EN FINLANDE, « L’ACCES INTERNET EST UN DROIT FONDAMENTAL »

Le service universel de l’internet à haut débit est entré en vigueur ce premier juillet dans le droit Finlandais. Il crée un droit fondamental d’accès à internet pour les finlandais, en prévoyant une obligation des opérateurs télécoms de fournir à chacun, 1 Mbit/s « à un tarif raisonnable et avec une haute qualité », tel qu’il a été annoncé par le ministère des Communications finnois. Ce droit fondamental se place au même niveau que les services téléphoniques et postaux dans les services de communication de base. Après la modification de la loi finlandaise en 2009 pour inclure la connexion internet dans le droit positif, c’est la Ficora (Arcep locale) qui a fixé le seuil de 1 Mbit/s en désignant 26 opérateurs obligataires de ce service universel.

C’est la première fois que l’accès au web fait l’objet d’un droit fondamental. Selon le classement établi par The Economist et IBM, la Finlande est déjà l’un des pays « les plus numériques » en 2010. Il s’agit par cette initiative symbolique, de couvrir les zones blanches, alors que la connexion internet à haut débit est déjà permise sur 96 % du territoire. Un engagement prévoit également d’approfondir ce service en augmentant le débit à 100Mbits/s grâce à la fibre optique avant 2015. Cette politique se place à l’opposé de logique HADOPI, ce qui explique le rang occupé par la France (20ème) dans le classement des pays « les plus numériques ».

C’est un bon en avant qui dépasse largement le vote de l’amendement 46 (ex-138) du 24 novembre 2009 dans le cadre du paquet télécom voté au parlement européen. Bruxelles avait alors réussi à parvenir à un compromis sur l’exigence du respect de l’article 6 de la convention pour la protection des droits de l’homme et des libertés fondamentales, contre « toute restriction imposée dans l’exercice de ces droits fondamentaux ». Cet amendement avait été adopté en troisième lecture après un véritable combat de force largement mené par le gouvernement français qui tentait au même moment de faire passer son dispositif HADOPI, avec en bout de chaîne, la mesure ultime de coupure d’accès internet. Dès lors il s’agissait pour la France de pouvoir ordonner cette mesure par « une autorité légitime compétente » et donc par la HADOPI mandatée pour cette tâche. L’amendement définitif a instauré l’obligation de recours à « une procédure préalable équitable et impartiale », au lieu de l’exigence « d’une décision judiciaire préalable ». Un droit fondamental consacré, certes, mais dont le respect peut être contourné par l’intervention d’un juge, permettant ainsi au gouvernement français, de parfaire son dispositif nuancé à plusieurs reprises par le conseil constitutionnel sur ce point.

Désormais la France et l’Angleterre semblent avancer encore plus seules sur la voie de la riposte graduée et de la restriction de la liberté de communication. En France, ce dispositif qui a eu le plus grand mal à voir le jour, ne sanctionne pas l’acte de téléchargement illégal en tant que tel, mais la négligence due à l’absence de sécurisation d’une connexion internet.
L’Allemagne se dit fermement opposé à l’idée de sanctionner tout usage illicite du réseau, par une coupure de l’accès internet. Elle souligne que la voie suivie par la France est « la mauvaise ».

Au regard de cette consécration finlandaise, internet ne devrait pas être considéré comme un accès aux loisirs et aux divertissements, mais plutôt comme « une véritable composante de la liberté d’expression », comme l’avait souligné le Conseil constitutionnel. L’avenir nous dira si la politique française ne s’est pas trompée, en s’éloignant avec entêtement de l’impératif de neutralité technologique.
Sources :

Le Nouvel Observateur : « En Finlande, la connexion haut débit à 1 Mbit/s est devenue un droit »
01net: « Le haut-débit devient un droit fondamental en Finlande »
Ecrans : « L’Allemagne n’aura pas son Hadopi »
Jurispédia : « Vicissitudes de l’adoption de l’amendement 138 du nouveau Paquet Télécom (eu) ».

Nicolas MARTIN