100 millions d’euros, c’est le chiffre annoncé en conférence de presse, mercredi 11 février, par la start-up toulousaine spécialisée dans la connectivité des objets. A cette occasion Emmanuel Macron, Ministre de l’Economie et Axelle Lemaire secrétaire d’Etat au Numérique, ont par ailleurs tenu à féliciter cette réussite. Il s’agit en effet d’un véritable record pour une start-up française, dépassant les levées de fonds de Deezer et de Blablacar. Si certains spécialistes – très optimistes – parlent déjà du « Google des objets connectés », Sigfox semble en effet être promis à un avenir radieux.
Le marché des objets connectés en plein essor
Fondée en 2010, la start-up s’est positionnée sur un marché en plein développement. Selon l’IDATE, il devrait y avoir 80 milliards d’objets connectés dans le monde contre 5 millions aujourd’hui. Rien qu’en 2014, Sigfox a annoncé avoir réalisé un chiffre d’affaire de 6 millions d’euros. Et pourtant le développement de l’internet des objets suscite de nombreuses interrogations notamment sur le plan technique et juridique. Par exemple sur l’interopérabilité des objets, le risque de pénurie de fréquences, la sécurité des réseaux, ou encore, point essentiel, sur la protection des données personnelles. A ce jour, toutes ces questions sont loin d’être réglées et pourraient, à terme, devenir un véritable frein pour l’internet des objets. Sigfox a cependant le mérite d’avoir trouvé un moyen de faire face au besoin croissant en fréquences annoncé avec l’arrivée des objets connectés.
Basses fréquences, faible coût, et économie d’énergie : la recette du succès Sigfox
La clé d’un tel succès vient de la technologie que Ludovic Le Moan et son équipe ont mis en place. Ils ont en effet réussi à développer un réseau spécifiquement dédié aux objets connectés. Le réseau utilise ainsi la technologie radio dite ultra narrow band (bande ultra étroite) et utilise des fréquences particulièrement basses. Plusieurs avantages résultent de cette technologie.
D’abord, l’utilisation de ces basses fréquences ne nécessite pas (en général) d’autorisation spécifique, auprès des instances de régulations, il suffit d’une simple déclaration. En France, il s’agit de l’ARCEP. Ensuite, comme pour toute utilisation du réseau d’un opérateur, il suffit pour le client d’acheter un modem, entre 5€ et 15€, et de s’abonner, entre 1€ et 9€ par objet et par an. Les coûts d’utilisations sont donc très inférieurs à un opérateur classique. Enfin, la consommation d’énergie des appareils échangeant des données est largement diminuée en comparaison aux réseaux téléphoniques. Ainsi, les objets connectés qui utilisent le réseau de Sigfox peuvent avoir jusqu’à dix ans d’autonomie. Le réseau permet d’envoyer par objet entre 0 et 140 messages par jour et chaque message peut contenir jusqu’à 12 octets de données réelles de charge utile. Il s’agit donc de petits messages parfaitement adaptés aux objets connectés. L’entreprise a ainsi déposé une cinquantaine de brevets et peut se vanter d’être la seule à ce jour à détenir une telle technologie.
Sigfox, futur opérateur mondial des objets connectés
L’objet principal de cette levée de fonds était de trouver des financements pour déployer le réseau dans le monde et ainsi devenir le premier opérateur mondial des objets connectés. A l’heure actuelle, la start-up a déjà réussi à déployer un réseau entier en France. Il est aussi présent en Espagne, aux Pays-Bas ou encore en Grande-Bretagne par le biais d’exploitation de sa technologie sous licence. Mais il est aussi disponible dans de grandes villes telles que New York et Moscou.
Sigfox a en fait besoin d’installer beaucoup moins d’antennes qu’un opérateur téléphonique classique. A titre de comparaison, quand Sigfox a besoin de 1 à 3 antennes pour recouvrir 1000 km2, il en faut 20 pour les autres opérateurs. Avec ses nouveaux investisseurs, Sigfox s’est créée une porte d’entrée en Amérique Latine, en Asie et aux Etats-Unis. En effet, de grands opérateurs télécoms tels que Telefónica, SK Telecom et NTT Docomo Ventures ou encore des groupes industriels tels que GDF Suez, Air Liquide et Eutelsat, sont entrés au capital dans des proportions non communiquées.
Mais la start-up ne compte pas s’arrêter là. Il y a quelques jours, Sigfox a annoncé sa participation au projet « Mustang » aux côtés d’Airbus Defense and Space. L’idée est d’utiliser des satellites pour compléter les infrastructures terrestres et ainsi permettre une couverture mondiale et continue des objets connectés. Pour ce faire, l’entreprise développe un terminal hybride capable de basculer automatiquement entre les communications terrestres et satellitaires. Enfin, Sigfox vise une entrée en bourse dès 2016.
Le futur géant de l’internet des objets sera-t-il donc français ? Pour l’heure, ce qui est certain, c’est qu’il s’agit d’une nouvelle belle victoire pour la French Tech.
SOURCES :
CHAPERON (I.), « Levée de fonds record pour la start-up française Sigfox », lemonde.fr, publié le 11 février 2015, consulté le 25 février 2015, http://www.lemonde.fr/economie/article/2015/02/11/levee-de-fonds-record-pour-la-start-up-francaise-sigfox_4574026_3234.html
CUNY (D.), « Sigfox vise le Nasdaq dès 2016 », latribune.fr, publié le 25 février 2015, consulté le 25 février 2015, http://www.latribune.fr/technos-medias/internet/20150225trib9cb119710/sigfox-vise-le-nasdaq-des-2016.html
LAGANE (C.), « Sigfox s’invite dans l’internet des objets par satellite », silicon.fr, publié le 23 février 2015, consulté le 25 février 2015, http://www.silicon.fr/sigfox-sinvite-dans-linternet-des-objets-par-satellite-109074.html
SCHMITT (F.), « Sigfox lève 100 millions d’euros et accélère à l’international », lesechos.fr, publié le 11 février 2015, consulté le 25 février 2015, http://www.lesechos.fr/tech-medias/hightech/0204151091727-sigfox-leve-100-millions-deuros-1092299.php