L’ADOPTION DU NOUVEAU « PAQUET TELECOM » : DES DIVERGENCES ENTRE L’ARCEP ET BRUXELLES.

La Commission européenne a adopté le 13 novembre 2007 le fameux « paquet télécoms ». Ce « paquet télécoms » qui a été soumis aux Etats membres ainsi qu’aux eurodéputés, met en place de nouvelles règles concernant les télécommunications et ce dès 2010. Ce paquet adopté par la Commission contient dans ses directives et règlements une série de nouvelles règles.

La Commissaire européenne en charge de « la société d’information », Vivian Reding, a proposé la création d’une nouvelle autorité paneuropéenne de supervision du secteur des télécommunications. Ce nouveau régulateur européen aura pour mission de faire « travailler ensemble les vingt-sept régulateurs nationaux ensemble, et permettra de prendre partout des décisions similaires en réponse à des problèmes similaires ».
Sur ce point, Paul Champsur, Président de l’ARCEP est en désaccord. Selon lui, par ce projet l’Union européenne se « substitue » aux Etats. Or, pour lui les marchés des télécoms ont une forte imprégnation nationale qui fait qu’une telle immixtion est inappropriée. Il serait plus légitime, d’après lui, de créer une entité qui traite exclusivement des aspects techniques des télécoms au niveau européen. Une harmonisation du marché des télécoms, étant donné les spécificités nationales, serait difficile et inadéquate.
M. Champsur s’oppose également, au projet de la Commissaire, prévoyant la possibilité pour un régulateur nationale de proposer la « séparation fonctionnelle » de la gestion du réseau au sein d’un opérateur historique. En effet, on souhaite séparer d’un côté, les réseaux et de l’autre, la commercialisation des services des opérateurs historiques en cas de « problème de concurrence patent ». En France, on pense bien évidemment à France Telecom qui maîtrise non seulement les infrastructures des réseaux télécoms ; mais propose aussi des services marchands. Pour M. Champsur, cette proposition pose problème et en particulier au niveau des investissements faits par l’opérateur historique dans le développement de ses infrastructures. Une telle séparation aurait des répercussions sur le développement de ses dernières.

Se pose également la question du « dividende numérique ». Le passage de la télévision analogique à la télévision numérique a permis de libérer des fréquences. Sur ce point, les opérateurs télécoms et audiovisuels se livreront un combat sans merci pour obtenir ces ressources. Les deux opérateurs souhaitent développer leurs activités et commencent déjà à se positionner de part et d’autre. En effet, on constate par exemple que, depuis quelques années, les opérateurs audiovisuels créent des services de téléphonies mobiles et ce pour être sur tous les terrains. Le Directeur de l’ARCEP insiste sur le fait que l’Union doit procéder, avant l’attribution de ces fréquences libérées, à une harmonisation en la matière afin d’éviter des interférences entre les opérateurs des Etats membres.
Ce nouveau « paquet télécoms » propose aussi la responsabilisation des opérateurs de télécommunications concernant les règles de protection de propriété intellectuelle. Les fournisseurs d’accès à internet auront la possibilité d’avertir leurs clients des conséquences du téléchargement illégal mais aussi d’appliquer en cas d’infraction un régime de « riposte gradué ». Ce régime peut aller jusqu’à la résiliation du contrat de l’abonné en cas de téléchargements manifestement excessifs.
Enfin, le paquet traite d’un renforcement des moyens de lutte contre les cyberattaques mais également de la réduction du nombre de marchés réglementés. Cette réduction inciterait donc à une concentration des opérateurs télécoms pour une meilleure lisibilité du marché. On peut dire, que ce dernier point remet relativement en cause le principe de concurrence, puisqu’il réduirait de nouveau le marché.

Même si Viviane Reding possède le soutien du Président de la Commission ainsi que des commissaires ayant approuvés le paquet, l’application de ce dernier s’annonce difficile. Certains états sont réticents, voire même opposés, à certaines règles qui conduiraient à une immixtion de plus en plus grande de Bruxelles dans le marché des télécoms. Cette question reste encore délicate.
Sources :

Les Echos, 13 et 14 novembre 2007.
www.arcep.fr
Maïssara MRADABI