Réforme audiovisuelle: la remise en cause du système de production

« Les acteurs français de la production audiovisuelle ne sont pas assez
puissants sur la scène internationale » affirmait récemment le Président de la
République, Nicolas Sarkozy. C’est dans l’optique de réformer le système qu’il
a demandé au Ministre de la culture et de la communication, Christine
Albanel, de constituer une mission de concertation. Les personnes mandatées
pour cette mission (David Kessler, patron de France Culture et Dominique
Richard, ancien député UMP) ont pour tâche de trouver, avec les
professionnels du secteur, des solutions aux entraves faites au développement
des groupes audiovisuels, à savoir, diffuseurs et producteurs.

La mission doit plancher sur trois pistes. D’une part, adapter la
réglementation en modifiant les décrets de 2001 et 2002 qui organisent les
relations entre producteurs d’oeuvres audiovisuelles et diffuseurs. Le but
étant que les modifications prennent mieux en considération l’apport
économique des diffuseurs à la production des œuvres audiovisuelles qu’ils
financent. D’autre part, assurer la promotion de la diversité culturelle et
poursuivre le renforcement de la création face aux défis du numérique. Enfin,
favoriser la circulation des oeuvres, tant en France qu’à l’étranger.

En ligne de mire de la réforme, les décrets Tasca de 2001 et 2002 précisent
les obligations d’investissements des chaînes du Service Public. Selon ces
décrets, elles doivent consacrer une part importante de leur chiffre d’affaire
et de leur temps d’antenne à des programmes émanant de productions
indépendantes. A titre d’exemple, France 2 doit réserver 18% de son chiffre
d’affaire et au moins 50% de sa diffusion aux productions privées. Ce système
a pour conséquence de réduire à une portion minime la capacité des
diffuseurs à produire en interne. De plus, assumant les risques de
développement et de diffusion des programmes venant du privé, ils ne
peuvent en exercer une part de l’ exploitation. L’autre conséquence de cette
réglementation tient dans la part mineure accordée, sur les grilles de
programmes, aux oeuvres patrimoniales au bénéfice des émissions de flux.

Selon la ministre, ces décrets « ne favorisent plus vraiment aujourd’hui la
circulation des oeuvres sur les services de télévision »; au contraire, ils gèlent
la demande des diffuseurs envers les producteurs.
Avec ce projet de réforme, le Gouvernement tente de satisfaire enfin les
réclamations faites depuis des années par le SNRT-CGT (Syndicat national de
la radiodiffusion et de la télévision). Le syndicat demande en effet l’abrogation
des décrets Tasca parce que non seulement ils limitent les possibilités de
produire en interne mais ils interdisent également aux chaînes d’accéder au
fonds de soutien du CNC (Centre national de la cinématographie) et les
privent de la détention des droits sur les oeuvres. D’après le syndicat, « la réalité
prouve que la séparation des métiers de producteur et de diffuseur n’est pas
la solution efficace pour l’audiovisuel français ». Et à Marc Chauvelot du
SNRT-CGT de France 3 de rappeler qu’à l’origine « le but de ces décrets
é taient d’empêcher que le PAF ne soit envahi par les dessins animés japonais
et les séries américaines. On en voit le résultat aujourd’hui. »

Afin de palier les inconvénients de la réglementation Tasca, la mission
envisage de réduire l’obligation des deux tiers des commandes aux
producteurs indépendants pour accorder aux chaînes un plus large espace de
production propre, et de favoriser les coproductions entre chaînes et
producteurs. En échange, les producteurs bénéficieraient d’un
raccourcissement des périodes de droits expirant au lendemain de la diffusion.

S’inscrivant dans une refonte plus profonde des règles audiovisuelles
(concernant la règle des 49%, le sous financement publicitaire et le
regroupement des chaînes TV5, France 24 et RFI), la réforme verra le jour
courant 2008 par voie réglementaire ou législative.
Affaire à suivre…

Sources :
www.lefigaro.fr
www.lemonde.fr
www.lhumanite.fr
www.premier-ministre.gouv.fr

Marion PAZZONI