L’information est tombée au début du mois : Google aurait abandonné, sans explications, le système qu’il avait mis en place en mai 2012, ce qui a été confirmé par un porte-parole de Google au Wall Street Journal. Le système consistait à informer les internautes, lorsque ces derniers tapaient des mots ou expressions censurés par les autorités de Pékin, que les termes pouvaient entrainer une perte de connexion du fait d’un contenu volontairement bloqué. Les internautes pouvaient ainsi éviter la perte de la connexion (pendant environ une minute) en tapant d’autres mots clés. Si Google ne pouvait donc pas limiter la censure, il en informait tout de même les internautes.
Avec la mise en place de ces avertissements, Google entendait donner la possibilité au « plus possible de gens dans le monde d’avoir accès à ses services » et déclarait : « notre espoir est que ces notifications écrites contribueront à améliorer l’usage du moteur de recherche en Chine continentale ». En fait, l’intention de Google était bien de mettre à nu le système de censure de Pékin, ou le « Great Firewall » (la grande muraille numérique).
Mais voilà que ce système dont la mise en place avait pourtant été saluée par grand nombre n’est plus actif depuis décembre 2012. Selon le site GreatFire, spécialisé dans la censure en Chine, « Google s’incline devant le gouvernement chinois ».
Il faut dire que les rapports entre Google et la Chine sont pour le moins tendus depuis quelques années. En effet, en janvier 2010, Google avait menacé la Chine de fermer son moteur de recherche en Chine continentale car le géant du web se disait victime d’un piratage fin 2009 de plusieurs comptes Gmail de journalistes. Piratage qui selon lui provenait de la Chine. Le 12 janvier, Google avait alors fait part de sa volonté de cesser ses activités dans le pays si l’obligation de censurer ses résultats n’était pas levée, d’autant plus que cette obligation était contraire aux valeurs du groupe dont le slogan est « Don’t be evil » (« ne soyez pas malveillants »). Mais au cours des discussions avec les autorités de Pékin, ces dernières avaient bien insisté sur le fait que l’autocensure était une « exigence légale non négociable ». Google avait alors été contraint, en mars 2010, à fermer la version chinoise de son moteur de recherche et à opérer une redirection de celui-ci vers une autre version hébergée à Hong-Kong, ex colonie britannique et territoire autonome non soumis aux règles d’autocensure applicables en Chine continentale. Cette initiative avait été décriée par la Chine qui avait affirmé que Google avait « violé une promesse écrite » et menacé ce dernier de ne pas renouveler sa licence d’exploitation. Par conséquent, la redirection vers la version de Hong Kong avait dû être modifiée par Google, qui a mis au point une redirection manuelle et non plus automatique, et ainsi pu obtenir le renouvellement de sa licence d’exploitation par les autorités chinoises.
Plus récemment en novembre 2012, Google a été censuré en plein congrès du parti communiste qui devait renouveler ses plus hauts dirigeants. Les internautes n’ont pas pu se connecter ni au moteur de recherche, ni à Gmail et Google Maps, ce qui n’est surement pas une coïncidence.
On peut se poser la question des raisons pour lesquelles Google a décidé d’abandonner son système de notification de la censure. Il s’avère que pour les entreprises IT, le marché chinois est très stratégique, vu le nombre d’internautes dans le pays. Or, si le moteur de recherche de Google est peu utilisé en Chine, ce n’est pas le cas de son application Maps, qui connait la plus forte croissance là-bas selon le Wall Street Journal, ou encore d’Android, première plateforme mobile du pays. L’enjeu financier l’aurait donc emporté.
Sources :
– ANONYME, Courrier International, « Google censuré en Chine pendant le congrès du parti communiste », publié le 12 novembre 2012, consulté le 8 janvier 2013http://www.courrierinternational.com/breve/2012/11/12/google-censure-en-chine-pendant-le-congres-du-parti-communiste
– ANONYME, Le Monde, « Censure : Google modifie son moteur de recherche en Chine », publié le 1 juin 2006, consulté le 8 janvier 2013, http://www.lemonde.fr/technologies/article/2012/06/01/censure-google-modifie-son-moteur-de-recherche-en-chine_1711056_651865.html
– ANONYME, ZDNet, « Google courbe-t-il encore le dos à la Chine ? », publié le 8 janvier 2013, consulté le 9 janvier 2013, http://www.zdnet.fr/actualites/censure-google-courbe-t-il-encore-le-dos-face-a-la-chine-39786010.htm
– AUFFRAY (Ch.) , ZDNet, « Google cède face aux autorités pour rester en Chine », publié le 29 juin 2010, consulté le 9 janvier 2013, http://www.zdnet.fr/actualites/google-cede-face-aux-autorites-pour-rester-en-chine-39752779.htm
– BOUGON (F.), Le Monde, « Google abandonne discrètement son système de notification de la censure en Chine », publié le 8 janvier 2013, consulté le 9 janvier 2013, http://www.lemonde.fr/asie-pacifique/article/2013/01/08/google-abandonne-son-systeme-de-notification-de-la-censure-en-chine_1814123_3216.html
– L (J.), Numerama, « Google n’indique plus aux chinois les termes filtrés », mis en ligne le 5 janvier 2013, consulté le 8 janvier 2013, http://www.numerama.com/magazine/24688-google-n-indique-plus-aux-chinois-les-termes-filtres.html
– M. (M.), GNT, « Fin des avertissements de la censure en Chine : Google perd une bataille », publié le 5 janvier 2013, consulté le 9 janvier 2013, http://www.generation-nt.com/google-chine-censure-messages-alerte-moteur-recherche-actualite-1676932.html