Que ce soit à la télévision, à la radio, sur Internet, ou encore par affichage, la publicité est partout. Il ne se passe pas une journée sans qu’on y soit confronté. D’où la nécessité de l’encadrer par des règles, notamment pour ne pas heurter le public. Néanmoins, des marques essaient toujours de casser les codes et parfois choquent le public. Peuvent alors intervenir les autorités de régulation.
C’est ce qui s’est passé fin septembre 2019, quand la marque Nana lance une nouvelle campagne publicitaire de 3 minutes intitulée « Vive la vulve ». Cette campagne représente le sexe féminin par des fruits, des coquillages, des pâtisseries, ou encore des marionnettes par exemple, et montre le sang en rouge et non pas en bleu, comme c’est généralement le cas dans les publicités sur la menstruation.
Cependant, là où certains trouvent la publicité « géniale » et saluent la marque pour vouloir briser les tabous à ce sujet, d’autres ont été choqués, au point de lancer une pétition pour la faire retirer des écrans de télévision car « cette publicité montre une image dégradante de la femme », et est choquante, surtout aux yeux des plus jeunes. Aujourd’hui, cette pétition est signée par plus de 16 870 personnes.
En parallèle, plus de 1000 plaintes ont été transmises au Conseil de l’audiovisuel (CSA) à la suite de la diffusion du message publicitaire, pour le censurer, que ce soit via leur site internet, des appels ou des courriers. Bien que ce chiffre soit dérisoire par rapport au nombre de plaintes qu’il a pu recevoir pour d’autres programmes, le CSA s’est penché sur l’affaire.
- La réponse du CSA aux plaignants
C’est le 5 novembre 2019 que le CSA a répondu aux auteurs des plaintes dans un communiqué bref. Dans un premier temps, il rappelle que l’article 3-1 de la loi du 30 septembre 1986, relative à la liberté de communication, prévoit que le CSA « assure le respect des droits des femmes dans le domaine de la communication audiovisuelle. À cette fin, il veille (…) à l’image des femmes qui apparaît dans ces programmes, notamment en luttant contre les stéréotypes, les préjugés sexistes, les images dégradantes, les violences faites aux femmes et les violences commises au sein des couples ».
Il continue en ajoutant que, par l’article 14 de cette même loi, il doit veiller « au respect de la dignité de toutes les personnes et à l’image des femmes qui apparaissent dans ces émissions publicitaires. »
Enfin, il termine par un rappel de l’article 3 du décret du 27 mars 1992 relatif à la publicité, au parrainage et au téléachat qui prévoit que « la publicité doit être conforme aux exigences (…) de décence ».
Finalement, après examen, si le Conseil reconnaît que les images peuvent surprendre, il confirme qu’elles sont bien en lien avec les produits promus et ne véhiculent pas d’image dégradante de la femme. Ainsi, aucun manquement aux dispositions précitées n’est constaté.
- L’autorité compétente en matière de régulation de la publicité
Bien que ce soit le CSA qui ait reçu les plaintes des téléspectateurs dans un but de retrait du message publicitaire, il n’est en fait pas compétent pour faire cesser la diffusion d’un spot publicitaire. Son pouvoir réside seulement dans le fait de communiquer des mises en garde ou des mises en demeure, voire des sanctions financières si elles ne sont pas suivies d’effet. Ici donc, même si le CSA veille à ce que les règles de la publicité soient respectées, notamment vis-à-vis du respect de la décence et de la dignité humaine, ce qu’il a affirmé être le cas en l’espèce, il n’aurait pas pu faire retirer la publicité de la télévision.
Néanmoins, si une publicité est contraire à la loi, le pouvoir de retrait d’un spot publicitaire est réservé à l’Autorité de régulation professionnelle de la publicité (ARPP). L’objectif de cette autorité est la diffusion de publicités qui soient loyales, véridiques, saines et respectueuses. Pour cela, toute publicité diffusée à la télévision, et/ou sur les services de médias audiovisuels à la demande, doit obligatoirement être préalablement visionnée par l’ARPP. Celle-ci donnera alors un avis « favorable », ou « à modifier », ou « à ne pas diffuser ». Ce n’est que si une publicité passe entre les mailles de son filet qu’elle peut s’autosaisir pour agir en faveur d’un retrait du message publicitaire.
En l’espèce, la publicité étant diffusée à la télévision, à des heures de grande écoute notamment, cela signifie que l’ARPP a donné son autorisation pour sa diffusion et ne la considère donc pas comme contraire aux règles de publicité.
Ainsi, malgré la controverse liée à cette publicité, cette dernière n’étant pas jugée illégale, il ne sera pas donné suite aux plaintes, et le message publicitaire pourra continuer à être diffusé sur nos écrans.
Sources :
Vidéo publicitaire de la campagne « Vive la vulve »
ARPP, « Rôle et mission »
Communiqué du CSA, « Message publicitaire en faveur de la marque “Nana” : réponse aux plaignants », 5 novembre 2019.
BIANCHI F., « Saisi pour cette publicité osée de Nana, le CSA peut-il bloquer sa diffusion ? », BFMTV, 11 octobre 2019.