LA DIFFICILE INTÉGRATION DE LA VOD DANS LA CHRONOLOGIE DES MÉDIAS

Selon un récent sondage de l’observatoire de la vidéo à la demande, 18 % des français déclaraient connaître la VOD en été 2006 contre 35 % en février 2007. Le principe est que tout nouvel entrant sur le marché du cinéma se voit attribuer une place au sein de la chronologie des médias. Rappelons que la chronologie des médias est un système relativement récent puisqu’elle est née des accords du 15 mars 2007 et du 20 mai 2000 entre l’ARP, le BLIC, TPS et Canal Plus.

Mais quelle fenêtre attribuer à la VOD au sein de cette chronologie ? Un accord du 20 décembre 2005 avait entériné le problème : tous les auteurs, producteurs et acteurs de la VOD en France avaient fixé le délai de diffusion des films en VOD à 33 semaines après la sortie de ceux-ci en salles. Mais faute d’entente, cet accord n’a pas pu être reconduit. Cette mésentente provient du fait que les fournisseurs de services de VOD, se plaçant d’un point de vue économique et attractif vis-à-vis des consommateurs, souhaitent réduire le délai entre la sortie en salle et la diffusion en VOD des films. À l’inverse, les auteurs voient en la chronologie des médias un moyen d’optimiser la rentabilité des films. De plus, les chaînes de télévision traditionnelles, Canal Plus en particulier, sont pour le maintien de ce délai. En l’état actuel des choses, tous les acteurs concernés s’accordent sur la réduction de la fenêtre d’exploitation de la VOD que l’on ne peut maintenir à sept mois et demi. Les parties en présence sont pour un probable alignement de la VOD avec le DVD. Cependant, de nombreux éditeurs vidéo, tels que Philippe Bastard de Crisnay, président du syndicat de l’édition vidéo (SEV), veulent renégocier le délai de six mois accordé au DVD dans la chronologie : ils prônent une fenêtre de quatre mois et demi, voire moins en fonction du nombre d’entrées en salles d’un film. Ces derniers redoutent l’alignement VOD-DVD qui mettrait ces supports en concurrence avec un net avantage pour la VOD du fait de sa souplesse d’utilisation. De toute manière, l’évolution de la chronologie des médias est inéluctable.

Mais une telle chronologie est-elle vraiment utile dans un monde de plus en plus dématérialisé ? Rien n’est moins sur. En janvier 2007, Apple a décidé de lancer, depuis le Luxembourg, une plateforme VOD via iTunes, avec une projection des films trois mois après leur sortie en salles. Il faudrait donc négocier une chronologie au niveau mondial, comme ce qui a été fait pour le zonage des DVD.

Si l’on remanie de la sorte cette chronologie, des bouleversements du système de financement seraient donc à craindre. Toujours est-il que le cinéma ne peut pas se passer des apports de Canal Plus. Même si la VOD finance, dans une moindre mesure, le cinéma français avec une taxe de 2 % (article 302 bis KE du code général des impôts) que la SACD souhaite porter à 5,5 % et les FAI à 4,5 %, le cinéma français n’a pas trouvé là un équivalent à Canal Plus. D’un autre côté, France Télécom a créé en novembre 2006 une filiale en charge d’investir dans le cinéma français par des accords de coproduction notamment. Mais n’oublions pas que Canal Plus apporte près de 150 millions d’euros chaque année au cinéma français.

Sources :
– La Gazette du Palais, 13 mai 2007, « VOD et chronologie des médias : un mariage impossible ? »
– Les Echos des 16 et 17 février 2007

Adrien BERTAUD DU CHAZAUD