PLAIDOYER EN FAVEUR DES CYBER MACHINES A SOUS

Les monopôles publics sont de plus en plus insupportables de nos jours, spécialement dans le contexte de la société de l’information. L’architecture de l’Internet comme espace de liberté se prête mal au maintien de telles limitations, qui sont d’un autre temps. Celles-ci sont désormais remises en cause.
C’est ainsi que le groupe Partouche, leader des casinos en Europe, a décidé d’attaquer un monopôle public devant la Commission Européenne : celui de la Française des Jeux sur l’activité des jeux d’argent en ligne.

Le Syndicat Moderne des Casinos de France SMCF), qui comprend une majorité d’établissements Partouche, souhaite en effet développer ses activités sur Internet, en créant des « cybercasinos ». La libre concurrence nécessaire à ce développement est inexistante dans ce secteur très réglementé, du moins pour les établissements français. Rien n’empêche en effet les internautes joueurs de se connecter à des sites d’établissements étrangers, situés dans des Etats où la législation est plus souple.

Patrick Partouche insiste à ce niveau sur l’importance des pertes en termes de parts de marché, ne serait-ce que pour son groupe mais aussi, indirectement, pour l’Etat. En effet, les recettes des casinos étant surtaxées, leur augmentation ne pourrait qu’intéresser financièrement les pouvoirs publics.
De plus, plutôt que de devoir contourner la législation nationale, ce qui lui avait été reproché en 2002, le directeur général du groupe met en avant des principes de transparence et de préférence nationale au soutien de son action.

Côté public, la direction de la Française des Jeux ne comprend pas le fondement de cette action. Selon elle, ses activités et celles des casinos sont totalement différentes, notamment du fait qu’elle ne gère aucun jeu de hasard similaire à ceux que l’on trouve dans de tels établissements. Elle ne s’occupe que des jeux de loterie et des pronostics sportifs, notamment avec le PMU.

Naturellement, l’action entreprise devant la Commission invoque un abus de position dominante, ainsi qu’un maintien de monopôle injustifié. Si ceux-ci sont avérés, ce qui semble ne faire aucun doute, l’Etat français sera mis en demeure de réformer sa législation afin de permettre l’ouverture du marché.
Si tel n’est pas le cas, la Cour de Justice serait saisie du dossier et une amende viendrait sanctionner la France pour manquement.

Au plan interne, le SMCF a aussi fait parvenir sa demande directement au Premier Ministre. Si une réponse négative est retournée, le syndicat annonce déjà qu’il exercera un recours devant le Conseil d’Etat.

Toutes les cartouches disponibles sont donc tirées en même temps ! Le but est d’intensifier la pression sur l’Etat et de lui faire prendre conscience du caractère étriqué de la législation en vigueur.
Et si aucune de ces actions n’aboutit, M. Partouche usera du dernier pouvoir qu’il lui restera : ouvrir un casino en ligne déclaré dans une zone off shore, permettant d’évincer l’application de la loi. Il penserait déjà à Gibraltar.

Les actions entreprises aboutiront-elles à un résultat aligné ? Ce jeu de hasard juridique voit ses règles brouillées entre le monopôle public contesté et le monopôle privé souhaité. Le groupe Partouche est en effet très largement dominant sur le marché français et serait sûrement le seul à se lancer sur Internet.

La réponse de la Commission nous éclairera sur cette problématique. Elle interviendra d’ici un an, lorsque l’instruction sera achevée, laquelle comprend un examen approfondi de la situation des protagonistes.

Source : http://www.zdnet.fr
Philippe MOURON