Deux émissions diffusées sur la chaîne privée de télévision M6 posent problème au Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA).
La première concerne un reportage intitulé « Hôpital : la grande chasse au gaspillage » que les téléspectateurs ont pu découvrir sur leurs petits écrans le 22 janvier 2006 dans le cadre du magazine bimensuel Capital, dont le thème était « Médecins, infirmières, chirurgiens : ils nous soignent mais à quel prix ! ». La scène mise en cause par le CSA retranscrit une conservation entre un soignant et les parents d’un mineur âgé de 16 ans, étant hospitalisé après une tentative de suicide par pendaison, mise en échec grâce au concours d’un ami.
La seconde émission mise en cause est une série intitulée Ma vie au commissariat. Dans les troisième et quatrième épisodes diffusés le 01er février 2006, l’instance de régulation de l’audiovisuel a relevé trois scènes litigieuses : l’une concernant l’interrogatoire d’un mineur dont le but est de prouver la maltraitance que lui fait subir sa mère, l’une concernant l’interrogatoire d’un mineur qui est soupçonné d’avoir agressé des pompiers en jetant des projectiles sur leur camion, et enfin la dernière concernant l’interrogatoire d’un mineur soupçonné d’avoir volé une somme d’argent à un individu lui ayant fait subir des attouchements sexuels.
Ces scènes, qu’elles soient extraites de Capital ou bien de Ma vie au commissariat enfreignent les articles 8, 10 et 21 de la convention que M6 a signé avec le CSA le 20 novembre 2001.
En effet, aux termes de l’article 8 de la dite convention « dans le respect du droit à l’information, la diffusion d’émissions, d’images, de propos ou de documents relatifs à des procédures judicaires nécessite qu’une attention particulière soit apportée d’une part au respect de la présomption d’innocence, c’est-à-dire qu’une personne non encore jugée ne soit pas présentée comme coupable, d’autre part, au respect de la vie privée, et enfin à l’anonymat des mineurs délinquants ».
L’article 10 stipule quant à lui que les émissions diffusées sur la chaîne ne portent pas atteinte à la dignité de la personne humaine et respectent les droits de la personnalité définis comme le droit au respect de la vie privée, le droit à l’image et le droit à l’honneur et à la réputation. La chaîne doit veiller à éviter les images ou les témoignages visant à l’humiliation des personnes ainsi que celle traitant l’individu de manière avilissante.
De plus, l’article 21 stipule que « Le recours aux procédés permettant de recueillir des images et des sons à l’insu des personnes filmées ou enregistrées doit être limité aux nécessités de l’information du public. Il doit être restreint aux cas où il permet d’obtenir des informations difficiles à recueillir autrement. Le recours à ces procédés doit être porté à la connaissance du public ».
M6 a déjà été mise en demeure le 13 juillet 2004 pour avoir violer les articles 8 et 10 de la convention en faisant apparaître un lieu comme le domicile de la pseudo-victime de l’agression fictive survenue dans le RER D.
La chaîne avait également été mise en demeure le 05 octobre 2004 pour violation cette fois-ci des articles 10 et 21 de la convention avec le reportage intitulé « Folie meurtrière » et diffusé dans Zone interdite le 30 novembre 2003, qui montrait l’arrestation d’un homme schizophrène venant d’assassiner sa mère et dont le père et le frère n’avait consenti à aucune autorisation de tournage alors qu’ils étaient clairement identifiables.
Au vu de ces précédentes mises en demeure, et au terme du pouvoir de sanction administrative dont il dispose à l’égard des radios et télévisions publiques ou privées, le CSA a engagé une procédure de sanction à l’égard de M6 le 21 mars 2006.
La chaîne risque la suspension, la réduction ou la suppression de son autorisation (bien que ce type de mesures soit rare). Elle encoure bien plus probablement une amende et/ou la diffusion d’un communiqué.
Sources :
– Décision du CSA en Assemblée plénière du 21 mars 2006, publiée sur le site le 25 avril 2006
– « M6 dans le collimateur du CSA », Nouvelobs.com, 26 avril 2006
Aurélie GIOIA