personne ayant acquis un livre sur Kindle de le prêter à son tour à une tierce personne pour une durée maximale de 14 jours, durée pendant laquelle elle n’aura plus accès au livre. Il convient de préciser que seuls les livres des éditeurs qui ont accepté d’autoriser le prêt dans ces conditions peuvent être prêtés.
Les ouvrages disponibles sont soumis au droit de la propriété intellectuelle et pourront être téléchargés sur le site d’Amazon. Les fichiers sont protégés par des DRM (digital rights management), système permettant de protéger les droits de l’auteur d’un contenu numérique diffusé en ligne, ce qui correspond en français légal à des mesures techniques de protection.
Une limite est constatée par Wall Street Journal qui rapporte qu’aucune des six grandes maisons d’édition américaines n’a souhaité participer à ce service, craignant de voir les ventes d’e-books diminuer au profit des prêts. Le lancement de ce service suscite des interrogations économiques, mais Amazon assure que les droits d’auteurs seront versés aux maisons d’édition pour les locations d’ouvrage. Le but du service étant d’inciter les consommateurs à acheter le Kindle, celui-ci ne permet pas de lire les livres électroniques prêtés ou vendus sur smartphone, tablette ou PC, mais uniquement sur Kindle. Pour ce faire, Amazon a passé en avril dernier un accord avec 11 000 bibliothèques américaines afin qu’elles proposent des livres électroniques Kindle en prêt.
Au niveau du copyright, deux points peuvent être soulevés.
En ce qui concerne la rémunération des éditeurs, Amazon explique dans son communiqué de lancement, avoir conclu plusieurs formes d’accord avec les différentes maisons d’édition partenaires : « Pour la vaste majorité du catalogue, Amazon s’est accordé avec l’éditeur pour reverser une somme forfaitaire pour chaque titre empruntable. Et dans quelques cas, Amazon paie les livres à l’acte d’emprunt. »
En outre, l’utilisation du Kindle a, par le passé, soulevé un problème. En juillet 2009, Amazon avait décidé d’effacer une version des romans 1984 et the Animal Farm de George Orwell installée dans les Kindles, sans en avertir préalablement ses clients, pour des raisons de droit d’auteur. En effet, les livres avaient été vendus par un marchand n’ayant pas les droits sur les ouvrages. S’était donc posée la question de la légalité de cet effacement puisque celle-ci ressemblait fortement à une intrusion illégale dans un système informatique. Si un cas similaire se présentait en France, une intrusion de cette sorte s’apparenterait à une violation du droit, en application de l’article 323-3 du Code Pénal relatif à l’introduction, la suppression ou la modification frauduleuse de données dans un système de traitement automatisé. De plus, ce n’étaient pas seulement les droits des titulaires de copyright qui étaient en jeu, mais également ceux des utilisateurs en tant qu’auteurs. En effet, un étudiant rapportait qu’il avait annoté le fichier supprimé dans le cadre d’un travail scolaire et avait donc par conséquent perdu le produit de son travail.
Cela permet de réaliser que le livre numérique est très différent du livre physique, et possède un mode de fonctionnement qui lui est propre. En effet, les clients n’acquièrent qu’un droit de lecture sur le contenu. Amazon précise dans son contrat sur l’utilisation des contenus numériques que la licence accorde « un droit non-exclusif de conservation [sur ce type d’appareil] d’une copie pour usage individuel [lecture, affichage, visualisation] à but non commercial ». Ce service de prêt n’est donc pas à confondre avec le service offert par une bibliothèque papier.
Sources :
LA TRIBUNE.FR « Le “cas Kindle” d’Amazon signe-t-il l’acte de naissance du contenu numérique ? », La Tribune, article du 22 septembre 2009 : http://www.latribune.fr/opinions/20090923trib000425381/le-cas-kindle-d-amazon-signe-t-il-l-acte-de-naissance-du-contenu-numerique-.html
NUMERAMA.COM « Amazon protège sa marque Kindle contre le prêt de livres organisé », Numerama, article du 14 février 2011 : http://www.numerama.com/magazine/18062-amazon-protege-sa-marque-kindle-contre-le-pret-de-livres-organise.html
ECRANS.FR « Les droits d’auteurs sont-ils l’antichambre de la tyrannie ? », Ecrans, article du 20 juillet 2009 : http://www.ecrans.fr/Les-droits-d-auteurs-sont-ils-l,7756.html
LE MONDE.FR « Amazon se lance dans le prêt de livres numériques », Le Monde, article du 2 novembre 2011 : http://www.lemonde.fr/technologies/article/2011/11/03/amazon-se-lance-dans-le-pret-de-livres-numeriques_1597757_651865.html
LE FIGARO.FR « Amazon se lance dans le prêt de livres », Le Figaro, article du 3 novembre 2011 : http://blog.lefigaro.fr/medias/2011/11/amazon-se-lance-dans-le-pret-d.html
AMAZON.COM « Communiqué de presse », Amazon, communiqué du 2 novembre 2011 : http://phx.corporate-ir.net/phoenix.zhtml?c=176060&p=irol-newsArticle&ID=1625426&highlight=
WIKIPEDIA.ORG « Amazon Kindle », Wikipedia: http://fr.wikipedia.org/wiki/Amazon_Kindle