Dans un communiqué de presse en date du 29 janvier 2015, l’ARCEP précise qu’elle met fin à la régulation de la fourniture en gros de terminaison d’appel SMS sur réseaux mobiles individuels. Le régulateur français se conforme ainsi aux observations de la Commission Européenne. Toutefois, l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes maintien sous surveillance le marché de gros du SMS en France.
Le régulateur national définit le marché de la terminaison du SMS comme étant “le tarif de gros que paye l’opérateur A à l’opérateur B quand un client de A émet un SMS vers un client de B. Elle rémunère l’acheminement du SMS par l’opérateur B sur son réseau”. Cette définition se complète avec celle de la Commission Européenne pour qui “le marché couvre la terminaison de SMS fournie par chaque opérateur à d’autres opérateurs de réseau mobile, opérateurs de réseau fixe, fournisseur d’accès Internet et agrégateurs de SMS”.
Selon l’étude “Evolution des prix des services mobiles en France entre 2010 et 2012” du régulateur des télécommunications français, le nombre moyen de SMS émis par chaque utilisateur est passé de 35 en 2007 à près de 331 en 2010. Cette augmentation s’explique notamment par la régulation effectuée par l’ARCEP depuis une dizaine d’années qui maintien aujourd’hui un plafond réglementaire à un centime d’euro. Cela a permis l’émergence et le développement d’offres illimitées et de forfaits compétitifs pour le consommateur français. Le prix de gros du SMS a ainsi chuté de prés de 20% en trois ans. En outre, chaque opérateur a pu choisir sa politique commerciale sans être entravé par un prix élevé imposé par les opérateurs dominants.
L’ARCEP pour le maintien de la régulation du marché de gros du SMS
Le 14 octobre 2013 l’Autorité de la concurrence rend un avis recommandant le maintien de la régulation sur le marché de gros des terminaisons d’appel SMS. Selon l’autorité aucun service de messagerie ne peut concurrencer et se substituer au SMS, il serait donc nécessaire de maintenir les obligations imposées aux opérateurs mobiles.
C’est ainsi que le régulateur national ambitionne, le 28 octobre 2014, au maintien de la régulation sur ce marché pour une durée de trois ans. La Commission Européenne lui adresse alors une demande d’information sur les conditions de cette régulation. L’ARCEP justifie ainsi ce maintien en procédant au test des trois critères c’est-à-dire les barrières élevées à l’entrée, le signe d’une évolution vers une concurrence effective et enfin une insuffisance du droit de la concurrence.
Structurellement, le marché du mobile est oligopolistique, les barrières à l’entrée tiennent à la réglementation et aux investissements importants. Aucune évolution vers une concurrence effective n’est envisageable puisqu’aucune technologie ne peut se substituer au SMS. Les messageries instantanées (Whatsapp, iMessage ou encore Hangout) nécessitent un mobile compatible, imposent un surcoût lié au forfait Internet et sont limitées par l’étendue du réseau. Ainsi la concurrence ne suffit pas, il est nécessaire d’imposer un contrôle ex-ante. En effet, la suppression de la réglementation conduirait à l’augmentation des prix pour les consommateurs et impacterait les opérateurs d’une charge de prés de 2 milliards d’euros.
La Commission européenne pour la suppression de la régulation du marché de gros du SMS
La Commission Européenne rend le 28 novembre 2014 un avis qui ne retient pas l’argumentation du régulateur français. La Commission estime ainsi que les mesures préconisées par l’ARCEP sont contraires au “paquet télécom”, cette régulation peut conduire à fausser la concurrence. Contrairement à l’Autorité de la concurrence et à l’ARCEP, l’institution européenne considère que la messagerie instantanée peut se substituer aux SMS. En effet, ces messageries proposent une perspective d’évolution importante notamment au travers l’augmentation de part de marché des ordiphones (smartphones) qui sont passés de 16% en 2009 à 53% en 2014. La faible utilisation en France de ces applications s’expliquerait par la régulation importante alors que leur part de marché peut monter jusqu’à 75% dans des pays comme les Pays-Bas où le coût du SMS est élevé.
Pour l’ARCEP la suppression de la régulation conduirait à une forte augmentation du prix de gros du SMS. Or selon la Commission cette augmentation ne serait pas excessive puisque le prix est en moyenne de 2,5 centimes d’euros dans l’Union (1 centime en France).
Après deux mois de négociations, aucun consensus n’est trouvé entre la Commission Européenne et l’ARCEP. Le régulateur national renonce, le 29 janvier 2015, à la régulation de la fourniture en gros de terminaison d’appel SMS sur réseaux mobiles individuels mais maintien sa surveillance sur le marché. L’ARCEP tient au maintien de la concurrence sur le marché du SMS et sur les offres proposées au consommateur.
Cette décision peut surprendre dans la mesure où la Commission Européenne privilégie ainsi les services d’opérateurs américains comme iMessage (Apple), Hangout (Google) ou encore Whatsapp (Facebook) qui ne respectent pas les règles de concurrence européennes.
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