La question de l’antériorité des signes distinctifs donne lieu à un abondant contentieux et les conditions d’interprétation de l’antériorité d’un signe sur l’autre méritent parfois d’être précisées.
C’est l’une de ces précisions qu’apporte un arrêt de la chambre commerciale de la Cour de cassation du 20 février 2007.
Suite au dépôt de marque « Mathez » en France et à Monaco en 1998 et en 1999le dépositaire de la marque fut assigné par deux sociétés du même nom, de droit français et monégasque, en nullité et radiation de ces marques, pour atteinte à leurs droits antérieurs sur ce signe, à titre d’enseigne, de nom commercial et de dénomination sociale ;
La Cour d’appel, dans un arrêt du 4 avril 2005 avait ordonné la radiation des marques déposées en France et à Monaco. Décision approuvée par la Cour de cassation suite au pourvoi formé par la société défenderesse.
Le dépositaire des marques avait soulevé le fait qu’il disposait de droits sur l’enseigne « Mathez » depuis 1935 et que le dépôt de la marque n’avait que conforté ces droits antérieurs dont il disposait. Peu importait donc que les demandeurs aient acquis, postérieurement à 1935 des droits sur leur dénomination sociale et leur enseigne.
Il reprochait également à la Cour d’appel de ne pas avoir indiqué les activités des trois sociétés, et plus précisément les produits et services visés au dépôt de la marque, pour relever l’existence d’un risque de confusion.
La Cour de cassation rejette le pourvoi et confirme la décision de la Cour d’appel qui a fait une stricte application de l’article L.711-4 du Code de la propriété intellectuelle et constaté l’antériorité de droits sur la marque ainsi qu’un risque de confusion.
En effet, la Cour de cassation considère que le droit sur l’enseigne ne conférait au défendeur « aucune priorité quant à un dépôt de marque ». Les demandeurs disposant de dénominations sociales antérieures au dépôt de la marque avaient donc bien subit une atteinte à leurs droits.
Quant au risque de confusion, c’est le défendeur lui-même qui avait fait valoir dans ces conclusions d’appel « que le changement d’activité des parties adverses avait créé un rapport de concurrence qui n’existait pas jusqu’alors ».
La Cour de cassation précise donc dans cet arrêt qu’une enseigne ne suffit pas à conférer une priorité à son bénéficiaire, et que la dénomination sociale revête une force probante supérieure dès lors que les conditions de l’article L.711-4 du Code la propriété intellectuelle sont remplies. Cet article précise qu’il faut, pour que l’antériorité d’un nom commercial ou d’une enseigne soit opposable à une marque, qu’ils soient « connus sur l’ensemble du territoire national », ce qui n’est pas le cas en l’espèce, puisque l’enseigne du défendeur était locale. Il faut également un risque de confusion, démontré par le défendeur lui-même.
En effet, la dénomination sociale d’une société se trouve inscrite dans ses statuts et se trouve donc protégée dès son immatriculation au registre du commerce et des sociétés
Il apparaît donc dans cette décision que le conflit relatif au dépôt de marque opposant une enseigne et une dénomination sociale sera réglé en faveur d’une dénomination même postérieure dès lors que l’enseigne sera locale et qu’un risque de confusion existera.
Sources :
www.bepub.com
www.legifrance.gouv.fr
Angélique COUTANT