LA RESPONSABILITE DES PEER TO PEER : 2005, UNE ANNE DIFFICILE

Alors que le nombre d’internautes échangeant des fichiers via les peer-to-peer (P2P) ne cesse d’augmenter, les juges, les un après les autres, se posent en défenseur des droits d’auteur et réaffirment de par le monde, la propriété des auteurs sur leurs œuvres.
Avant même la retentissante solution rendue par la Cour Suprême des Etats Unis dans l’affaire Grokster le 27 juin 2005 (« L’arrêt Grokster : un emballement » de Mouron Philippe du 14 novembre 2005), la cause est déjà entendue pour les P2P japonais. En effet, le tribunal de grande instance de Tokyo a débouté le 31 mars 2005 la société de partage de fichier MMO de son appel dans l’affaire qui l’opposait à l’association japonaise de l’industrie du disque (RIAJ) et la JASRAC (équivalent de la SACEM en France). Le tribunal confirme ainsi la fermeture du service de P2P et les 30 millions de yens de dommages-intérêts pour atteinte au droit d’auteur. Les juges japonais inaugurent ainsi un nouveau courant en affirmant que fournir un service de partage de fichiers non autorisés constitue en soit une violation des droits des maisons de disques de « mettre à disposition » des enregistrements sur internet. Cette sévérité révèle la répression forte dont font usage les japonais à l’égard de leurs pirates. Cela explique pourquoi le développement de logiciels P2P sécurisés s’est fait beaucoup plus rapidement au japon qu’ailleurs.
Dans le même esprit, le mois de septembre est également très révélateur de ce courant. En effet, ont été placées sur les braises encore chaudes des tendances japonaises et américaines trois services de P2P. Le 5 septembre, Kazaa est mis en touche, étant reconnu coupable d’encouragement à la violation du droit d’auteur par les juges australiens qui laissent alors deux mois au service pour installer des filtres à destination des internautes australiens. Kazaa entend évidemment faire appel de ce jugement qui, bien que limité au seul marché australien, pourrait s’avérer lourd de conséquences. Puis, ce même mois, les tribunaux taïwanais condamnent après deux ans de bataille juridique, KURO, une application P2P très à la mode à Taïwan. L’originalité de cette décision provient des sanctions qui ont pour la première fois pris la forme de peines de prison pour atteinte au droit d’auteur à l’encontre des distributeurs et d’un utilisateur. Enfin, toujours en septembre, SORIBADA, le service de P2P coréen, s’est vu imposer de mettre fin à ses activités pour cause de violations du droit d’auteur.
Chaque Etat cherche à répondre à la demande internationale de protection du droit d’auteur. La combinaison de ces actions, menées au niveau local par les sociétés d’auteurs nationales, semble porter ses fruits et prouve leur volonté de porter un coup décisif au piratage. Le curseur de la responsabilité, longtemps cantonné strictement aux internautes, se déplace irrémédiablement vers les éditeurs de logiciels eux-mêmes. En ce sens, l’année 2005 se révèle un excellent cru.

Sources : www.cisac.com / www.techno-science.net / www.01net.com

Jean-François VOLLE