Le contrat à durée déterminée d’usage (CDDU) est défini par l’article L1242-2 du code du travail, qui encadre les justifications légales d’un recours à un contrat de travail à durée déterminée.
Cet article expose la possibilité de recourir à des CDD dans le cas d’emplois à caractère saisonnier, dont les tâches se répètent annuellement en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs. Ainsi que dans certains secteurs d’activité, définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, où il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.
Sont notamment concernés les secteurs de l’action culturelle, du spectacle, de l’audiovisuel, de la production cinématographique, de l’édition phonographique. Ces secteurs sont présents à l’article D1242-2 du code du travail en application de l’article L1242-2 du même code.
Cet outil contractuel répond aux besoins irréguliers de ces secteurs en prenant en compte leur spécificité et ainsi il permet une conciliation entre les intérêts des employeurs et les droits des salariés. En effet, il va offrir aux employeurs la flexibilité nécessaire à l’embauche du personnel non permanent.
La présence de CDDU est même majoritaire dans certains de ces secteurs.
En effet, s’agissant du spectacle vivant, si l’on se réfère à l’édition de 2024 du Tableau de bord statistique de l’Observatoire prospectif des métiers, des qualifications et des compétences du spectacle vivant, dont les indicateurs sont issus de l’exploitation des données d’Audiens. On y apprend qu’en 2023 le spectacle vivant comportait 251 385 salariés permanents et intermittents, dont 67% de CDDU, 18% de CDD et 15% de CDI.
On peut donc penser au regard de son utilisation massive, que le CDDU répond effectivement, dans les secteurs cités précédemment, à une demande particulière d’encadrement des relations de travail.
L’accès à cette possibilité de conclure des CDDU n’est pas pour autant automatique, il ne suffit pas qu’une entreprise appartienne à l’un des secteurs concernés pour que l’employeur de cette dernière puisse recourir aux CDDU. Il existe trois conditions d’accès.
Premièrement, l’entreprise doit effectivement appartenir à un secteur d’activité où il est d’usage constant de conclure des CDDU. Comme l’a précisé la Cour de cassation par un arrêt de sa chambre sociale du 25 février 1998 (pourvoi n°95-44.048), cette appartenance doit être appréciée au regard de son activité principale, si une entreprise ne déploie dans ce secteur que des activités accessoires il n’est pas possible pour l’employeur de recourir au CDDU.
Dans un deuxième temps, il faut que l’emploi soit temporaire par nature et qu’il soit d’usage de ne pas recourir au CDI pour ce dernier mais à un contrat précaire. Critère important car même dans ces secteurs là certains emplois ont vocation à être permanents. On peut par exemple penser aux ouvreurs et ouvreuses de salles de spectacle qui vont remplir leurs fonctions de façon permanente au gré des changements de prestations et représentations. Les conventions collectives peuvent dresser des listes de métiers pour lesquels il est d’usage de recourir à des contrats précaires, mais si ça n’est pas le cas on va caractériser l’usage en observant les données sociologiques, historiques et statistiques s’y rapportant. Aussi, les conventions ne liant pas le juge il est dans tous les cas le seul à pouvoir établir l’usage. Dans un arrêt du 29 septembre 2021 de sa chambre sociale (pourvoi n°19-25.257), la Cour de cassation a considéré Que pour l’emploi de choriste, au regard de la plupart des offres faites dans le secteur du spectacle vivant, il n’était pas d’usage à être concerné par un contrat précaire mais par un CDI et a ainsi estimé qu’une requalification était nécessaire.
Enfin, il faut vérifier que le CDDU n’ait pas pour effet ou pour objet de pourvoir durablement à un emploi lié à l’activité normale et permanente de l’entreprise. Ainsi à ce sujet la chambre sociale de la Cour de cassation, dans un arrêt du 23 janvier 2008 (pourvoi n°06-43.040), a rejoint la position de la Cour de Justice de l’Union Européenne en affirmant que « la succession de CDDU doit être justifiée par des raisons objectives qui s’entendent d’éléments concrets et précis établissant le caractère de l’emploi ». Cette observation d’une justification objective doit permettre de déterminer si la succession de CDDU est abusive ou ne l’est pas. Car si cette succession est autorisée, comme tout CDD il ne doit pas être utilisé pour pourvoir un emploi pérenne.
En cas d’abus, le juge peut procéder à une requalification de CDDU successifs en CDI. C’est notamment le cas lorsque la relation de travail dure très longtemps dans le cadre d’une émission qui est reconduite à de nombreuses reprises par exemple, ou lorsque la relation de travail va s’étendre pour le salarié à différents projets artistiques menés par l’employeur. En effet la polyvalence d’un employé et son utilisation sur plusieurs projets peuvent signifier un besoin permanent de ce dernier.
Ainsi, en ce qu’il établit un cadre protecteur facilitant les embauches et au regard de son utilisation massive, on peut considérer que le CDDU remplit un rôle de soutien de la culture et de la création artistique. Il est cependant important de souligner qu’en tant que contrat précaire il est fréquent que l’on recoure à ce dernier de manière abusive afin d’éviter la conclusion de CDI, il est donc nécessaire que son utilisation soit strictement encadrée et contrôlée.
Louise Michel
Faculté de droit – Master 2 Droit des industries culturelles et créatives
AIX-MARSEILLE UNIVERSITÉ – LID2MS-IREDIC 2025