Un accord a été signé le 30 septembre 2010 entre la société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (SACEM) et la plateforme mondiale d’hébergement YouTube.
Si le contenu du contrat reste confidentiel, les grandes lignes ont tout de même été rendues publiques : YouTube devra désormais, et de façon rétroactive, rémunérer les auteurs, compositeurs, humoristes et éditeurs de musiques inscrits à la SACEM pour les œuvres qu’il héberge.
Cet accord est l’aboutissement de plusieurs années de négociations entre les deux protagonistes.
Depuis la création de sa branche française, YouTube hébergeait des vidéos musicales appartenant au répertoire de la SACEM sans lui reverser de droits d’auteurs. YouTube a ainsi été menacé de poursuites judiciaires pour utilisation illicite de contenus, en vertu du principe de responsabilité de l’hébergeur.
Mais c’est finalement par un accord à l’amiable que la SACEM et YouTube ont décidé d’établir les fondements d’un contrat permettant aux auteurs d’être justement rémunérés quant à la reproduction de leurs œuvres.
Les termes du contrat s’étendent précisément à la diffusion en ligne du répertoire musical mondial, y compris anglosaxon, géré par la SACEM sur les territoires français, luxembourgeois et monégasque. Sans oublier un détail de taille : cet accord s’appliquera de façon rétroactive pour les contenus diffusés sur YouTube depuis le 1er janvier 2006. L’entreprise paraît considérable…
Quant à la rémunération à proprement parler des auteurs, elle se calquera en parti sur l’accord passé en 2008 entre la SACEM et DailyMotion. Le calcul des droits devrait s’effectuer à la fois sur la base des recettes publicitaires dégagées par YouTube, mais aussi sur sa part de marché.
Une correcte application de l’article L131-4 du Code de propriété intellectuelle est ici faite par le choix du système de rémunération proportionnelle des auteurs, en fonction de l’exploitation réelle de l’œuvre. Pour ce faire, YouTube s’est engagé à fournir les données statistiques de visualisation de chaque œuvre.
C’est la première fois que la plateforme mondiale signe un accord avec une société d’auteurs française. Ce nouveau tournant marque une volonté de la part du géant mondial de la vidéo sur Internet de soutenir et de valoriser la création d’œuvres en ligne. Toutefois cet accord ne couvre que le champ musical. Sont attendus des accords entre YouTube et la Société des auteurs et compositeurs dramatiques (Sacd) et la Société civile des auteurs multimédia (Scam).
La SACEM quant à elle, poursuit, par cet accord, un objectif de favorisation des auteurs ; c’est pourquoi elle n’a jamais requis la suppression des vidéos du site mais a choisi la solution de la rémunération, bien plus bénéfique pour ses adhérents.
Couplé avec les premiers mails envoyés par l’HADOPI début octobre, cet accord reflète la tendance actuelle qui est à la reconnaissance indéniable des auteurs sur Internet, notamment sur les sites de partage d’œuvres.
Le directeur Europe du sud, de l’Est et du Moyen Orient de YouTube, Christophe Muller, se dit satisfait de cet accord eu égard aux effets positifs qu’il aura sur l’émergence de nouveaux talents.
Cependant, au delà de ce constat positif et prometteur, il est important de rester mesurés : une telle entreprise paraît difficilement réalisable. YouTube aura la double mission de vérifier si le contenu mis en ligne par l’internaute est du ressort de la SACEM (tâche pharaonique puisqu’à chaque minute sont mises en lignes l’équivalent de 24 heures de vidéos) puis de verser les droits effectifs à la SACEM. Ici une seconde interrogation s’impose : comment YouTube, plateforme gratuite d’échanges de vidéo pourra-t-elle s’acquitter de ces sommes ?
L’entreprise paraît plus ambitieuse que réalisable.
Quant aux motivations de YouTube, est-il réellement question de s’engager pour l’émergence de nouveaux talents et d’entrer dans une logique de soutien aux auteurs ? ou plutôt d’éviter de nombreuses poursuites judiciaires sur le fondement du droit d’auteur en se réfugiant derrière cet accord utopique ?
Il faut maintenant attendre les premiers effets de cet accord pour déterminer si un nouveau pas a vraiment été franchi.
Nathalie FOUQUE
Sources :
http://www.sacem.fr/cms/home/la-sacem/derniers-communques_2/sacem-you-tube