Le 23 Octobre 2014, la secrétaire d’Etat chargée du numérique, Axelle Lemaire, a donné la liste des premières métropoles numériques, dans le cadre du programme French Tech. L’objectif de ce label est de stimuler, fédérer et donner une visibilité internationale aux start up françaises.
Un label qui récompense les initiatives locales
Neuf métropoles sur quinze se sont vues décerner le label « French Tech ». Il s’agit d’Aix-Marseille, Bordeaux, Grenoble, Lille, Lyon, Nantes, Montpellier, Rennes et Toulouse. Le programme French Tech part du constat que les acteurs privés investissent très peu en France dans le secteur du numérique. Les start up sont en général financées par les collectivités territoriales, mais surtout par des fonds européens. Son but premier est donc de stimuler le financement privé des start up françaises. De manière générale, il a trois objectifs : valoriser les écosystèmes de start up locaux existants afin d’impulser un mouvement local en favorisant les initiatives individuelles, les fédérer sous une même bannière, et leur donner une visibilité au niveau international, par exemple par le biais d’une représentation dans les salons internationaux. Ce label leur permet aussi de bénéficier de fonds de la banque publique d’investissement, mais surtout de bénéficier d’un fond de 200 millions d’euros délivré par Bercy, qui financera de nouveaux « incubateurs de start up » dans les métropoles concernées.
Le label est pour le moment décerné pour une durée d’an, et sera ensuite délivré pour trois ans. Il peut donc être retiré si la dynamique se détériore. Les projets n’ayant pas été sélectionnés, comme celui de Nice-Sophia Antipolis, peuvent retenter leur chance à tout moment : il n’y a pas de date butoir, et les réponses pour la délivrance de nouveaux labels se feront « au fil de l’eau ». De nombreuses villes se préparent déjà à déposer de nouveau leur candidature en janvier 2015, ce qui montre bien l’attractivité de cette initiative.
Les conditions d’accès à ce sésame sont nombreuses. Une cellule au sein du secrétariat d’Etat au numérique composée de quatre personnes prend en compte trois éléments principaux. La taille et la dynamique de l’écosystème est le critère le plus important : la métropole doit déjà comporter un tissu dense et dynamique de start up sur son territoire, porté par la volonté d’entrepreneurs locaux. Il est aussi recommandé de mettre en avant des « success-stories » locales, pour montrer le succès de leur politique. Ce fut le cas par exemple pour la start up Awox, à Bordeaux.Il faut aussi présenter un projet, des ambitions de développement du numérique au niveau local, et non présenter un écosystème statique. Ensuite, les métropoles doivent mettre en avant la mobilisation des acteurs publics, mais surtout des projets de développement de l’écosystème par les acteurs privés locaux, et notamment le financement d’« accélérateurs de start-up ».
Enfin, l’existence d’infrastructures identifiées est très valorisée. Il s’agit des « bâtiments totems ». Ce sont des espaces emblématiques, insérés et connectés à la métropole, qui permettent aux entrepreneurs de start up de se développer au sein de « pépinières numériques ». Toutes les métropoles French Tech disposent de plusieurs incubateurs d’entreprises de ce type.
L’exemple de Montpellier
C’est notamment le cas de Montpellier. Le choix de cette ville peut surprendre, car la capitale du Languedoc-Roussillon est très touchée par la crise économique, et elle subit un taux de chômage supérieur à la moyenne, ce qui laisse présupposer que ce n’est pas le lieu d’implantation le plus adapté au secteur du numérique. Cette labellisation s’explique d’abord par la forte mobilisation des chefs d’entreprises, qui ont financé de nombreuses initiatives pour promouvoir ce label, comme les outils de communication comme les réseaux sociaux, des événements participatifs, et même un film. De plus, Montpellier est historiquement pionnier dans le domaine de l’économie numérique, car IBM et Dell s’y sont installés dès les années 80. Elle dispose aussi de plusieurs incubateurs, dont un qui a été crée spécialement pour l’occasion, le « poulailler ». Enfin, l’économie numérique et les start up montpelliéraines sont très structurées, ce qui donne déjà une réelle visibilité à la ville. Enfin, Montpellier peut se targuer d’avoir une vraie « culture start-up » : malgré un taux de chomage très élevé, le secteur du numérique montpelliérain embauche davantage que dans le reste du pays. Cette année par exemple, le taux d’embauche dans le secteur a cru de 6.3%, contre 3.9% au niveau national.
La possibilité d’accès à la Halle Freyssinet à Paris
Le label French Tech ouvre aussi la possibilité aux start up de ces métropoles d’accéder à la Halle Freyssinet à Paris. La capitale n’avait pas à proposer sa candidature au label, car elle est de loin le bassin le plus dynamique, représentant à elle seule 60% de l’ensemble des start up françaises. Elle rivalise avec les grandes métropoles mondiales du numérique comme Londres ou Berlin. Elle dispose déjà de nombreux incubateurs, et le nouveau projet à la Halle Freyssinet, dans le XIIIe arrondissement, est intégré dans le projet Frenchtech.
Ce nouveau projet, présenté par le Président Hollande le 22 Novembre dernier, est porté par l’homme d’affaire Xavier Niel. Il est présenté comme « le plus grand incubateur du monde » : avec ses 33 000 mètres carrés, il pourra accueillir plus de 1000 start up, en provenance de Paris, de pays étrangers, mais aussi des entrepreneurs issus de villes qui se sont vues décerner le label « métropoles French Tech » (800 mètres carrés leur seront réservés). L’objectif de cette infrastructure est de créer une grande émulation par le biais de la communication de talents venus d’horizons divers, mais aussi de donner une visibilité internationale aux initiatives françaises. La Halle Freyssinet ouvrira ses portes aux entrepreneurs du numérique en 2015.
L’initiative « métropoles French Tech » s’inscrit dans la politique générale du gouvernement, sous la houlette de Bercy, de dynamiser le secteur du numérique Français. A l’heure des réductions budgétaires de l’Etat, cette nouvelle enveloppe de 200 millions d’euros pour financer de nouveaux incubateurs de start up démontre une réelle volonté politique. Cette initiative a aussi pour objectif sous-jacent de favoriser une « décentralisation » de l’économie numérique, alors que Paris demeure la principale bénéficiaire de l’éclosion de l’économie numérique en France.
De manière plus générale, ce nouvel outil doit être remis en perspective avec les concertations organisées cette automne, autour d’un nouveau projet de loi concernant l’économie numérique, qui devrait être débattu au premier trimestre 2015.
Sources :
BELOUEZZANE (S.), « L’offensive « French Tech » d’Axelle LeMaire », Le monde économie, mis en ligne le 12 Novembre 2014 , consulté le 18 Novembre 2014 http://www.lemonde.fr/entreprises/article/2014/11/12/l-offensive-french-tech-d-axelle-lemaire_4522343_1656994.html
COLLOMBIER (X.), « Nantes décroche le label French Tech », France 3 Pays de Loire, mis en ligne le 12 Novembre 2014, consulté le 18 Novembre 2014 http://france3-regions.francetvinfo.fr/pays-de-la-loire/2014/11/12/nantes-decroche-le-label-french-tech-590450.html
DURIEZ (X.), « French Tech, neufs métropoles sacrées championnes du numérique », La croix, mis en ligne le 12 Novembre 2014, consulté le 18 Novembre 2014 http://www.la-croix.com/Actualite/Economie-Entreprises/Economie/French-tech-neufs-metropoles-sacrees-championnes-du-numerique-2014-11-12-1263093
GUILLEMOLES (A.), « Portée par Xavier Niel, la nouvelle Halle Freyssinet devrait accueillir jusqu’à 1000 start-up », La croix, mis en ligne le 23 Octobre 2014, consulté le 18 Novembre 2014 http://www.la-croix.com/Actualite/Economie-Entreprises/Economie/Portee-par-Xavier-Niel-la-nouvelle-Halle-Freyssinet-devrait-accueillir-jusqu-a-1-000-start-up-d-ici-2016-2014-10-23-1253381
PERCQ (Y.), « A Montpellier, les chefs d’entreprise stimulés par l’initiative French Tech », La croix, mis en ligne le 3 Juin 2014, consulté le 18 Novembre 2014 http://www.la-croix.com/Actualite/Economie-Entreprises/Economie/A-Montpellier-les-chefs-d-entreprise-stimules-par-l-initiative-French-Tech-2014-06-03-1160226