Depuis décembre dernier, l’adultère n’est plus un tabou, il est même en quelque sorte favorisé.
Le 1er décembre 2009, le site Gleeden.com a ouvert: il s’agit d’un site de rencontre dédié aux personnes mariées. Surprenant? Choquant?
Ce site a été beaucoup critiqué et continue de l’être, pourtant depuis son lancement, 1500 personnes s’inscrivent chaque jour, et avant même son ouverture officielle, le site comptait plus de 100 000 pré-inscrits.
Comme tout produit de consommation, une étude de marché a précédé sa création. Un sondage de SOFRES de 2009 a alors révélé que 14% des français se déclarent infidèles. Il s’agit donc d’une réelle demande. Selon son fondateur, le français Teddy Truchot, le site Gleeden «met fin à une hypocrisie qui règne sur les sites de rencontres pour célibataires, où près d’un tiers sont en réalité en couple». Il ajoute: désormais «les gens sont à l’aise de ne plus être dans la posture du mensonge».
Teddy Truchot est l’un des trois associés de la société; les deux autres, résidant aux Etats-Unis, s’occupent du site sur le territoire américain.
Si le site est international (129 pays représentés), en Europe, les français sont les plus nombreux inscrits suivi des Italiens puis des Belges.
En s’amusant à traduire le mot «Gleeden», on peut constater que le nom du site est très provocateur: «glee» signifiant: joie, et «eden»: paradis. Gleeden serait donc le paradis de l’adultère pour le bonheur de tous. Et les réalisateurs du site ne s’arrête pas là, on peut par exemple lire sur Gleeden.com: «offrez à votre vie conjugale une nouvelle chance, un nouveau souffle».
Les dirigeants de Gleeden ont de nombreux projets et notamment celui de faire du site de rencontre une véritable plateforme communautaire: un réseau social qui permettrait à ses membres de discuter de différents sujets autour de l’adultère comme par exemple «pourquoi tromper son conjoint?» ou encore «comment mettre du piquant dans sa vie?».
S’agissant là d’un réel business, si l’inscription sur le site est gratuite, il faut néanmoins acheter des crédits allant de 7 à 97 € pour utiliser le «chat» ou les messages privés. Il existe même des abonnements à vie! Conscient de la crainte pour les inscrits d’être démasqué par leur conjoint, Gleeden suggère évidemment d’utiliser un faux nom et de ne publié qu’une silhouette comme avatar. Les albums photos pouvant être vu après acceptation et contact entre les participants le désirant. Par ailleurs, Gleeden s’assure que le nom apparaissant sur le relevé de compte ne soit pas évocateur.
Mais quid de la légalité de ce site?
Dans le Code civil, l’article 212 dispose que «les époux se doivent mutuellement respect, fidélité, secours, assistance». On peut alors se demander si le site Gleeden n’est pas une incitation à enfreindre cet article. Par ailleurs les articles 1131 et 1133 du même code prévoient qu’un contrat (ici l’inscription sur le site) dont la cause serait «contraire aux bonnes moeurs ou à l’ordre public» puisse être déclaré nul. La question est donc de savoir si favoriser l’adultère est contraire aux bonnes moeurs. Le pouvoir d’appréciation «des bonnes moeurs» revient aux juges. Il est certains que quelques années auparavant, les juges auraient sanctionné l’adultère… mais aujourd’hui l’adultère est-il toujours un tabou? Est-il banalisé? De plus, depuis 1975, l’adultère n’est plus un délit pénal mais seulement une cause de divorce pour faute. Une incitation peut-elle caractérisée à elle seule une faute?
Beaucoup de questions se posent, et seuls les juges dans les jours, les mois, les années qui suivent apporteront des solutions à ces interrogations.
En attendant la jurisprudence, le site Gleeden.com se porte très bien, et même de mieux en mieux chaque jour.
Sources:
http://www.legifrance.gouv.fr
http://www.lepost.fr
http://www.hebdo.ch
Floriane SCHWICH