La communication du 21ème siècle est portée par les notions de symbolisme de l’image et a en toute logique placé le média télévisuel au cœur de son processus. Par le passé, la télévision constituait l’instrument essentiel de toute stratégie politique et l’outil principal de la diffusion de l’image et du discours. Toutefois ces dernières années, Internet s’est imposé comme une alternative aux médias traditionnels et les réseaux sociaux ont fait une entrée remarquée dans la sphère politique.
Alors que la campagne présidentielle a officiellement débuté le 9 avril dernier, il est opportun de remarquer que la nature de l’exercice politique a profondément changé. La campagne de 2007 avait déjà amorcé le phénomène d’ une utilisation croissante des médias sociaux par les candidats mais la campagne 2012 a accordé un rôle central aux réseaux sociaux. Le débat de l’entre deux tours a ainsi était l’occasion pour les militants des deux camps d’être omniprésents sur ces médias, en réagissant instantanément aux réactions publiées sur la toile.
Facebook: nouvelle scène politique de la campagne présidentielle ?
Si l’engouement que suscitent les réseaux sociaux à l’instar de Facebook et Twitter au sein de la société civile n’est pas à démontrer, le couple « réseau social – homme politique » est plus improbable mais tout autant inévitable. Il importe aujourd’hui pour un homme politique, d’utiliser ces nouveaux outils de communication quelque soit sa culture technologique et ce pour des raisons d’image et de crédibilité. L’exemple le plus marquant reste l’investiture du Président Barack Obama le 20 janvier 2009. Depuis un certain nombre d’années, « Facebook connect » permet à CNN de connecter les « fans » de sa page sur un événement télévisé retransmis en direct. Ainsi lors de l’intronisation d’Obama, les « fans » de la page Facebook de la chaîne américaine ont pu, en se connectant à la plateforme sociale, voir et commenter l’événement en direct.
En France, même si certaines gaffes de la classe politique ont davantage contribuer à discréditer leurs auteurs(1), les politiques investissent en masse les plateformes sociales. Ainsi on dénombre environ 1400 profils Facebook correspondant à des noms de politiques, de partis ou d’état, parmi eux 300 profils sont mis à jour quotidiennement par les candidats eux-mêmes ou par leurs conseillers. D’autre part 10 millions des membres du réseau Facebook sont des lecteurs réguliers des pages liées à la politique tandis que Myspace avec ses 58 millions d’utilisateurs a enregistré un pic de connexion sur les blocs politiques ou politisant. Ce type de réseau social favorise l’émergence de relations nouvelles entre les gouvernants et les gouvernés.
Dans un premier temps c’est l’engouement suscité par ces plateformes qui a éveillé l’intérêt des politiciens qui y ont vu un moyen de diffuser un message politique, de découvrir les domaines d’intérêts des futurs électeurs, l’orientation politique…tout ceci étant permis par les différentes fonctionnalités du réseau social. Celui-ci est aussi porteur d’ambitions et de valeurs nouvelles. Selon le Doyen Vedel, Internet contrarie les efforts accomplis au cours des 30 dernières années par les grands partis de centraliser leur fonctionnement, pour unifier le système. C’est en ce sens qu’il prédisait que « les réseaux électroniques permettraient de transformer les principes et les mécanismes de la représentation politique dans le sens d’une démocratie directe ». Avec une vision optimiste, ces nouveaux outils aboutiraient à une décentralisation de la politique avec une démocratie plus directe, sans médiation entre l’homme politique et les citoyens.
L’existence de cette relation privilégiée est d’ autant plus revendiquée en période de campagne électorale. Par le passé, le seul feedback entre les candidats et les électeurs était le sondage. Ces nouveaux outils ont alors permis d’envisager d’autres moyens pour connaître l’intérêt manifesté par le public. Certaines études démontrent l’efficacité de ce nouveau moyen d’échange. L’une d’elle, menée par la Dublin business school, insiste sur le fait qu’avec une réelle SMO ( social média optimization), les candidats peuvent aller jusqu’à doubler le nombre de leurs intentions de votes.
Si dans une vision optimiste, les réseaux sociaux permettent donc une décentralisation de la politique, une démocratie plus directe, certains considèrent qu’ils ne seraient en fait qu’un « simulacre de proximité et d’intimité », loin d’empêcher les rapports liés au pouvoir. En réalité, l”impact des réseaux sociaux est tel qu’il est inconcevable de les envisager comme des outils de communication spontanés, intimistes. Ils nécessitent une maîtrise, un contrôle tant les risques de détournement sont grands; chaque information étant emportée par la masse des internautes…
(1). En février dernier, Nadine Morano, souhaitant envoyé un tweet privé destiné à Eric Besson a, par erreur, posté le message de façon à ce qu’il soit visible par tous. On pouvait y lire: « Je bulle dans un Spa avec des copines et toi tu tweet occupe toi de ta femme un peu». Quelques minutes plus tard, le tweet effacé, la Ministre chargée de l’Apprentissage et de la Formation professionnelle tentait de se justifier: « un Dm fail. Faut pas rêver, le Spa, c’est le bureau. Et les bulles, les notes sur l’interview que je donne dans 5 minutes ».
ANONYME, Les réseaux sociaux en politique : une utilité toujours en débat, mis en ligne le 16 juin 2011, consulté le 8 avril 2012, http://archives-leposte.huffingtonpost.fr/article/2011/06/17/2525836_les-reseaux-en-politique-une-utilite-toujours-en-debat-l-observatoire-du-web-politique-29.html
ANONYME, La visibilité politique sur les réseaux sociaux, consulté le 8 avril 2012, http://www.iabfrance.com/?go=edito&eid=438
COLLARD (A.), Facebook: le nouveau gadget des politiques, mis en ligne le 27 février 2009, consulté le 8 avril 2012, http://webjournal.ulb.ac.be/index.phpoption=com_content&view=article&id=248:facebook-le-nouveau-gadget-des-politiques&catid=44:archiveseclairage
GUILLOU (P.), Les réseaux sociaux au coeur de l’exercice politique, mis en ligne le 10 février 2012, consulté le 8 avril 2012, http://www.planete-plus-intelligente.lemonde.fr/organisations/les-reseaux-sociaux-au-c-ur-de-l-exercice-politique_a-12-1105.html
TOVIRAAJ (A), Myspace, Youtube ou Facebook: un outil pour les politiques, mis en ligne le 20 octobre 2006, consulté le 8 avril 2006, http://www.generation-nt.com/politiciens-politique-etats-unis-campagne-electorale-blog-facebook-myspace-youtube-actualite-18059.html