Si Internet ne cesse de s’épanouir en notre société, la presse écrite, elle, semble bien mal en point. Certains parlent même de naufrage du secteur. Outre l’effervescence du numérique qui bouleverse l’environnement médiatique, d’autres facteurs sont responsables de cette dépression sectorielle. Le constat étant que la presse subit amèrement l’emprise du web et le salut sera retrouvé non sans quelques mutations et mesures mises en œuvre. C’est d’ailleurs en ce sens que le Président de la République française a exprimé, le 16 janvier 2013, ses vœux à la presse pour 2013. Que réserve alors cette nouvelle année pour la presse et l’audiovisuel ?

UNE SOMBRE PERIODE POUR LA PRESSE ECRITE

C’est une bien malheureuse période que traverse la presse dans le monde occidental. Le 6 décembre 2012, l’hebdomadaire généraliste américain Newsweek annonçait la cessation de publication écrite du journal, pour ne plus exister que sur internet. Le lendemain, c’est le Financial Times Deutschland qui publiait son dernier numéro. En Espagne, le journal centre gauche El Pais vient de préparer ses salariés au licenciement d’environ un tiers d’entre eux. Une véritable déferlante qui témoigne des ravages de la crise de la presse. Les raisons de celle-ci sont bien connues et ne cessent de gagner en puissance, notamment la concurrence d’Internet et la multiplication des journaux gratuits, qui ont bouleversé substantiellement les comportements du lectorat. Corrélativement, l’usage de smartphones et tablettes tactiles ne cesse de croître, au point qu’il s’agit d’une véritable révolution numérique, affectant le modèle économique de la presse traditionnelle. En effet, les recettes publicitaires des journaux ont considérablement diminuées au profit d’internet et cela ne risque pas de s’améliorer. Qu’en est-il alors du journal imprimé ? La crise signe-t-elle sa disparition ?  Certains optimistes, continuent de lui dessiner un avenir où seuls quelques journaux perdureront et devront cibler des lecteurs haut de gamme. Les éditeurs de presse en ligne français quant à eux, font face en réclamant une « taxe Google » qui consisterait à percevoir des indemnités de la part des moteurs de recherche, au nom de l’utilisation de leurs contenus.

Une exigence à étudier mais certainement insuffisante pour lutter contre la fermeture des titres. De même, la conversion des journaux papiers en medias exclusivement internet semble assez hasardeuse, dans la mesure où la version imprimée est la plus rentable pour les éditeurs.

Si trouver un juste milieu s’avère une tâche hardie, c’est pourtant le défi que devra relever la presse, et ce au nom de sa survie. Actuellement, les seuls groupes de presse résistant le plus habilement à la crise sont ceux qui ont élaboré de nouvelles sources de revenu, émanant d’activités accessibles exclusivement sur Internet. En atteste le quotidien norvégien Schibsted, qui, à l’issue d’un partenariat avec un site de petites annonces, tire ses principaux revenus de cette activité. Une alternative judicieuse puisqu’elle permet à ce journal de subsister en ces temps rudes. Cela d’autant que les coûts d’imprimerie et de processus de publication demeurent élevés et constituent une charge incommensurable pour les groupes de presse. Notons que depuis 2010, plus de 2000 kiosques ont fermé en France. Un triste bilan auquel s’ajoute la remise en question de la profession de journaliste, qui est sacrifiée en premier sur l’autel de la crise. Autant de troubles auxquels il semble indispensable de trouver des solutions, afin que la presse conserve la place qui lui revient dans cette société de l’information dévorée par Internet. Conscient de l’ampleur du problème, c’est dans ce contexte de crise que le chef de l’Etat a formulé ses vœux à la presse en ce début d’année.

LES PROJETS DE FRANCOIS HOLLANDE POUR LA PRESSE EN 2013

En ce 16 janvier 2013, Monsieur François Hollande, Président de la République française, a fait part, dans la salle des fêtes de l’Elysée et devant plus de 700 journalistes, des réformes envisagées pour l’année à venir en ce qui concerne la presse écrite et l’audiovisuel. Evoquant la crise, le chef de l’Etat affirme d’abord vouloir assurer la liberté et l’indépendance de la presse écrite. Au fil du discours, intervient alors l’annonce d’une réforme en matière d’aides à la presse, qui sera menée et présentée par Madame Aurélie Filippetti, Ministre de la Culture et de la Communication. Non seulement cette réforme est envisagée comme un privilège à la presse d’information politique et générale, mais elle devrait également constituer un soutien dans la transition vers le numérique, pour les groupes de presse qui le souhaitent. Ensuite le Président a abordé la problématique de la distribution de la presse puisqu’il existe une mésentente entre PRESSTALIS (messagerie de presse parisienne) et les Messageries de Presse Lyonnaises (MLP). En effet, l’agence parisienne est au bord du dépôt de bilan, et afin d’éviter cela, un système avait été proposé, consistant en ce que les efforts permettant d’assurer les coûts de distribution de la presse, soient partagés entre PRESSTALIS et les MLP. Or, ces dernières s’y refusent, ce qui incite Monsieur Hollande à appeler à la solidarité et à la coopération interprofessionnelle, et cela particulièrement en ce qui concerne la mesure précitée. Dans le cas où nul accord ne serait trouvé, le chef de l’Etat interviendra alors. Autre domaine évoqué dans le discours du chef de l’Etat, la « taxe Google » réclamée par les éditeurs de presse en ligne français. En effet, ces derniers exigent une rémunération de la part des moteurs de recherche (Google en tête), au nom de l’utilisation de leurs articles. Les négociations en cours s’avérant infructueuses (Google s’y refusant fermement), le Président de la République envisage l’intervention du législateur en la matière, afin d’établir un droit voisin des droits d’auteur, en faveur des éditeurs de presse en ligne.

De même, l’intervention du législateur est confirmée en ce qui concerne la protection des sources des journalistes. Une disposition législative naîtra donc en 2013, et consacrera légalement le droit à la protection des sources des journalistes, en énonçant clairement les composantes de ce droit.

Enfin, Monsieur Hollande envisage également de faire ériger une loi en matière d’audiovisuel, qui consacrerait le rapprochement entre le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) et l’Autorité de Régulation des Communications Electroniques et des Postes (ARCEP).

Cette même disposition législative établirait également la nomination des dirigeants de chaînes de télévision publiques par le CSA.

Que de projets ambitieux pour la presse et l’audiovisuel en 2013. Cependant, aucun élément ne permet de conclure que ces mesures permettront de faire habilement face à l’hégémonie du numérique au sein de notre société, toutefois elles semblent constituer un premier pas vers le salut.

Demeurent tout de même quelques questionnements concernant la place accordée à la presse écrite. En effet, ce discours, par lequel le Président de la République présente ses vœux à la presse écrite et à l’audiovisuel, ne permet pas de rassurer quant à la survie de la presse écrite. Des aides financières sont proposées, mais qu’en est-il de prendre en compte la problématique du lectorat ? Puisque c’est bien ce dernier qui a modifié son comportement et ses habitudes.

Peut-être que la crise ébranlant la presse écrite soulève une difficulté plus profonde, à savoir une réelle mutation de la société dans son rapport à la presse écrite.

Antonio Gramsci, fondateur du parti communiste italien décrit la situation critique de la presse écrite en ces termes « l’ancien monde n’arrive pas à mourir quand le nouveau n’arrive pas à naître ».

Quelles que soient les spéculations émises sur l’issue de cette phase critique pour la presse écrite, souhaitons à « l’ancien monde » pour 2013, que ces bonnes initiatives lui permettront de passer cette zone de turbulences avec brio.

SOURCES :

ANONYME, « Evénements : Les vœux de François à la Presse », vidéo diffusée le 16 janvier 2013, consultée le 16 janvier 2013, disponible sur http://www.lcp.fr/emissions/evenements/vod/144065-les-voeux-de-francois-hollande-a-la-presse

ANONYME, « Vœux du Président de la République : « Ce qui attend la presse et l’audiovisuel pour en 2013 », mis en ligne le 17 janvier 2013 consulté le 18 janvier 2013, disponible sur http://www.jurist4medias.fr/2013/01/17/voeux-du-president-de-la-republique-ce-qui-attend-la-presse-et-laudiovisuel-en-2013/

BERTHELEMY C, « La presse prend cher », mis en ligne le 25 octobre 2012, consulté le 18 janvier 2013, disponible sur http://owni.fr/2012/10/25/la-presse-prend-cher/

ANIZON E. SENEJOUX R. TESQUET O, « Qu’arrive-t-il à la presse écrite ? L’abécédaire de la crise », mis en ligne le 12 janvier 2013, consulté le 18 janvier 2013, disponible sur http://www.telerama.fr/medias/qu-arrive-t-il-a-la-presse-ecrite,91776.php

DE VERGES M, « La presse s’enfonce dans la crise », mis en ligne le 10 décembre 2012, consulté le 18 janvier 2013, disponible sur http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2012/12/10/la-presse-occidentale-s-enfonce-dans-la-crise_1801986_3236.html

PICARD O, « Vœux de François Hollande : dans la continuité de Nicolas Sarkozy, le mépris en moins », mis en ligne le 17 janvier 2013, consulté le 18 janvier 2013, disponible sur http://leplus.nouvelobs.com/contribution/762589-voeux-de-francois-hollande-dans-la-continuite-de-nicolas-sarkozy-le-mepris-en-moins.html