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Navigation : IREDIC / 2025 / octobre / 30 / Nomination d’une IA ministre en Albanie et promesse d’impartialité

Nomination d’une IA ministre en Albanie et promesse d’impartialité

Publié par Marie Tinard le 30 octobre 2025 dans Internet / Numérique : Actualités, Notes d'actualité | Consulté 12 Fois

par Marie TINARD, étudiante du Master 2 Droit des communications électroniques

Et si l’impartialité politique n’était plus l’affaire des hommes mais celle des machines ?

Le 11 septembre 2025, l’Albanie nomme « Diella », une intelligence artificielle, au poste de ministre des Marchés publics — une première mondiale qui interroge autant qu’elle fascine. Vêtue d’un costume traditionnel, l’avatar féminin suscite l’intérêt en promettant une impartialité attendue.

Initialement développée comme assistant virtuel pour la plateforme e-Albania, Diella a finalement été promue au rang ministériel avec la mission explicite de rendre les appels d’offres « 100% exempts de corruption ». Alors, une IA peut-elle réellement incarner l’impartialité dans la prise de décision publique ?

Une expérience politique sans précédent

Il est essentiel de comprendre le contexte politique qui justifie, selon le gouvernement albanais, cette nomination. Depuis plusieurs années, l’Albanie est un pays rongé par de nombreuses suspicions de corruption ce qui l’handicape notamment dans sa volonté d’adhésion à l’Union européenne. Pourtant, cette adhésion représente un enjeu majeur pour le pays car elle constituerait un potentiel gage de stabilité. En s’alignant sur les standards européens de lutte contre la corruption, le gouvernement albanais pourrait réussir à s’encrer durablement dans l’espace politique et démocratique européen.

Ainsi, la promesse d’impartialité de cette IA ministre représente un nouvel espoir et repose sur l’idée selon laquelle cette dernière serait immunisée contre toute corruption. Elle permettrait de contribuer à faire de l’Albanie « un pays où les marchés publics sont totalement exempts de corruption ». Cette initiative audacieuse impulsée par Edi Rama, premier ministre albanais, illustre la volonté du gouvernement de restaurer la confiance publique et véhicule le message suivant : il n’est jamais trop tard pour vouloir bien faire.

L’impartialité algorithmique : un idéal juridique impossible ?


Si l’idée d’une IA ministre peut prêter à sourire, elle peut aussi s’interpréter comme quelque chose de positif, notamment dans un souci de stratégie d’image et de communication. Cette envie de transparence traduit la volonté de restaurer la confiance des citoyens dans les institutions. En termes d’image, c’est un coup de maître puisque l’IA incarne la modernité et l’innovation.

De plus, cette annonce a suscité de vives réactions et un débat intense sur la supervision humaine et la prise de décision des algorithmiques. Parmi ces réactions, le Parti démocratique d’Albanie, principal parti d’opposition, a affirmé que Diella est une « façade virtuelle destinée à masquer les vols quotidiens colossaux de ce gouvernement ». Des analystes de l’Institut pour la démocratie et la médiation de Tirana ont également souligné que l’IA ne permettrait pas à elle seule de lutter contre la corruption systémique sans renforcement institutionnel clair et strict.

Ses missions seraient d’analyser des dossiers de candidature, de vérifier la conformité des offres et de veiller à la transparence des procédures. L’algorithme serait désormais perçu comme un arbitre neutre là où des fonctionnaires humains auraient pu être sujets à des conflits d’intérêts, des biais ou à des pressions. Alors est-ce que la nouvelle ministre albanaise serait, en effet, réellement insensible aux pots-de-vin et aux menaces ?

En réalité, la machine n’est pas assurée de reproduire des biais algorithmiques et de se voir instrumentalisée car elle reste programmée par des humains. Ainsi, ses données d’entraînement pourraient être incomplètes voire orientées. En effet, derrière la machine, ce sont toujours des humains aux commandes. L’IA albanaise doit donc requérir en amont des critères clés comme celui de la transparence, de la possibilité de recours ainsi que des garanties de non-discrimination.

Les enjeux juridiques d’une ministre artificielle

Des tensions entre progrès et inquiétudes éthiques apparaissent. Quelle légitimité politique peut revendiquer une intelligence artificielle qui se placerait au centre des décisions étatiques ? Qui répondrait de ses décisions ? Ses développeurs, le gouvernement albanais ou une autorité de contrôle ? Cette situation révèle un vide juridique critique nécessitant un encadrement de l’usage de l’IA dans l’exercice d’une fonction publique. De plus, il semblerait que le droit constitutionnel albanais ne prévoit pas expressément qu’un agent non-humain puisse exercer une fonction similaire à celle exercée par Diella et aucun cadre légal ne définit clairement sa responsabilité en cas d’erreur.

Au niveau européen toutefois, le Règlement européen sur l’intelligence artificielle (RIA) du 13 mars 2024 introduit certaines obligations essentielles comme la transparence et la traçabilité pour les systèmes dits « à haut risque ». Parmi ces exigences, l’article 53.1.d impose notamment aux fournisseurs d’IA de publier un résumé suffisamment détaillé du contenu utilisé pour l’entraînement de leurs systèmes. L’Albanie pourrait s’inspirer de cette réglementation dans l’encadrement de Diella.

Vers un nouveau modèle de gouvernance numérique ?

La portée symbolique de cette nomination est de taille car l’IA accède désormais au cercle du pouvoir marquant l’histoire du numérique. Si la promesse d’une administration 100% transparente et sans corruption reste à démontrer, cette initiative ouvre néanmoins la voie à de nouveaux modèles d’action publique.

Sur le plan politique, l’Albanie se positionne comme un laboratoire démocratique testant la capacité des institutions à intégrer l’IA dans la prise de décision publique même si des pays comme l’Estonie ont déjà exploré cette voie en développant notamment un « robot-juge » chargé de trancher des petits litiges. En France, l’IA reste cantonnée à un rôle d’assistant (à l’image du projet DataJust) sans autonomie décisionnelle ce qui contraste avec l’audace albanaise ou estonienne.

De plus, la dépendance de Diella à des infrastructures techniques expose le service public albanais à des risques majeurs en cas de crise (coupure de courant, cyberattaques, catastrophe naturelle…). Il est donc primordial pour l’État de prévoir des solutions de secours adaptées afin de pouvoir assurer la continuité de ses missions.

Ainsi, nommer une entité virtuelle « ministre » relève moins de la science-fiction que d’une tentative de purification politique. Le danger ne vient pas des machines, mais de la façon dont les humains les conçoivent et les laissent décider à leur place. L’État ne doit pas être soumis à la machine, mais simplement aidé par cette dernière.

Sources :

  • Le Monde, «  Diella, une IA nommée ministre en Albanie : en quoi un agent artificiel serait-il plus intégrer qu’un être humain ?  », 4 octobre 2025.
  • Le Monde , «  En Albanie, de spectaculaires purges anticorruption dans la magistrature  », 24 décembre 2024.
  • Reuters, « L’Albanie nomme un ministre des robots IA pour lutter contre la corruption  », 11 septembre 2025.
  • Balkaneu, «  Le Parlement albanais stupéfait alors que le ministre de l’IA prononce un discours, suscite l’indignation de l’opposition  », septembre 2025.
  • Institut d’études de sécurité de l’Union européenne (EUISS) , «  Intelligence artificielle, vraie politique ? What Albany’s AI Ministry Means for the EU  », octobre 2025.
  • Artificial Intelligence Act, «  Article 53 – Transparence et information pour les utilisateurs  »
  • Blog Cyberjustice, «  L’utilisation des juges-robots en Estonie : fiction ou réalité ?  », 30 juin 2023.

Publié dans Internet / Numérique : Actualités, Notes d'actualité | Tag(s) : IA

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