Les véhicules circulant en pleine nature, hors piste… seraient en infraction avec la loi mais surtout lorsqu’ils s’affichent dans des campagnes publicitaires.
Le 23 octobre dernier, la société Toyota, a été condamnée pour « GREENWASHING »* et plus précisément pour non respect du code de l’environnement, par le tribunal de grande instance de Nanterre. Suite à cette condamnation, cette dernière devra supprimer dans un délai d’un mois ses publicités représentant des véhicules du type 4X4, circulant dans la nature. Cette condamnation fait suite à la plainte de l’organisation Française de protection de la nature, France Nature environnement ( FNE), à l’encontre de la multinationale, qui avait constaté un manquement aux règles déontologiques en matière de développement durable.
Toyota : un comportement contraire à la protection de l’environnement
Précédemment à cette plainte déposée contre la société TOYOTA, l’association France Nature environnement avait sollicité le jury de déontologie publicitaire (JPD), afin que celui ci se prononce, sur la manière dont devait être organisée la publicité concernant les véhicules considérés comme polluants. Ce dernier avait enjoint plusieurs constructeurs automobiles de retirer leurs publicités affichant des véhicules circulant ou stationnant hors du domaine routier.
Alors que la majorité d’entre eux avaient suivit les recommandations du JPD, Toyota n’avait pas totalement effacé les photos figurant dans ses catalogues. Ces dernières représentaient des véhicules types 4X4, SUV stationnant ou circulant en pleine nature ou encore près de cours d’eau. Dorénavant donc, le temps où l’ on pouvait voir des 4X4 circuler à travers champs et forêts, arpentant des dunes de sables est révolu. Le juge des référés de Nanterre en date du 23 octobre dernier, a condamné la multinationale japonaise à retirer ces publicités.
C’est donc une victoire pour la fédération de protection de l’environnement qui est à l’origine du référé.
Le tribunal fonde sa décision sur l’article L 362-4 du code de l’environnement qui précise que la publicité mettant en scène des véhicules qui ne sont pas sur le domaine public routier est interdite.
Le juge a retenu par ailleurs qu’ « en laissant croire au public que la possession de ce type de véhicule vaut permis de tout faire dans la nature, la diffusion de ce type de publicité fait, d’évidence, la promotion de comportements contraires à la protection de l’environnement, à la préservation des ressources naturelles ». **
La société devra donc supprimer toutes les publicités litigieuses et ceci dans un délai d’un mois sous peine de se voire infliger une amende journalière de 100 euros.
Une affaire emblématique ?
Cette décision pourrait faire jurisprudence pour d’autres plaintes en la matière. En effet nombreuses publicités mettent en scène des véhicules en dehors du domaine routier. Nous en avons l’exemple avec la publicité pour le Mercedes classe A ou bien encore pour celle présentant un essai de la nouvelle Opel Moka. On peut légitimement penser que le recours à ce mode de communication, ne pourra plus à terme, être envisagé. En effet, s’adonner à la promotion des caractéristiques essentielles des véhicules de ce type, telles que les capacités de franchissement, semble dorénavant complexe.
Cependant, la sanction envisagée en cas de non respect du verdict, apparaît comme néanmoins comme dérisoire pour un groupe automobile qui dégage un chiffre d’affaire de plusieurs dizaines de milliards d’euros par an.
Une décision justifiable ?
Cette décision peut sembler difficilement acceptable dans la mesure où le but même de la publicité est de vanter les mérites du produit à mettre en avant. Certes, il est indispensable de fixer quelques limites, notamment pour préserver certaines libertés, certains droits mais aussi, comme cela est le cas ici dans un souci de préservation de l’environnement. Il est cependant difficilement envisageable d’imposer de ne pas mettre en avant la finalité même du produit. L’interdiction d’illustrer l’usage même d’un véhicule dans son environnement d’utilisation semble poser un véritable problème.
Alors doit on véritablement règlementer la représentation de ces véhicules au sein de publicités? On peut penser que l’institutionnalisation de la censure, de certaines publicités, notamment celles concernant les véhicules en pleine nature, pourrait se justifier par le fait qu’un tort objectif a été causé. Il semble ici, complexe d’établir un lien direct entre la publicité et le préjudice évoqué par le tribunal.
De plus cette décision semble assez sévère envers la société, dans la mesure où l’on connaît son véritable engagement pour la cause environnementale. Celle si est à l’origine de la première mise sur le marché de l’automobile d’un véhicule hybride.
Le constructeur japonais s’est d’ailleurs montré très étonné face au verdict prononcé à son égard, dans la mesure où comme l’affirme Phillipe Boursereau, directeur de la communication, « Nous sommes extrêmement prudents sur ces scènes filmés en plein nature », et ceci à tel point que sur tous les clichés, « un trait de goudron est présent sous les roues »**
Ecologie et publicité automobile
Le détournement de l’argument écologique, pour se donner une image éco-responsable, et ceci à des fins commerciales, plus qu’une véritable politique d’entreprise n’est pas nouveau, cependant il est à noter de manière positive, que le pratique marketing visant à se donner une image d’entreprise soucieuse de l’environnement est de moins en moins utilisée par les constructeurs. Ils s’engagent véritablement dans une dynamique de protection de l’environnement. Ces derniers optent davantage pour la mise en avant du système dit du « bonus/malus » automobile, système acté dans le projet de loi en la matière qui prévoit une réduction du prix d’achat d’un véhicule si celui ci s’avère être peu polluant. Les constructeurs misent donc sur les considérables avantages que présentent l’achat d’un véhicule à faible émission de CO2.
En tout état de cause on peut légitimement se demander si ces publicités mettant en scène des véhicules en pleine nature incitent véritablement à un comportement contraire à la protection de l’environnement. Par ailleurs le consommateur n’est il pas assez averti pour distinguer ce qui relève de la véritable performance du véhicule et de ce qui relève de la mise en avant par un spot publicitaire ?
Sources :
CHEVALIER J., « Quand une voiture dans la nature offense le regard du juge », Lepoint.fr, mis en ligne le 23 octobre 2012, consulté le 5 novembre 2012, <http://www.lepoint.fr/auto-addict/actualites/quand-une-voiture-dans-la-nature-offense-le-regard-du-juge-23-10-2012-1520221_683.php>
MONTERO O., « Faut il punir les publicitaires sui montrent des 4X4 en pleine nature ? », Bioaddict.fr, mis en ligne le 29 octobre 2012, consulté le 5 novembre 2012, <http://www.bioaddict.fr/article/faut-il-punir-les-publicitaires-qui-montrent-des-4×4-en-pleine-nature-a3547p1.html>
LANDIN (S.), « Toyota condamné à retirer les publicités pour ses 4X4 en milieu naturel », Lemonde.fr, mis en ligne le 25 octobre 2012, consulté le 5 novembre 2012, <http://www.lemonde.fr/planete/article/2012/10/25/toyota-condamne-a-retirer-les-publicites-pour-ses-4-4-en-milieu-naturel_1780807_3244.html>
________________________________________________
* Procédé markéting souvent utilisé par les entreprises, pour afficher une volonté de s’inscrire dans une dynamique écologique, cependant cela ne s’avère être souvent qu’une stratégie de communication.
** Jugement du Tribunal de grande instance de Nanterre du 23 octobre 2012.
*** Rendu d’interview, issu de l’article « quand une voiture dans la nature offense le regard du juge », disponible site Le Point.fr.