Qui ne s’est jamais servi de FaceBook Connect afin de s’identifier à d’autres sites grâce à ses profils sociaux ? Ce concept, inauguré par Facebook en 2008, est simple : il permet à quiconque inscrit sur Facebook de se connecter à n’importe quel autre site partenaire en utilisant les mêmes informations d’identification. De cette façon Facebook fonctionne comme une plateforme centrale, en permettant à tous de s’identifier sur divers sites web, et ce sans avoir à remplir un formulaire pour obtenir des identifiants.
Cette idée a par la suite inspiré Google + Sign In, ainsi que Y Connect créé par Yahoo.
L’Etat français en pleine transition numérique
Aujourd’hui c’est au tour de l’Etat même de s’inspirer de Facebook Connect, car la situation actuelle est pour le moins complexe.
En effet, à l’heure actuelle, pour pouvoir accéder aux sites de l’administration française, il faut autant d’identifiants qu’il y a de sites web, quand bien même ces sites ne seraient que de multiples découpages d’une seule entité : l’administration française, dans la mesure où chaque organisme a développé son propre système d’identification indépendamment de celui des autres.
Par conséquent plusieurs millions de comptes ont été créés, sur les sites des différentes administrations telles que les Impôts, la Sécurité sociale, ou encore la Caisse des allocations familiales.
Dès lors chaque internaute se retrouve face à une nébuleuse d’identifiants, ce qui ne fait que compliquer la situation.
La « simplification » comme maître mot, mais pas uniquement
Dans un souci de simplification, l’Etat prépare peu à peu sa transition numérique, concrétisée à travers le projet « France Connect », qui a été instigué par le Secrétariat Général pour la Modernisation de l’Action Public (SGMAP).
Ce projet serait basé sur les mêmes principes directeurs et sur des mécanismes semblables à « Facebook Connect ». Ainsi, son but est de permettre une identification, à la fois simplifiée et unifiée, aux multiples sites web des organismes publics en ayant recours à un seul compte qui sera généré par « France Connect ». Les utilisateurs auront alors la possibilité de s’identifier à tous les sites de l’administration, sans avoir pour autant besoin de recréer de nouveaux identifiants, comme c’est le cas aujourd’hui.
Ce projet s’inscrit plus globalement dans la stratégie dite de « l’Etat plateforme », initiée par le décret du 1er aout 2014, le but étant à terme d’aboutir à un système d’information unique de l’Etat. C’est pourquoi, afin de mener à bien cet objectif d’unification de son système d’information, les administrations mettent désormais en place une gestion unique d’identités.
Cependant, la simplification n’est pas l’unique motivation de l’administration française, puisque depuis le 23 juillet 2014, un règlement européen a aussi été adopté.
Ce règlement prône en effet la mise en place d’une interopérabilité en ligne des administrations des Etats membres de l’Union européenne, et le projet « France Connect » vient donc répondre aux contraintes du règlement « e-IDAS ».
Quel fonctionnement en pratique ?
Dans la pratique, l’usager devra d’abord accéder au portail d’un organisme public.
Il pourra alors saisir ses identifiants historiques, et il lui sera ensuite proposé de fédérer un compte « France Connect » toujours grâce à ces mêmes identifiants. Si l’usager accepte, son compte national « France Connect » sera ainsi créé. Une fois son compte national activé il pourra ainsi se connecter, et sans avoir à remplir un nouveau formulaire, au site d’une administration sur laquelle il ne s’était jamais identifié auparavant, simplement en cliquant sur le bouton « France Connect ».
Parallèlement, « France Connect » n’est pas seulement destiné aux particuliers puisque ce projet s’adresse également aux professionnels. Sont ainsi visés les représentants d’entreprises et d’associations.
Il est aussi important de souligner que ce système novateur ne sera pas rendu obligatoire, c’est bien à l’usager de choisir si il désire faire basculer l’ensemble de ses comptes sur « France Connect », ou s’il préfère continuer à s’identifier de façon indépendante.
La transition devrait avoir lieu progressivement puisque dans un premier temps, il s’agira de faire basculer automatiquement les trois millions de comptes déjà existants du site www.mon.service-public.fr au cours de l’année 2015.
Il faudra ensuite patienter jusqu’en 2016, et plus précisément au moment des déclarations de revenus en ligne, pour que soit proposée aux usagers la possibilité de fédérer des comptes pour se connecter au site www.impots.gouv.fr à travers « France Connect ».
Sur la question de la protection des données personnelles et de la nécessaire intervention de la CNIL
D’un autre coté, ce projet enthousiasmant suscite quelques interrogations, qui nécessitent des encadrements.
Tout d’abord le consentement de l’utilisateur sera systématiquement demandé, ainsi les identités ne seront pas générées automatiquement. Car il ne s’agit pas non plus d’une reforme favorisant un partage de toutes les données entre les différentes administrations, et encore moins d’une réforme permettant le stockage des données des usagers que les administrations détiennent.
Le but est bien de partager les informations qui sont nécessaires à chaque administration, comme par exemple le partage de données fiscales en provenance du site www.impôt.gouv.fr, avec une mairie si une famille souhaite inscrire son enfant à la crèche.
Puis, la Commission nationale de l’informatique et des libertés (CNIL) veillera de près à éviter la circulation d‘informations sans le consentement de l’utilisateur. Son rôle régulateur permettra de vérifier que des informations ne circulent pas indûment, et que celles qui circulent soient bien nécessaires à l’administration qui en bénéficie.
Des réunions sont actuellement en cours avec la CNIL au sujet de ces sujets sensibles : « nous testons par exemple un système d’envoi par SMS qui nous permettra d’identifier la bonne personne. Mais il faut bien comprendre qu’il ne s’agit pas de transferts d’informations personnelles entre les différentes administrations » assure Nicolas Conso, chef de la SGMAP.
Toute la difficulté de la mise en place du projet est d’instaurer une confiance réciproque entre les administrations et les usagers, afin que dans un premier temps, les citoyens y adhèrent en acceptant de générer des comptes à travers cette plateforme. Puis dans un second temps, il sera nécessaire de poser un cadre précis sur les limites à apporter aux partages des informations. De quoi donner du fil à retordre à la CNIL.
SOURCES :
– BISEUL (X)., « L’Etat prépare son Facebook Connect », 01net.com, mis en ligne le 2 octobre 2014, consulté le 10 novembre 2014, <http://pro.01net.com/editorial/627994/l-etat-prepare-son-facebook-connect>
– BLOT (G)., « France Connect, un accès universel aux administrations en ligne », 01.net.com, mis en ligne le 28 octobre 2014, consulté le 10 novembre 2014, <http://pro.01net.com/editorial/629522/france-connect-un-acces-universel-aux-administrations-en-ligne>
– BERNE (X)., « E-administration : bientôt un compte unique pour les impôts, la CAF, etc », nextimpact.com, mis en ligne le 3 octobre 2014, consulté le 11 novembre 2014, <http://www.nextinpact.com/news/90194-e-administration-bientot-compte-unique-pour-impots-caf-etc.htm>
– ROBILLART (O)., « France Connect : l’Etat prépare son “Facebook Connect” », clubic.com, mis en ligne le 6 octobre 2014, consulté le 11 novembre 2014, <http://pro.clubic.com/blog-forum-reseaux-sociaux/actualite-730667-france-connect-etat-prepare-faebook-connect-administrations.html>