Le décret n° 2010-695 du 25 juin 2010 instituant une contravention de négligence caractérisée protégeant la propriété littéraire et artistique sur internet est paru au Journal Officiel du 26 juin 2010.
Afin de compléter la partie réglementaire du Code de la Propriété Intellectuelle relatives aux sanctions de la violation des droits d’auteurs et droits voisins, le nouvel article R. 335-5 CPI institue une nouvelle disposition pénale dans la perspective d’assortir d’une sanction le nouveau dispositif « de riposte graduée » dans la lutte contre le téléchargement illégal issu des « lois HADOPI ».
Aux termes de cet article, constitue une négligence caractérisée, punie de l’amende prévue pour les contraventions de la cinquième classe, le fait, sans motif légitime, pour la personne titulaire d’un accès à des services de communication au public en ligne de ne pas avoir mis en place un moyen de sécurisation de cet accès ou d’avoir manqué de diligence dans la mise en œuvre de ce moyen.
Le second alinéa de l’article R.335-5 CPI précise que la sanction prévue ne pourra être mis en œuvre que sous deux conditions cumulatives. D’une part, le titulaire de l’accès doit avoir fait l’objet d’une recommandation par la commission des droits de l’HADOPI (prévue par l’article…). D’autre part, l’accès du titulaire doit avoir été utilisé, à nouveau, à des fins de reproduction, de représentation ou de mise à disposition ou de communication au public d’œuvres ou d’objets protégés par un droit d’auteur ou par un droit voisin sans l’autorisation des titulaires desdits droits, dans l’année suivant la recommandation.
Outre la rédaction pour le moins alambiquée de cette nouvelle contravention, la viabilité de sa mise en œuvre suscite de nombreuses interrogations. Tout d’abord, le dossier du titulaire de l’accès doit avoir été transmis par la Commission de Protection des Droits au parquet -il ne s’agit pas d’une obligation-. Par ailleurs, il appartiendra au parquet d’établir le défaut de sécurisation de l’accès par son titulaire, ce dernier pouvant se décharger de toute responsabilité s’il démontre d’un motif légitime de ne pas avoir procédé à cette sécurisation. Enfin, il convient ensuite de signaler qu’à ce jour le décret d’application de la procédure de sanction de la Commission de Protection des Droits n’est pas encore paru.
Les chiffres évaluant le nombre de téléchargement illégaux sur internet sont sujets à caution mais ils s’élèveraient, en France, à plusieurs centaines de milliers par jour. L’objectif essentiellement pédagogique du nouveau dispositif perd évidemment de son impact avec un dispositif de sanction qui nécessite d’importants moyens pour sa mise en œuvre. Par ailleurs, le streaming serait devenu en 2010 le premier moyen de consommation illégal d’œuvres sur internet, devant le peer to peer, or, pour l’instant, seul ce dernier est concerné par le dispositif HADOPI.
S’il est envisageable que les recommandations de la Commission de Protection des Droits aient des vertus comminatoires, elles ne seront probablement pas à même de faire face à l’importance du téléchargement illégal sur internet.
Sources :
http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-cedu/09-10/c0910053.asp#P2_66
http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do;jsessionid=9816D269D4E0AA64CBDAAA4EAFC3A131.tpdjo13v_1?cidTexte=JORFTEXT000022392027&dateTexte=&oldAction=rechJO&categorieLien=id
http://www.maitre-eolas.fr/post/2010/06/29/HADOPI-%3A-l-op%C3%A9ration-Usine-%C3%A0-gaz-continue
Géraldine SORLAT