La loi du 25 octobre 2021 (n°2021-1382) relative à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique, crée l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM).
La création législative de l’ARCOM résulte de la fusion du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) créé en 1989 et de la Haute Autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (HADOPI), créée en 2009.
Cette fusion part du constat simple de la faible efficacité de la HADOPI et de la lente mais certaine perte d’efficacité du CSA du fait de son champ de compétence ne prenant pas en compte les nouvelles formes de médias et notamment la sphère Internet.
Dès 2012, le candidat à la Présidence de la République François Hollande promettait déjà d’abroger puis de remplacer la HADOPI. En mai 2013 c’était le rapport Lescure qui recommandait la suppression de la HADOPI et le transfert de ses compétences au CSA.
Mais c’est bien un projet de loi présenté en décembre 2019 en Conseil des Ministres qui décida du sort des deux autorités de régulation. Ce projet de loi n’a pas pu être examiné en raison de la crise sanitaire de la Covid-19, mais il a enclenché un mouvement quant à la réformation de ces autorités. Cette mise en mouvement se confirme assez rapidement, car dès janvier 2020, le CSA et la HADOPI signent une convention ayant comme finalité la fusion des deux entités.
Un autre projet de loi est alors présenté en Conseil des Ministres le 8 avril 2021 et adopté par l’Assemblée Nationale, le 29 septembre 2021, après un passage en commission mixte paritaire. Le Conseil Constitutionnel saisi par plus de 60 sénateurs a rendu une décision de conformité partielle de la loi le 21 octobre 2021.
Le texte a finalement été publié au Journal Officiel le 26 octobre 2021, et son décret d’application pris le 27 Décembre 2021.
C’est ainsi qu’est entré en vigueur le 1er janvier 2022 l’ARCOM, devenue nécessaire pour répondre aux nouveaux besoins de régulation nés des transformations du paysage audiovisuel et numérique.
La nécessité d’une fusion
La nécessité d’une nouvelle régulation s’expliquait déjà comme expliqué plus tôt par une perte et un manque d’efficacité des régulations des deux autorités. Certes le but d’une autorité de régulation n’est pas de faire du profit, mais en 12 années d’existence la HADOPI a généré pour environ 87 000 euro d’amendes contre 82 millions d’euro de dépenses. Elle jouait un rôle pour partie pédagogique mais ce rôle n’a toutefois pas permis d’endiguer en France les atteintes aux différentes créations.
La nécessité d’une telle fusion peut aussi s’expliquer par une volonté de mieux protéger la création et ses acteurs après une période de rapide évolution des techniques et des technologies et surtout des pratiques sur Internet. Effectivement, depuis 2009 et l’instauration de la HADOPI, les pratiques du téléchargement illégal ont radicalement évolué en raison notamment de l’apparition des plateformes de vidéos en ligne tel que YouTube ou Netflix. Mais ces plateformes n’étaient elles aussi pas appréhendées par le contrôle du CSA, sauf à de rares occasion, comme dans la décision du CSA du 9 novembre 2016 relative à une chaine YouTube.
Ainsi le but d’une telle fusion est de pouvoir tenir compte de ces évolutions des médias engendrées par le numérique. La création de cette nouvelle autorité de régulation doit permettre à l’État de se doter de nouveaux outils pour répondre à la convergence des différents médias tel que la radio, la télévision et internet.
Aujourd’hui deux autorités de régulation vont demeurer d’un côté l’ARCOM pour les contenus et de l’autre côté de l’ARCEP pour la régulation des infrastructures et du réseaux.
Afin de remplir ses missions, qui vont être exposées ci-dessous, l’ARCOM est composée de 9 membres. Le président de l’autorité est nommé par le Président de la République, puis 2 membres sont nommés par le Président du Sénat, 2 membres par le Président de l’Assemblée Nationale, et un membre sera issu du Conseil d’État, et enfin un membre issu de la Cour de Cassation.
La loi instituant l’ARCOM étend les pouvoirs d’enquête qui étaient dévolues au CSA. Pour cela l’ARCOM dispose d’agents assermentés pour pouvoirs mener ces enquêtes, permettant notamment de recueillir les informations nécessaires à ses avis ou toute autre décision.
Les missions de l’ARCOM intéressant les droits de propriété littéraire et artistique
Les missions de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique intéressant les droits de propriété littéraire et artistique sont listées à l’article L. 331-12 du code de la propriété intellectuelle (CPI).
Ses missions seront diverses, car elle aura pour but de lutter contre le piratage des œuvres audiovisuelles, de lutter contre la désinformation, de protéger les mineurs, ou encore de promouvoir la diversité musicale.
Ses missions instituées par la loi du 25 octobre 2021 sont donc :
- La protection des œuvres et objets ayant un droit d’auteur, un droit voisin ou un droit d’exploitation, qui vise à prévenir les atteintes à ces droits qui seraient commises sur les réseaux de communication électroniques.
- De mener des actions de sensibilisation et de prévention.
- D’encourager le développement d’offres légales et d’observer l’utilisation, licite ou non, des œuvres et objets sujet à un droit d’auteur, un droit voisin ou un droit d’exploitation.
- La régulation et la veille quant aux mesures techniques de protection et d’identification des œuvres et objets protégés.
Certaines de ces missions sont des missions qui étaient auparavant dévolues soit à la HADOPI soit au CSA. Aujourd’hui encore la nouvelle instance de régulation va avoir comme la HADOPI à son époque, un rôle de sensibilisation et de prévention assez important. L’importance de ce rôle est marquée par l’emplacement même de cette mission au sein de l’article L. 331-12 du CPI. En effet, c’est la deuxième mission après la protection des œuvres et objets protégés.
Cela étant, la vraie innovation pour ce régulateur est son champ de compétence. En effet, sa compétence s’étend à tous les réseaux de communication électroniques. Autrement dit la compétence de l’ARCOM s’étend à tout réseau permettant l’émission, la transmission ou la réception de signes, signaux, de voie, d’images, d’écrit par voie électromagnétique
La nouvelle autorité de régulation décrit sur son site web ses missions comme étant de garantir la liberté de communication, la liberté d’expression et le pluralisme politique. Elle indique également avoir pour rôle de superviser les moyens mis en œuvre par les plateformes en lignes, ou encore la réalisation d’études.
Les outils de régulation
Pour pouvoir mener à bien ces missions, l’ARCOM se voit dotée d’outils de régulation plus ou moins importants et de pouvoirs de sanctions comme ses prédécesseurs.
Ainsi est conservé la sanction proportionnelle et graduelle de la HADOPI, c’est-à-dire le mécanisme de double avertissement avant sanction.
En ce qui concerne les contenus en ligne, l’ARCOM se voit dotée d’outils plus intéressants que ne l’était la HADOPI. En effet l’ARCOM peut se doter d’ « outils pour renforcer la visibilité et le référencement de l’offre légale », aux termes de l’article L. 331-17 du CPI.
Mais l’autorité se voit également doté d’un outil important qu’est la liste noire, permettant d’y inscrire le nom et les agissements des sites portant atteinte de manière grave et répétées aux droits d’auteurs, droits voisins et droits d’exploitation. Cette liste noire pourra être rendue publique, ce qui pour les éditeurs de tel sites doit les amener à une responsabilisation quant à leurs pratiques.
La loi du 25 Octobre 2021 octroie d’autres outils de régulation à l’ARCOM, tel que le blocage et le déréférencement des sites miroirs. Cela représente une mesure puissante, certes devant intervenir après une première décision judiciaire de blocage, mais cela permet d’avoir une efficacité plus importante de la première mesure de blocage. Auparavant, il fallait obtenir une décision de justice par adresse internet, alors qu’aujourd’hui, l’ARCOM pourra uniquement demander au juge une actualisation de sa mesure.
Sources
Loi n°2021-1382 du 25 Octobre 2021 relative à la régulation et à la protection de l’accès aux œuvres culturelles à l’ère numérique.
« Les compétences du CSA devenu l’ARCOM », Lamy droit des médias et de la communication, Décembre 2021, 321-10,
« Avis de naissance de l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (ARCOM) », LP, 25 Novembre 2021, N°397, p. 512
WEKSTEIN-STEG (I), GOUAZÉ (A), « Fusion du CSA et de la HADOPI : l’ARCOM aura-t-elle les moyens de ses ambitions ? », Dalloz actualité, 16 Novembre 2021
« Renforcement de la lutte contre le piratage audiovisuel et la création de l’ARCOM », JCP Ed. G, 8 Novembre 2021, n°45, p. 2038.
arcom.fr