Le 13 octobre 2020 la chaine d’enfants influenceurs Swan et Néo, comptabilisant aujourd’hui plus de 5,7 millions d’abonnés dévoile une vidéo mettant en scène Swan comme chef d’un restaurant « McSwan’s » ayant à sa disposition des emballages, produits et décorations de la marque américaine de Fast Food McDonald’s sans jamais mentionner l’existence d’un partenariat. Un an plus tard, le 13 octobre 2021 l’association de consommateurs UFC-Que choisir décide de porter plainte contre le groupe McDonald’s France devant le Tribunal judiciaire de Paris pour pratiques commerciales trompeuses.
De jeunes influenceurs s’adressant à un jeune public.
Les deux frères influenceurs de la chaine Swan et Néo ne sont pas les seuls enfants influenceurs à abreuver un jeune public de vidéo sur le thème de la célèbre chaine de Fast food. Dans leur plainte l’UFC Que choisir ne cible pas un influenceur en particulier mais dénonce bien un choix stratégique de la part de la marque afin de profiter de ce qu’ils nomment un « no man’s land juridique » soumis à l’autorégulation et non à un réel encadrement juridique. On remarque rapidement que les influenceurs choisit sont des influenceurs dont la communauté est largement composé d’enfants, cible de certains de leurs produits comme le « Happy Meal » . Des initiatives d’envergure d’autorégulation au niveau européen collabore pourtant avec McDonald’s France comme « l’EU Pledge » qui comme le précise le communiqué de presse de l’association UFC-Que choisir engage ses participants à ne pas exposer les jeunes enfants à des publicités pour aliments ou boissons. Pour l’association de consommateurs ces engagements ne sont pas tenus vu la sollicitation de jeunes influenceurs afin de promouvoir leurs produits destinés à la jeunesse.
Une pratique commerciale trompeuse ?
S’appuyant notamment sur la condamnation en date du 28 juillet 2021 de l’influenceuse Nabilla Benattia pour pratiques commerciales trompeuses après avoir fait la promotion d’un service de formation au trading en ligne tout en omettant de mentionner que cette promotion était rémunérée, l’UFC-Que choisir estime qu’il y a là dissimulation de la nature publicitaire du message. Or le défaut d’indication du caractère publicitaire de sa publication est constitutif d’une pratique commerciale trompeuse pouvant laisser croire à un choix désintéressé de la part des influenceurs pour une marque plutôt qu’une autre. L’article L121-4 du Code de la consommation dispose par exemple que « sont réputées trompeuses les pratiques commerciales qui ont pour objet (…) de faussement affirmer ou donner l’impression que le professionnel n’agit pas à des fins qui entrent dans le cadre de son activité commerciale (…) ou de se présenter faussement comme un consommateur ». McDonald’s France réagira à cette plainte auprès de l’Agence France-Presse estimant que cette plainte « ne reflète absolument pas la nature de ses pratiques » et dénonce une poursuite abusive.
Pour Gwenaëlle Le Jeune, juriste à l’UFC Que-choisir les textes juridiques ne sont pas adaptés, imposant donc de fonder une telle plainte sur des textes qu’il qualifie de « beaucoup plus généraux comme la loi de 2004 sur la confiance en l’économie numérique ou les pratiques commerciales trompeuses ». Cependant l’idée de vide juridique pourrait ne pas être pertinente aux vues de la jurisprudence qui ne cesse de s’étoffer comme on l’a vu avec l’affaire de la condamnation de Nabilla Benattia ou certains articles comme l’article L121-1 du Code de la consommation disposant que « le caractère déloyal d’une pratique commerciale visant une catégorie particulière de consommateurs (…) vulnérables en raison de leur âge ou de leur crédulité s’apprécie au regard de la capacité moyenne de discernement ». Reste à voir quelles suites vont être données à cette plainte par le Tribunal judiciaire de Paris mais ce qui est certain c’est que cette décision est très attendu tant la situation des enfants influenceurs pose de nombreux problèmes juridiques et moraux.
SOURCE :
EU Pledge, engagement de McDonald’s :
https://eu-pledge.eu/wp-content/uploads/EU_Pledge_McDonalds_Commitment.pdf
UFC-Que choisir, La comm’ et la manière chez McDonald’s France :
France Inter, UFC-Que choisir soupçonne McDonald’s d’utiliser de jeunes influenceurs pour faire sa pub :
Le Monde, L’UFC-Que choisir porte plainte contre McDonald’s pour des « pratiques commerciales trompeuses » visant les enfants :
Communiqué de presse, ministère de l’économie, des finances et de la relance, DGCCRF, condamnation de Nabilla Benattia :
Code de la consommation :
- Article L121-1 : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000032227301/
- Article L121-4 : https://www.legifrance.gouv.fr/codes/article_lc/LEGIARTI000044224578