En mai 2008, la société civile des producteurs de phonogrammes en France (SPPF) avait adressé une lettre de mise en demeure à la plate forme vidéo Youtube en lui demandant le retrait de 233 vidéos appartenant à son répertoire et mises en ligne illégalement. En mars 2009, la SPPF s’aperçoit que sur l’ensemble des vidéos litigieuses, 133 sont toujours accessibles sur le site. La SPPF agit alors en contrefaçon contre Youtube auprès du TGI de Paris. Ces vidéos ayant été visionnées plus de 50 millions de fois, la SPPF réclame 10 millions de dommages et intérêts.
La SPPF considérait que malgré une mise en demeure la société Youtube a manqué à l’obligation de rendre impossible l’accès aux vidéos violant ainsi le droit des producteurs de ces vidéo musiques.
Par son jugement rendu le 28 avril 2011, le TGI de Paris a considéré que la société Youtube n’engageait pas sa responsabilité d’hébergeur au sens de l’article 6 de la Loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004 (LCEN) et a ainsi débouté la SPPF de sa demande.
Pour motiver leur décision, les juges ont suivi le raisonnement suivant : La société Youtube dispose d’un système d’identification des œuvres par empreintes plus communément appelé «content identification». Selon les explications de la société, cette technique permet d’extraire de chaque œuvre des empreintes uniques audio et vidéo qui permettent de reconnaître automatiquement les vidéos mises en ligne lorsqu’elles comporteraient des séquences, partielles ou identiques ».
Pour les juges, dans la mesure où la société Youtube avait proposé par courrier à la SPPF d’accepter un contrat d’identification de contenu qui lui permettrait par la suite d’identifier les contenus litigieux et que la société SPPF n’a pas répondu à cette proposition Youtube n’a donc pu mettre en œuvre le système de «content identification » qui lui aurait permis de rendre impossible l’accès aux contenus déjà identifiés. La LCEN ne reconnaît pas aux hébergeurs une obligation générale de surveillance. Ainsi, dans la mesure où les producteurs n’ont pas donné leur accord pour l’utilisation du système d’empreinte proposé gratuitement par Youtube pour identifier et bloquer les œuvres mises en ligne de manière illégales et que le recours à ce dispositif ne peut se faire qu’avec l’accord des ayants-droit, Youtube n’a pas pu en bloquer l’accès.
Par cette décision, les juges imposent aux auteurs et ayants-droit d’une œuvre diffusé en violation de leurs droits d’auteur d’accepter l’offre de l’hébergeur d’adhérer à un contrat de «content identification» pour pouvoir par la suite se prévaloir en cas de réapparition de contenus illicites sur le site internet.
La SPPF entend faire appel de ce jugement.
Cora SANTOLINI