« This happened because of you. Thank you ». C’est avec ce Tweet que le Président des Etats Unis, Barack Obama, a choisi d’annoncer sa victoire sur le célèbre réseau social à l’élection présidentielle le 6 novembre dernier, une grande première. Ce message sera suivi d’un « Four more years » accompagné d’une photo où il enlace sa femme Michele.
Les réseaux sociaux, outils de communication indispensables
Si la toile s’est enflammée après la publication de cette désormais célèbre photo avec plus d’un million de like sur Facebook en moins d’une heure – et près de 4,5 millions aujourd’hui -, ce n’est que l’illustration d’une campagne placée sous le signe des réseaux sociaux.
Cette élection de 2012 est l’évènement politique le plus tweeté de l’histoire, avec près de 20 millions de messages diffusés pendant la nuit du 6 novembre et des pics à 327 000 messages par minute, selon Twitter. Le 1er débat opposant les deux candidats du 3 octobre avait généré 10,3 de tweets échangés pendant une heure et demie. Au delà des débats officiels, tous les discours et les sorties des candidats ont été repris, commentés, partagés, disséqués. Selon une récente étude, 22% des américains ont annoncé sur un réseau social pour qui ils avaient voté.
Déjà en 2008, l’élection présidentielle américaine avait été consacrée comme la 1ère élection à l’ère du numérique, puisque Barack Obama et John McCain avaient intégré le web à leur stratégie de communication. Les réseaux sociaux se sont ainsi imposés en 2012 comme une évidence et les équipes de campagnes l’ont bien compris en les investissant massivement. L’omniprésence des candidats pendant leur campagne sur ces nouveaux outils est indiscutable, permettant une communication plus directe grâce à des innovations marketing.
Les réseaux sociaux, outils de communication innovants
En plus d’une diffusion en ligne des interventions des candidats sur Youtube avec une chaîne officielle propre à chacun, des comptes ont été créés par les équipes de campagne sur les principaux réseaux sociaux comme Twitter, Facebook, Instagram, Pinterest ou encore Reddit, très en vogue aux Etats Unis et sur lequel Barack Obama est intervenu pour appeler les internautes à aller voter.
Twitter s’est imposé comme le canal de communication politique incontournable et a su se développer pour couvrir au mieux la campagne. A J-2 le site a lancé une carte interactive pour mesurer Etat par Etat la reprise des tweets des 2 candidats accompagné d’un baromètre politique pour mesurer en temps réel la popularité dans les tweets échangés et savoir s’ils sont plutôt positifs ou négatifs. C’est le « Twitter political index ».
Les sites de « check-facting », tel que polifact.com ont su trouver leur place dans cette campagne. Leur but est de vérifier la véracité des propos et déclarations des deux candidats. Les Flickr et Tumblir, consistant en la reprise de photos et d’images animées de Barack Obama et Mitt Romney, souvent humoristiques et pas toujours de très bon ton ont également proliféré sur la toile. Plus surprenant, Spotify – site de musique gratuite en ligne – proposait les playlists des candidats en libre accès pour les internautes. De nombreux bloggeurs ont suivi la campagne, c’est le cas de Nate Silvers qui compile les sondages sur son blog FiveThirtyEight et estime les chances de victoire grâce à des bases statistiques, de probabilité et d’algorithmes. Selon ses estimations Barack Obama avait 85,5% de chance d’être réélu. Enfin, les sites de presse ont mis en place des dispositifs pour suivre la campagne comme des pages dédiées ou encore des applications mobiles. Les médias traditionnels ont suivi le mouvement, comme CNN et son application Convention Pass Floor. La chaîne s’est également associée à Facebook pour développer un outil d’analyse en temps réel des buzzs relatifs aux élections.
Les réseaux sociaux, nouveaux enjeux électoraux
La base de la e-communication est de correspondre davantage aux nouveaux modes de consommation de l’information. Selon un rapport du Pew Project for Excellence in Journalisme sur l’évolution des médias américains, un tiers des électeurs américains ne s’informent que sur internet, 4 américains sur 10 possèdent un smartphone, 1 américain sur 5 possède une tablette, les nouvelles voitures intègrent désormais internet à leur bord. Face à cette mobilité croissante l’immersion dans les médias sociaux est en train de devenir inévitable.
Les données fournies par les réseaux sociaux permettent aux stratèges politiques de mieux cibler les électeurs et de déterminer quels sont leurs désirs. La moindre petite information devient un indicateur et toutes les traces électroniques laissées par les citoyens sont analysées. Quand un électeur potentiel est identifié grâce à ces informations, les équipes de campagnes le contactent et tentent de le rallier à la cause de leur candidat. Un autre phénomène est apparu, celui de la micro publicité qui permet d’exposer un internaute à un spot de campagne selon les sites qu’il consulte. Le micro ciblage a été utilisé par les deux candidats pendant la campagne de 2012. Les réseaux sociaux peuvent ainsi fournir un matériel électoral puissant.
Selon Adam Hanft, spécialiste des communications politiques, « Les réseaux sociaux sont très utiles pour énergiser la base électorale de chaque parti », ils apparaissent alors comme un outil de mobilisation essentiel dans une campagne électorale.
Vers une dé crédibilisation de la campagne
Malgré le fort intérêt qu’ont démontré les internautes pour cette élection présidentielle américaine de 2012, le ton de la couverture par les médias a été plus négatif que positif. En effet, sur Twitter 45% des commentaires sur Barack Obama étaient négatifs pour 25% positifs, contre 58% négatifs pour Mitt Romney et 16% positifs. De même sur Facebook 53% des commentaires sur le président sortant étaient négatifs contre 62% pour le candidat de l’opposition. Les réseaux sociaux ayant été plus sévères que les médias traditionnels.
Après les résultats de l’élections, les internautes se sont livrés à de nombreuses blagues – douteuses – sur le président et sur son adversaire, les mettant en scène dans des vidéos ou sur des photos, pas toujours très flatteuses, donnant un ton plus léger à la campagne qui avait néanmoins un impact et une attention mondiale.
Le coût des campagnes des deux candidats atteindrait 6 milliards de dollars, soit 13% de plus qu’en 2008. Face à cette impressionnante somme, on peut s’interroger sur le poids qu’aura eu la présence sur les réseaux sociaux et sur la nécessité de telles dépenses.
Si les réseaux sociaux sont davantage un outil de mobilisation que de conviction, et même si leurs dérives peuvent être parfois contestées, leur présence croissante et leur mode d’utilisation tendent à les faire devenir incontournables et indispensables.
Sources :
DEHESDIN (C.), « La campagne américaine ne se jouera pas sur internet », Slate, mis en ligne le 22 août 2012, consulté le 21 novembre 2012, http://www.slate.fr/monde/60781/reseaux-sociaux-internet-campagne-elections-americaines
HOURDEAUX (J.), « Présidentielle américaine : le web, outil de campagne », Le nouvel observateur, mis en ligne le 29 août 2012, consulté le 21 novembre 2012, http://tempsreel.nouvelobs.com/vu-sur-le-web/20120829.OBS0720/presidentielle-americaine-le-web-outil-de-campagne.html
KREMPF (A.), « Les médias américains tissent leur toiles sur la campagne », France info, mis en ligne le 16 octobre 2012, consulté le 21 novembre 2012, http://www.franceinfo.fr/monde/les-medias-americains-tissent-leurs-toiles-sur-la-campagne-770621-2012-10-16
NAHUM (A.), « Eléction américaine, Big Brother va vous faire voter ! », Le point, mis en ligne le 27 octobre 2012, consulté le 21 novembre 2012, http://www.lepoint.fr/dossiers/monde/election-presidentielle-americaine-2012/election-americaine-big-brother-va-vous-faire-voter-27-10-2012-1521734_539.php
VIERS (A.), « La victoire d’Obama en forme de consécration pour Twitter », Le nouvel observateur, mis en ligne le 07 novembre 2012, consulté le 21 novembre 2012, http://tempsreel.nouvelobs.com/presidentielle-us-2012/20121107.OBS8327/la-victoire-d-obama-en-forme-de-consecration-pour-twitter.html