Au moment où Le Monde peine à trouver des actionnaires pour assurer sa recapitalisation, les sites d’information en ligne, font leurs arrivées dans les kiosques. Loin des maisons de presse qui peinent à s’émanciper dans le numérique,  Rue 89 confirme la réussite de sa conception moderne de l’information en ligne, en lançant sa déclinaison papier le 15 juin dernier. Le mensuel dans son format atypique recouvre  100 pages, dont 9 de publicité pour  3,90 euros et 34 euros en abonnement annuel. Le site fondé par « les anciens de Libération » n’est désormais plus un pure player, mais conserve son modèle participatif de production de l’information.
Il s’agit du deuxième site d’information né sur le net qui se tourne vers les kiosques.  A la différence de bakchich.info qui avait eu recours à la même démarche par nécessité, ici la raison n’est pas économique. L’info à trois voix utilise les applications pour smartphone et Ipad, et maintenant son magasine, pour proposer des lectures qui se complètent afin d’être plus présent auprès des lecteurs. Il s’agit d’offrir des expériences nouvelles pour fidéliser ses 1,5 millions de visiteurs uniques. La parution mensuelle et payante, permet ainsi une durabilité de l’information qui s’écarte de la consommation en ligne, consistant à piocher gratuitement dans un flux quotidien d’information. Sur le site, les rotations des contenus ont lieu toutes les 36 heures explique Pierre Haski, et les 1,5 millions de visiteurs uniques passent systématiquement à côté de 80% du site.  Pascal Riché souhaite donc voir le magasine s’appuyer sur la marque crée par le site, pour que la présence en kiosque améliore la visibilité du site. Ainsi, 70 % du contenu du magasine est donc issu du site, et le tiers restant est composé de contenus inédits, conçus pour le support papier. La rédaction n’est donc pas le « copié-collé » du site mais une adaptation au support utilisé. Il s’agit d’éviter de reproduire inexorablement les échecs liés aux reproductions mal adaptées, de la presse écrite sur internet.
Bien que ces journalistes, issus de la presse quotidienne, aient développé un modèle de presse participative et gratuite,  le support écrit  avait été envisagé dès le départ. Ce magasine n’est donc pas la réponse à des difficultés financières. En effet, Rue 89 devrait parvenir à l’équilibre économique fin 2010, uniquement grâce aux ressources générées  par la publicité et par les services annexes, comme la conception de sites internet. Ces prévisions économiques ne tiennent donc pas compte d’un éventuel succès du mensuel, qui est vu potentiellement comme un coup d’accélérateur pour le groupe. Le site souhaite donc profiter de sa notoriété et de sa différence pour élargir son lectorat et, profiter d’une nouvelle corde à son arc sans y être lié économiquement. Pierre Haski, directeur de la rédaction, déclare alors que « Rue 89.com restera le navire amiral, et la création journalistique se fera sur le site, et non l’inverse.» . Le modèle économique, basé sur une publication gratuite, ne sera donc pas remis en question.
Ainsi les anciens de Libération qui ont su appréhender les usages de la presse en ligne, ont désormais les moyens d’imposer leur approche au sein de la presse écrite et payante. A l’instar de cette réussite, leur ancienne maison de presse recherche de nouveaux investisseurs pour développer des projets innovants sur le web et parvenir à nouveau, à un équilibre économique.

Sources :
ElectronLibre : « Rue89 continue sa révolution dans les kiosques »
O1net.com : « Rue89.com tente le pari du magasine papier »
Rue89 : « Le mensuel désormais dans vos kiosques ».
Le Monde : « Figaro veut lever des fonds pour se renforcer sur internet ».

Nicolas MARTIN