L’affaire Xavier Dupont de Ligonnès, le nuage radioactif de Tchernobyl s’arrêtant subitement à la frontière française, les campagnes électorales, le monde des influenceurs en recherche de notoriété et de « bad buzz », la Covid-19, et bien d’autres sujets encore ont été pris d’assaut par les fake news. Il est alors devenu urgent pour les plateformes dont l’application chinoise TikTok d’empêcher la divulgation de ces informations erronées.
Les moyens existants pour lutter contre les fausses informations
Cette lutte contre la désinformation est un des nombreux enjeux liés à la cybercriminalité et au monde de l’information, la recrudescence de données numériques n’ayant pas facilité ce combat contre des actualités incorrectes. Les fausses informations ont toujours existé mais l’arrivée du numérique a donné une ampleur considérable à ces propos et surtout un impact difficilement contrôlable.
À l’heure des élections présidentielles américaines, nous ne pouvons pas oublier celles de 2016 où Donald Trump utilisait largement les fake news dans un but de contrer sa rivale, Hillary Clinton, en les partageant sur Twitter. En France, une situation similaire s’était produite en 2017 lorsque Marine Le Pen avait affirmé qu’Emmanuel Macron détenait un compte bancaire aux Bahamas.
Cette notion de fake news est également renforcée par les réseaux sociaux où le partage d’informations sans vérification de source est devenue la norme. Selon une enquête récente de la Commission européenne, environ 60% des personnes ne prennent connaissance de l’information que par l’intermédiaire des réseaux sociaux. Il est alors impératif d’agir et de trouver une solution.
En France, la loi n°2018-1202 du 22 décembre 2018 relative à la lutte contre la manipulation de l’information dite « loi fake news » a voulu mettre en balance la diffusion d’informations véridiques et vérifiées avec une législation peu attentatoire à la liberté d’expression. Premièrement, il est désormais possible de faire appel au juge des référés pour les élections électorales qui en 48 heures doit dire si l’allégation est fausse ou non. Deuxièmement, les plateformes ont l’obligation de rendre public les moyens mis en oeuvre pour lutter contre la diffusion de fausses informations et si le site publie les résultats d’élections alors il doit mentionner les responsables.
Le problème c’est que dans la réalité, il n’est pas si aisé à mettre en place et c’est pourquoi d’autres mesures sont prévues.
L’alliance AFP/TikTok pour traquer les fausses informations
Le 9 juin 2020, l’application TikTok adhère au Code européen sur la désinformation. C’est le premier pas montrant un véritable engagement dans cette lutte. Bien évidemment, cette signature est liée au contexte et aux différents scandales qu’elle subit notamment aux États-Unis. C’est plutôt pour eux un moyen de rester utilisable sur le territoire européen en se ralliant à des causes importantes. Face au nombre considérable de fake news apparues en pleine période de Covid-19 où des médecins du monde entier se sont sentis obligés de poster des vidéos dessus pour rétablir un semblant de vérité, TikTok n’avait plus le choix. De mars à mai 2020, plus de 29 000 vidéos seulement sur la pandémie ont été supprimées car les informations transposées étaient fausses et des bannières ont été ajoutées afin de renvoyer l’utilisateur vers des liens vérifiés.
L’AFP, l’Agence France Presse présente dans 150 pays, est la première agence de presse mondiale. Son but est de rechercher tant en France qu’à l’étranger les éléments d’une information complète et objective et a fortiori de la mettre à disposition aux entreprises de presse contre paiement. Début octobre, un programme de fact-checking a été conclu entre l’AFP et l’application TikTok. Il prévoit que l’AFP va vérifier les contenus potentiellement faux ou trompeurs de vidéos postées sur la plateforme de certains pays dont notamment les Philippines, l’Indonésie, le Pakistan, l’Australie et la Nouvelle-Zélande. Le but est de retirer ces contenus problématiques et dans un deuxième temps d’en informer les utilisateurs par le biais de vidéos que mettrait en place TikTok.
Il existe déjà des méthodes de lutte contre les fausses informations en France qui permettent à TikTok de filtrer les contenus et donc de ne pas poster de vidéos trompeuses mais dans d’autres pays cela n’est pas encore organisé. La France au travers de l’AFP veut empêcher la diffusion, par des canaux extérieurs, d’annonces erronées sur son territoire. Il y a là une véritable politique de la presse et une volonté ancrée de diffuser des informations véridiques aux utilisateurs de l’application. Certes TikTok n’a pas pour but premier d’être un support de diffusion journalistique mais face à la crise que traverse le monde de la presse vis-à-vis des réseaux sociaux, les entreprises de presse n’ont d’autres choix que de se diversifier en terme de plateforme pour continuer à exercer. L’application TikTok ayant une portée mondiale, il est alors de vive nécessité de contrôler les flux d’informations.
Dans la même lignée, YouTube, Twitter et Facebook ont mis en place des systèmes permettant d’empêcher la circulation des fausses informations surtout lors de cette période de pandémie où cela est devenu viral. Il est encore trop tôt pour savoir si les outils mis en place sont efficaces. En espérant que la recrudescence du Covid-19 n’appelle plus à celle des fausses informations.
Sources :
- « Coronavirus: TikTok deletes 29,000 rule-breaking videos », BBC, July 29, 2020, bbc.com
- « Covid-19 : sur TikTok, une “légion” de professionnels de santé contre la désinformation », Courrier international, 7 septembre 2020, courrierinternational.com
- « Désinformation. TikTok signe le Code de bonnes pratiques de l’Union européenne », Ouest-France, 22 juin 2020, ouest-france.fr
- « Fake News : la désinformation présente sur TikTok », VivreFM, 15 septembre 2020, vivrefm.com
- « Fast-checking : nouvelle étape pour l’AFP qui s’associe à TikTok en Asie-Pacifique », AFP, 1er octobre 2020, afp.com
- « L’AFP lance un programme de fast-checking avec TikTok », Le Figaro, 1er octobre 2020, lefigaro.fr
- Rapport de la Commission européenne sur les habitudes médiatiques dans l’Union européenne, novembre 2019