JOOST, LA TELE DU NET

Janvier 2007, Niklas Zennström et Janus Friis (créateurs controversés de la plateforme de peer to peer Kaaza et du système de téléphonie par internet Skype revendu à eBay pour 2,6 milliards de dollars) annonçaient le lancement en Avril de JOOST, la télé du net, dans un but fièrement avoué de « révolutionner la télévision ».

Tout d’abord, il faut procéder à l’analyse technique de ce nouveau programme, qui pourrait bien faire de l’ombre aux modes de diffusion traditionnels que l’on connaît en matière de télévision (l’hertzien, le câble et le satellite). Après cela, on verra par quels moyens JOOST compte attirer des diffuseurs de contenu ce qui nous amènera à mettre en lumière son mode de financement et sa rentabilité sur le long terme.

JOOST a pour objectif d’être ni plus ni moins qu’un service de télévision par internet, proposant les contenus de grandes chaînes, ainsi qu’un ensemble de programmes aussi riches et diversifiés que sur les chaînes traditionnelles.
Afin de réussir cette prouesse ludique, les concepteurs ont repris les mécanismes du peer to peer qui avaient si bien marché avec Kaaza. En fait, le téléchargement du programme désiré ne se fait pas à partir d’un serveur central qui les collecteraient, mais à partir d’autres sources (d’utilisateurs) qui regardent la même émission. C’est donc un système d’émission / réception se faisant entre une foultitude d’utilisateurs. Bien sur, tout ceci ne serait pas possible sans l’augmentation de la puissance de la bande passante ainsi que l’accroissement du nombre d’utilisateurs d’internet en haut débit (deux des principales caractéristiques de ce qu’on a pu appeler le WEB 2.0).
Joost pourrait être qualifié en fait de vidéo à la demande (VOD) gratuite à grande échelle et participative ; il n’y a pas de grille de programmation, l’utilisateur compose lui-même sa grille puis la télécharge et la regarde. De la télévision 2.0 dans le texte, dans le sens ou elle est personnalisée (possibilité d’interaction en laissant des commentaires sur le programme regardé, commentaires vus en direct par les autres spectateurs du programme), et à la demande. Toutefois, si certains peuvent y voire des similitudes avec des plateformes de mise à disposition de vidéos comme You Tube, la différence réside dans le fait que les programmes sont éditées par des professionnels de la création et l’upload (la mise à disposition) de vidéos personnelles, ou de vidéos protégées par le droit d’auteur est complètement proscrite.
L’avantage de ce dernier point concerne particulièrement les producteurs de programmes, qui pouvaient craindre les contrefaçons potentiels que l’on a déjà vu à grande échelles sur les sites comme You Tube ou Dailymotion : puisque la mise à disposition de contenu par l’utilisateur est prohibé (seul le téléchargement est possible), les risques sont amoindris voire nuls. D’autre part, outre cette première barrière à la fraude, tous les contenus seront protégés annoncent les deux concepteurs.

De bonnes intentions, un arsenal technique bien huilé, JOOST n’en demeure pas moins une télévision, ayant pour objectif principal l’émission de contenu audiovisuel, et est soumise à l’impératif de rentabilité et – qui sait – bientôt de concurrence.
Hors, comment attirer les fournisseurs de contenu (distributeurs, chaînes de télévision, producteurs…) tandis que JOOST se veut gratuite pour l’utilisateur ? En réalité, la rémunération se fait par un système de redistribution des recettes publicitaires ainsi que par une part minime de programmes payants (10% au maximum). En ce qui concerne la publicité, on l’annonce en très petite quantité et personnalisée (en fonction des programmes regardés par l’utilisateur ou son lieux d’habitation, par exemple).
La clef du succès semble donc être dans l’importante quantité de partenaires ; JOOST, pour fonctionner (même si le peer to peer est moins gourmant qu’un système type You Tube) va donc devoir multiplier les contrats de publicité, être attractif pour les annonceurs ce qui passe par des contenus originaux qui attirent le public.

Il semble que cette nouvelle offre de programme soit attractive autant pour les annonceurs que les créateurs de contenu ; preuve en est l’accord récent entre le géant des médias américain Viacom (propriétaire de MTV et des films de la Paramount) qui vient compléter une longue liste dans laquelle figure notamment Warner Music, Endemol, National Geographic…

Dans cette optique, on comprend mieux la stratégie de certaines chaînes de télévision qui pourraient s’insèrent beaucoup plus fortement dans le financement d’œuvres audiovisuelles en vue de profiter de ce nouvel eldorado télévisuel lors de la vente de leur programme sur des nouveaux modes de diffusion de contenu audiovisuel comme la plateforme JOOST.

Sources :

http://www.tech.youvox.fr/
http://www.clubic.com/

Benjamin REIX