Le 3 février 2014 marquera l’institution d’un groupe de régulateurs européens des services de médias audiovisuels par la Commission européenne. Comme le souligne la directive SMA, est entendu comme service de média audiovisuel, tout service qui “relève de la responsabilité éditoriale d’un fournisseur de services de médias et dont l’objet principal est la fourniture de programmes dans le but d’informer, de divertir ou d’éduquer le grand public, par des réseaux de communications électroniques”. Il peut s’agir soit d’une émission de télévision, soit de tout service de VOD, dit “service de média audiovisuel à la demande” (SMAD).
Garantir l’indépendance et renforcer la coopération
Le groupe de régulateur européen est le résultat d’un long processus de réflexion de la Commission européenne. La Commission a largement planché sur la question de garantir l’indépendance des organes de régulation de l’audiovisuel. Dans son rapport de janvier 2013, le Groupe de haut niveau (GHN) indépendant sur la liberté et le pluralisme des médias a recommandé de formaliser la coopération entre les organismes de régulation dans le domaine des services de médias audiovisuels dans le but de partager les bonnes pratiques et de fixer des normes de qualité. En outre, la majorité des participants à la consultation publique sur l’indépendance des organismes de régulation de l’audiovisuel est d’avis que la coopération entre ces organismes est essentielle dans un environnement convergent.
La Commission a produit le « livre vert », adopté le 24 avril 2013. Ce dernier recense au total vingt-sept questions, auxquelles les parties intéressées sont invitées à répondre et à soumettre leurs suggestions. L’enquête a fait ressortir des avis favorables à ce que ces autorités soient officiellement regroupées au niveau européen.
Le Conseil de l’Union européenne le 25 novembre 2013 a par ailleurs invité les États membres à garantir l’indépendance de leurs organismes de régulation de l’audiovisuel et ainsi que la Commission à renforcer la coopération entre les autorités réglementaires dans le domaine des services de médias audiovisuels. Cependant, cette recommandation n’implique pas d’exigence législative. Mediadem, le projet européen qui enquête sur les instruments réglementaires régissant les médias dans douze Etats membres, a mis en exergue les lacunes de la directive SMA quant à l’absence d’exigence d’indépendance des organes régulateurs de l’audiovisuel. Le président du projet avait alors émis le souhait, de remédier à ces déficiences lors d’un prochain réexamen du texte actuellement en vigueur.
L’objectif de créer un tel groupe réside dans le but de rapprocher les différents organes réglementaires indépendants des États membres mais également de la Commission européenne. Dans un des ses communiqués, la commission insiste sur l’importance de consolider la coopération entre les organismes de régulation. Neelie Kroes, chargée de la Société numérique à la Commission européenne a déclaré à ce sujet: « Ce groupe est utile aussi bien aux régulateurs de l’audiovisuel qu’à la Commission: l’indépendance de chacun est renforcée et la coopération sera resserrée au moment crucial où nous révisons les règles de l’UE dans le domaine de l’audiovisuel en 2015. »
Adapter la régulation audiovisuelle européenne à l’ère du numérique
En Europe, le mode de consommation du contenu audiovisuel a profondément changer les habitudes depuis quelques années. Prés de 40,4 millions d’appareils de télévision sont connectés (chiffres fin 2012). Selon les spécialistes, ce nombre devrait connaître une constante évolution jusqu’en 2016 au sein des foyers des pays de l’UE. Il est donc nécessaire de trouver des solutions réglementaires face aux différents problèmes posés par ces nouvelles formes de consommation. « La convergence entre les secteurs d’activité est synonyme d’un choix plus large de contenus de qualité pour l’utilisateur, mais c’est aussi une source de perturbations et de problèmes. Nous devons donc engager un débat convergent à l’échelle de l’UE pour pouvoir faire face à ces changements et aider les entreprises à prospérer, alimenter la créativité et protéger nos valeurs. »
La Commission a rappelé dans un communiqué que la distribution et le visionnage du contenu audiovisuel à travers les frontières sont de plus en plus fréquents. De plus, la création et la distribution de ce contenu audiovisuel est de plus en plus présent en ligne. Ce sont donc les S.M.A.D et les plateformes de vidéos en ligne qui seront particulièrement visés par la prochaine révision de la directive SMA.
La directive sur les services de médias audiovisuels (2010/13/UE) consiste à assurer un marché unique et la sécurité juridique au secteur européen de la télévision et de l’audiovisuel, en créant des conditions de concurrence équitable entre les services audiovisuels, radiodiffusés et à la demande. Cette volonté de créer une autorité européenne spécifique intervient dans une période d’évolution constante et de nouvelles tendances de consommation des médias audiovisuels. Cette révolution technologique se traduit par une convergence des médias audiovisuels et d’Internet. Cette même convergence peut se définir comme un phénomène de fusion progressive des services de radiodiffusion traditionnels et d’Internet.
Le futur groupe d’autorités européennes aura alors à sa charge trois missions principales. Son rôle prépondérant sera de conseiller et d’assister la Commission européenne en vue d’adapter la législation dans le domaine audiovisuel à l’ère numérique. Dans un second temps, il devra faciliter la coopération entre les organismes régulateurs dans l’Union européenne. Enfin, il devra permettre l’échange d’expériences et de bonne pratiques.
Les propositions françaises comme solutions européennes ?
Depuis l’année 2013, il existe une volonté en France de se tourner vers une centralisation d’une autorité unique de régulation dans le domaine audiovisuel. Une fusion des différents organismes de régulation française doit s’opérer afin de garantir un meilleur encadrement des services de médias audiovisuels.
Le CSA a adopté le projet de loi sur l’indépendance de l’audiovisuel public le 31 octobre 2013. Aurélie Filippetti, ministre de la Culture et de la Communication, a déclaré « devoir renforcer la légitimité et l’indépendance à la fois des présidents de l’audiovisuel public et du CSA, et bâtir désormais un audiovisuel tourné vers l’avenir ». Elle a également annoncé l’intention de renforcer les pouvoirs et élargir les compétences du CSA, notamment pour anticiper l’arrivée du service Netflix en France. La ministre plaide pour une “meilleure régulation des acteurs d’Internet” mais aussi pour qu’une “équité soit respectée entre les opérateurs traditionnels et les nouveaux acteurs étrangers”. En outre, a été invoqué également le souhait d’obtenir que « s’impose le principe du pays de consommation et non plus le pays d’établissement ». Cependant la Commission européenne répond par la négative et souligne qu’elle « ne développe aucun projet pour, par exemple changer la règle du pays d’établissement. »
Lors de la récente table ronde sénat qui s’est tenue le 16 janvier 2014, le président de l’Arcep a lancé une suggestion pertinent “le début de la régulation ne peut se cantonner à une réflexion nationale” il semble avoir été entendu par la Commission européenne. a noter toutefois que coopération ne signifie pas fusion.La première réunion du groupe aura lieu le 4 mars et, à l’occasion de celle-ci, le président du groupe pour les 12 premiers mois sera choisi parmi ses membres. par ailleurs, le groupe ainsi institué, ne constituerait qu’une étape dans le processus d’un “super-CSA” européen…
SOURCES :
CHAMPEAU G., “Bruxelles crée un groupe de régulateurs des services audiovisuels en ligne” , Numerama.com, mis en ligne le 04 février 2014, consulté le 7 février 2014, <http://www.numerama.com/magazine/28260-bruxelles-cree-un-groupe-de-regulateurs-des-services-audiovisuels-en-ligne.html>
SAMAMA P., “Bruxelles veut adapter les régulateurs de l’audiovisuel à l’ère numérique”, 01net.com, mis en ligne le 03 février 2014, consulté le 7 février 2014, <http://www.01net.com/editorial/613318/bruxelles-veut-adapter-les-regulateurs-de-l-audiovisuel-a-l-ere-numerique/>
ANONYME., “La Commission crée un groupe des régulateurs européens des services des médias audiovisuels”, europa.eu, mis en ligne le 3 février 2014, consulté le 17 février 2014, <http://europa.eu/rapid/press-release_IP-14-101_fr.htm>
ANONYME., “Le groupe des régulateurs européens des services de médias audiovisuels voit le jour”, erpa.org, mis en ligne le 11 février 2014, consulté le 25 février 2014, <http://www.epra.org/news_items/new-eu-group-of-regulators-of-audiovisual-media-services-established>