LE PROJET DE LOI CRÉATION ET INTERNET REJETÉ PAR LE PARLEMENT

Ce qui aurait en théorie du être une formalité s’est en fait transformé en une surprise générale. C’est le jeudi 9 avril que l’assemblée nationale a eu à voter le projet de loi “création et internet”. Le texte a été “durci” après son passage en commission mixte paritaire sous la pression du Sénat. Ce rebondissement peut s’expliquer par plusieurs raisons. Tout d’abord, la commission mixte paritaire a remis au goût du jour le fait que les internautes sanctionnés soient obligés de payer leur abonnement Internet, même en cas de suspension. Cette mesure discutable appelée “double peine” par les détracteurs du projet de loi est très controversée depuis le début.

Ensuite, l’absentéisme (certes habituel) mais très élevé ce jour là ; sans doute que les députés de la majorité n’ont pas mesuré les conséquences de leur absence. En effet, les députés socialistes se retrouvant majoritaires à 13h10 lors du vote à main levée, c’est à 21 voix contre 15 qu’ils ont pu rejeter le projet déjà voté par le sénat plus tôt. L’opposition a, de plus, bénéficié du soutien de deux députés de la majorité, Jean Dionis du Séjour et Nicolas Dupont-Aignan ; ce dernier commente ce vote sur son blog en indiquant que “tout l’enjeu est de savoir si le gouvernement va s’entêter en faisant revoter sous la contrainte la majorité ou s’il comprendra enfin que ce texte est inepte, impopulaire, obsolète et même inefficace pour défendre la création”. Ce texte sur le téléchargement illégal instituant l’HADOPI (Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur Internet) et la “riposte graduée” fait débat depuis son apparition. Pour certains, l’absence des députés de la majorité lors du vote était une façon pour eux de montrer leur désapprobation. Pour d’autres, il s’agit du désintérêt habituel des députés pour les séances.

Quoi qu’il en soit, le résultat est là. En vertu de l’article 45 de la Constitution, le texte sera de nouveau voté le 28 avril par l’Assemblée et par le Sénat mais dans sa dernière version c’est-à-dire celle avant son passage en commission mixte paritaire. Le secrétaire d’état aux relations avec le parlement Roger Karoutchi a déclaré que “ce vote retarde l’adoption du texte, ça ne le bloque pas” et dénonce “des actes de flibuste” de la gauche. M. Copé, absent lors du vote a quant à lui déclaré “un coup de pied au derrière, ça fait toujours avancer. Je l’ai parfaitement reçu comme un nouvel avertissement (…). Si on est pas plus vigilants sur la présence, on aura de nouveaux soucis.” Nicolas Sarkozy n’a quant à lui aucune envie de renoncer au texte. Dans un communiqué de l’Elysée, il est indiqué que “Le président de la République réaffirme son attachement aux droits des créateurs et sa volonté de voir appliquée au plus vite la loi Création et Internet”. Il semblerait donc que la majorité reste confiante quant au futur. Mais ce texte est à l’origine de tellement de surprises et de polémiques que l’issue ne sera peut-être pas aussi évidente que certains le pensent. Réponse fin avril.
Sarah LABIDURIE