On assiste depuis quelques années à une véritable consécration d’internet comme outils fondamental de communication, et son accès est dès lors devenu la clef de l’exercice de libertés et de droits fondamentaux dans le monde entier.
L’ancien président Hosni Moubarak et deux autres responsables égyptiens ont été condamnés le samedi 28 mai 2011 par le tribunal administratif du Caire à une amende de 540 millions de livres égyptiennes (soit environ 63,5 millions d’euros) pour avoir suspendu tout accès à internet et tout le réseau de téléphonie mobile pendant les manifestations du moins de janvier.
Il s’agit de la première condamnation de l’ancien président Egyptien depuis son renversement le 11 février 2011, et elle est tout à fait symbolique de l’essor et de la consécration de la liberté d’expression du peuple.
Au cours des récentes révolutions arabes, cette liberté d’expression a été véritablement malmenée, les accès à internet ont été suspendus, les contenus, services et applications filtrés et bloqués, de façon arbitraire par les dirigeants du pays, les citoyens ont vu leur liberté d’expression et de communication véritablement muselée, on a parlé d’un “black out” complet au regard des moyens drastiques mis en place.
Internet est devenu la cible des dirigeants de ces pays qui ont vu en lui, un véritable moyen de protestation et de ralliement du peuple, les réseaux sociaux notamment ont joué un rôle fondamental dans les mouvements protestataires des peuples. En effet, l’accès à internet, et son utilisation donne de la voix aux réclamations des citoyens, donne du sens à leur liberté d’expression, et n’était jusque là pas véritablement protégé comme il l’aurait fallu. On voit d’ailleurs que dans des pays tels que la Chine, Internet est un outil entièrement contrôlé et qui fait l’objet de nombreuses censures tellement il constitue une menace pour de tels pouvoirs autoritaires.
On doit toutefois s’interroger sur le fondement juridique qui a motivé la décision du tribunal administratif. Il semblerait que la décision ait été motivée par la caractérisation d’une “atteinte à l’économie nationale”, en effet, la suspension des services d’internet aurait causé aux opérateurs d’accès et de téléphonie mobile d’importantes pertes économiques. Le tribunal administratif ne s’est donc pas basé sur un motif légal de l’ordre de la protection des libertés fondamentales comme le Conseil constitutionnel français a pu le faire, dans un tout autre contexte à propos de la censure des dispositions de la loi Hadopi I le 10 juin 2009.
Le Conseil constitutionnel français avait – on le rappelle – véritablement consacré l’accès à internet comme corollaire de la liberté d’expression proclamée par la DDHC de 1789, en affirmant que ” Considérant qu’aux termes de l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 : ” La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme : tout citoyen peut donc parler, écrire, imprimer librement, sauf à répondre de l’abus de cette liberté dans les cas déterminés par la loi ” ; qu’en l’état actuel des moyens de communication et eu égard au développement généralisé des services de communication au public en ligne ainsi qu’à l’importance prise par ces services pour la participation à la vie démocratique et l’expression des idées et des opinions, ce droit implique la liberté d’accéder à ces services.”
Le politologue Nabil Abdel Fattah a affirmé toutefois que ce jugement constituait « Un tournant pour certaines entités égyptiennes qui vivent toujours dans une culture autoritaire concernant le traitement des services de communication et des libertés qu’ils offrent ». On espère voir dans cette condamnation, l’émergence d’une consécration légale voire constitutionnelle de l’accès à internet comme liberté fondamentale, comme on l’a vu en France, pour l’ensemble des pays du Nord de l’Afrique, en bonne voie vers une liberté de communication sans coutures.
Anaëlle FRANCHIMONT
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