Alors que les salles de cinéma françaises enregistrent pour 2011 un taux de fréquentation record depuis 45 ans, l’industrie photochimique française, en charge de la postproduction de centaines de films, quant à elle s’effondre. La cause ? La numérisation des salles. Le laboratoire LTC, première victime de ce passage à tabac, a été mis en liquidation judiciaire le 5 janvier 2012.
2011 aura été une année très prolifique pour le cinéma français. En effet, le CNCIA (Centre National du Cinéma et l’Image Animé) a évalué la fréquentation des salles à 215 millions d’entrées soit 9 millions de plus qu’en 2010, ç’est à dire 4,2% de plus d’une année sur l’autre. Boosté par le succès de films comme « Intouchables » d’Eric Toledano et Olivier Nakache ou encore de « Rien à déclarer » de Dany Boon, le cinéma français se porte donc plutôt bien.
Toutefois, un évènement est venu ternir cette réjouissante nouvelle. En effet, le laboratoire LTC, acteur historique du cinéma français, après avoir été placé en redressement judiciaire début novembre 2011, a du se résoudre à fermer ses portes, suite au prononcé de sa liquidation, le 5 janvier 2012, par le Tribunal de Nanterre.
Filiale de la Holding Quinta Distribution, détenue majoritairement par le très controversé Tarak Ben Ammar, LTC était l’un des pionniers et le leader de la filière technique française. Ce laboratoire assurait en aval de la production de films, la prise en charge et la livraison des copies de milliers de films aux salles de cinéma françaises, le montage ou encore l’ajout d’effets spéciaux…
L’une des raisons principales de l’effondrement de l’industrie photochimique est assurément le passage au numérique. Un mal pour un bien ?
En effet, depuis 2010, le CNCIA a affiché sa volonté d’accélérer le passage au numérique dans les salles de cinéma françaises. Alors que les salles appartenant aux grands groupes tels que Pathé avaient réussi ce challenge, les « petites salles » n’étaient pas encore équipées pour accueillir les films en 3D. Si l’installation d’un tel équipement est très coûteux pour les salles, il s’agit en fait, à long terme, d’une source d’économies certaine, la valeur d’une copie numérique étant trois voire quatre fois moins chère qu’une copie classique de film.
L’économie du cinéma français s’est trouvée petit à petit bouleversée par le passage au numérique. Toutefois, en assurant une offre diversifiée et en disposant de salles 3D, les salles on accru leur fréquentation, faisant notamment revenir le publi des jeunes.
Conduisant au licenciement de près de 200 salariés, la faillite de LTC, corollaire inévitable du passage au numérique, s’avère cependant très nuisible.
Premièrement, le danger de cette banqueroute réside dans l’archivage des bobines conservées par LTC. En effet, il s’agit, maintenant la liquidation prononcée, de gérer un patrimoine qui se nombre en plusieurs milliers de films, d’en assurer le stockage qui nécessite de suivre des conditions de conservation très complexes. Le CNC est venu calmer la polémique puisqu’il a annoncé que plusieurs repreneurs s’étaient récemment manifestés auprès du liquidateur judiciaire.
Aussi, la cessation d’activité de LTC accueille une autre inquiétude, et pas des moindres, à savoir la menace qui pèse dorénavant sur les films gérés par le laboratoire. 61 films sont mis en danger. Si le CNC a annoncé que 31 œuvres n’étaient plus sur la sellette, l’autre moitié des films est cependant encore tourmentée. Ainsi, en décembre2011 la livraison des copies du film de Martin Scorses, « Hugo Cabret » était bloquée. Mauvaise nouvelle également pour Olivier Dahan et son film « Les seigneurs » dont la sortie a finalement du être reportée d’avril à septembre 2012. D’autres réalisateurs devraient encore voir la sortie de leur film entravée.
L’industrie cinématographique française va mal et la passivité du ministère de la culture sur ce sujet polémique est à souligner. En effet, Frédéric Mitterrand, s’exprimant sur la faillite de Quinta Distribution, n’a fait que rappeler la volonté publique de passer au numérique sans se prononcer sur les malheureux licenciés.
La crise de la postproduction en France est endémique. Finalement, les films en danger, initialement confiés à LTC pour leur postproduction ont été mis entre les mains de l’autre géant de l’industrie photochimique, les laboratoires Eclair. Ces derniers, filiale de Quinta Productions restent cependant en danger, puisque la holding a, elle aussi, été placée en redressement judiciaire.
Sources:
- http://www.afcinema.com/Cinema-LTC-ferme-que-vont-devenir-toutes-ces-bobines.html
- http://www.google.com/hostednews/afp/article/ALeqM5h8aj05VmccD80yiQoVwqmJfGMzxQ?docId=CNG.afe5e434b88af11279047736a6332f92.121
- http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/tech-medias/actu/0201818521138-l-annee-fabuleuse-du-cinema-en-2011-ternie-par-la-faillite-de-quinta-industries-269721.ph
- http://ecrannoir.fr/blog/blog/2011/12/22/la-liquidation-de-quinta-industries-un-effet-papillon/