Début mars, l’acteur Olivier Martinez avait assigné en justice une vingtaine de sites web, parmi lesquels figurait le site fuzz.fr, pour avoir créé un lien vers un article traitant de sa vie privée. Le Tribunal de grande instance de Paris a condamné jeudi 27 mars le site Internet fuzz.fr, pour avoir porté atteinte à la vie privée de l’acteur.
Fuzz.fr est ce qu’on appelle, dans le vocabulaire d’Internet, un « digg-like ». Le principe de ces sites consiste à laisser les internautes classer les informations qu’ils jugent pertinentes par un système de vote. Il s’agit donc là d’un site collaboratif, dont l’information est alimentée par les internautes. En l’espèce, un internaute avait soumis une news du site celebrites-stars.blogspot.com, et celle-ci avait reçu suffisamment de votes pour figurer en page d’accueil de fuzz.fr.
Depuis la Loi pour la Confiance dans l’Economie Numérique (LCEN) du 21 juin 2004, de tels sites sont considérés non comme des éditeurs de contenus, mais comme des hébergeurs. Dès lors, un hébergeur publiant un lien ou un contenu diffamatoire doit le retirer s’il en reçoit la demande d’une personne concernée par ledit contenu. Cependant, Eric Dupin, qui est à la tête du site Internet, entendait se prévaloir du statut de prestataire technique. Si tel avait été le cas, Eric Dupin aurait eu à retirer le lien incriminé après son signalement. Or, en l’espèce, le propriétaire et gestionnaire du site affirme n’avoir reçu aucune mise en demeure. L’avocat de l’acteur affirmait quant à lui qu’une telle mise en demeure n’était pas nécessaire, dans la mesure où il assignait ce dernier au visa de l’article 9 du code civil, pour atteinte à la vie privée.
Et c’est à l’acteur que le juge des référés a donné raison, considérant Eric Dupin non comme un simple hébergeur, mais comme un éditeur de contenus. Au soutien de sa condamnation, le juge des référés a considéré qu’en ayant fait un lien vers le site célébrités stars, « Fuzz.fr avait opéré un choix éditorial ». Il considère par ailleurs que « l’acte de publication doit être compris non pas comme un simple acte matériel, mais comme la volonté de mettre le public en contact avec des messages de son choix. [fuzz.fr] doit donc être considéré comme un éditeur de service de communication au public en ligne », responsable du contenu qu’il publie.
Cette condamnation fait suite à une autre affaire dans laquelle le réalisateur Olivier Dahan avait attaqué un site qui compilait les flux d’information de différents sites people. Le juge avait alors considéré que « la décision d’agencer les différentes sources (…) sur un thème précis constitue bien un choix éditorial ».
La condamnation du site Fuzz.fr en qualité d’éditeur de contenus n’est pas sans soulever quelques inquiétudes, principalement de la part des blogueurs et des acteurs du web 2.0. Pour Me Olivier Iteanu, avocat spécialisé dans les technologies de l’information, « c’est un épisode de plus dans la détermination précise entre prestataire technique et éditeur. Avec le web 2.0, tout le monde publie, tout le monde édite, ce qui rend les frontières de plus en plus ténues ». Ainsi, il apparaît donc, que le « rubriquage » est en passe de devenir le principal critère de différenciation entre prestataire technique et éditeur dans le cas des sites communautaires.
Sources :
www.lefigaro.fr
www.latribune.fr
www.lemonde.fr
Véronique de LA CELLE