NOUVELLE SUSPICION DE POSITION DOMINANTE À L’ENCONTRE D’ORANGE.

L’affaire n’est pas nouvelle. France Télécom et sa filiale, Orange, a toujours été suspecté, et parfois condamné, pour abus de position dominante par le passé. En temps qu’opérateur historique, la situation semblait malheureusement irrémédiable. Or, depuis l’ouverture à la concurrence dans le secteur des télécoms, ce type de situation était normalement vouée à disparaître avec le temps, le régulateur français en la matière veillant au grain (l’Autorité de régulation des communications électroniques et des postes – ARCEP).
C’est ainsi que depuis peu, France Télécom essaie de se racheter une conduite en évitant tant bien que mal aussi bien les sanctions du droit de la concurrence que celles de l’ARCEP.

Pour autant, ce calme apparent dans le secteur des télécommunications français a été remis en cause le 12 mars 2008 par les principaux concurrents d’Orange sur le marché de l’ADSL. En effet, à cette date, Free, Neuf Cegetel et Alice notamment ont présenté un rapport à l’ARCEP dénonçant les prix pratiqués par Orange pour la mise en place du dégroupage.
L’affaire n’est pas récente mais elle semblait avoir disparue du paysage des télécommunications français depuis une décision de l’Arcep de 2005 qui fixait précisément les tarifs du dégroupage.
Avec ce nouveau rapport, l’affaire revient au cœur du débat, ce qui risque d’accentuer encore les tensions entre l’opérateur historique et les opérateurs alternatifs. Ceux-ci estiment que Orange engrange des profits records grâce aux tarifs réclamés pour la location du réseau.
Ce tarif, fixé par le régulateur français, est de 9,29 euros hors taxes par mois et par ligne dégroupée. A ce montant s’ajoute quelques euros de plus pour des frais supplémentaires.
Et indéniablement, la location du réseau à Orange est essentielle pour les opérateurs alternatifs ; sans elle, ils ne pourraient atteindre le consommateur final (en économie, ce phénomène est appelé « théorie des facilités essentielles »). Il est donc normal que le prix de cette location soit juste, légitime et proportionné afin que la concurrence s’exerce pleinement.
Or, selon les opérateurs alternatifs, ce prix de location du réseau est excessif ; pire encore, il aurait permis à Orange de faire des bénéfices records (665 millions d’euros) lui permettant d’acquérir notamment de nouveaux clients, de nouveaux droits (les droits du foot principalement) et d’investir massivement dans le réseau de fibre optique. Face à ces données, les concurrents ne seraient donc pas dans une position égalitaire et pleinement concurrentielle vis-à-vis d’Orange.

Notons enfin que le 12 mars, a aussi été contesté la part de marché ADSL d’Orange sur l’ensemble du marché de l’ADSL. Celle-ci était officiellement de 49,4% en décembre 2007, et donc en dessous de la barre fatidique et symbolique des 50%. Mais selon les concurrents, grâce aux profits records engendrés par la location du réseaux, Orange aurait gagné de nouveaux clients, et serait donc bien au delà des 50% de part de marché.
C’est désormais à l’ARCEP de vérifier toutes ces données et de donner une réponse adaptée à la situation, sachant que si les chiffres concernant les parts de marché d’Orange venaient à être confirmés, il y aurait bel et bien position dominante de l’opérateur historique sur le marché de l’ADSL français. Position dominante qui pourrait remettre en cause le rôle de l’ARCEP, celle-ci étant censée éviter ce type de dérive sur un marché dit « concurrentiel ».

Arnaud QUILTON.