La loi sur la Confiance en l’économie numérique (loi LCEN) semblait avoir mis un terme à la délicate question de la responsabilité des hébergeurs et des fournisseurs d’accès en matière de piratage. En effet, cette loi de 2004 avait exclu toute forme de responsabilité pour les hébergeurs quant aux contenus traités sur leurs serveurs ; de même, la loi rejetait une éventuelle responsabilité des FAI pour les données transportées par leurs réseaux.
Mais tous ces principes de droit positif semblent aujourd’hui être remis en cause par le ministère de la Culture.
La première des raisons évoquée n’est autre que l’insécurité juridique résultant de cette loi : les applications qui en sont faites par les tribunaux sont parfois contradictoires.
A cela, il convient d’ajouter une pression constante des protagonistes de l’industrie culturelle ; ceux-ci souhaitent une législation plus stricte en matière de piratage d’œuvres sur internet. Pour eux, la solution résiderait dans une responsabilité des FAI pour les contenus qui circulent sur leurs réseaux. Mais les intéressés y sont clairement opposés. Au contraire de la ministre de la Culture pour qui une telle mesure permettrait de sortir d’une situation juridique délicate.
En effet, Christine ALBANEL, ministre de la Culture, estime que « l’heure est venue d’étudier une éventuelle évolution des statuts des prestataires de l’Internet ». Pour se faire, elle a discrètement demandé au Conseil supérieur de la propriété littéraire et artistique (CSPLA) de se pencher sur la question. Et ce Conseil a lui même chargé une de ses huit personnalités qualifiées, M. SIRINELLI, de la rédaction d’un rapport pour le printemps 2008.
Face à cela, les FAI semblent incrédules : « C’est comme si on demandait à une compagnie d’autoroute de fouiller le coffre de toutes les voitures » réagit un FAI cité par le quotidien Les Echos. De plus, cette inquiétude est confortée par le fait qu’ils sont sous représentés au sein du CSPLA : ce dernier est avant tout composé de Majors et d’éditeurs…
Au contraire, pour les Majors et les acteurs de l’industrie culturelle, ce rapport permettrait de mettre en exergue les solutions déjà présentées dans leur « livre blanc » préconisant une surveillance des réseaux ainsi qu’une répression accrue. Pour eux, cela aboutirait à terme à une éradication du téléchargement illégal. Mais dans cette dernière hypothèse, est soulevée la délicate question du respect de la vie privée…
Ce rapport a donc pour objet de répondre à toutes ces questions en vue de redéfinir ultérieurement la législation en vigueur. Il faut cependant noter que la législation française, basée sur la loi LCEN, est elle même directement inspirée d’une directive européenne de 2000 : la France pourra elle aller à l’encontre d’une directive européenne ? la réponse est forcément négative, sauf si cette législation européenne était elle même amenée à être modifiée. Et d’après Les Echos, cela pourrait être le cas, la Commission européenne travaillant actuellement sur la problématique du piratage en cherchant à l’intégrer au « Paquet télécoms ».
Quoi qu’il en soit, ce rapport est attendu avec impatience par tous les acteurs du secteur ; mais cependant, un seul d’entre eux reste sceptique et résigné, car n’étant toujours pas pris en considération dans ce débat houleux : le consommateur…
Arnaud QUILTON
Sources :
www.journaldunet.com
www.lesechos.fr
www.silicon.fr
www.universfreebox.com