La chaîne de la TNT Direct 8 a diffusé le 19 mai dernier une photographie de Dominique Strauss Kahn prise dans sa cellule de la prison de Rikers Island. Cette photo était également accessible pour les internautes sur le site internet du journal américain New York Daily News.
Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) a mis en garde la chaîne en estimant que « cette séquence méconnaît l’obligation de respect de la dignité de la personne humaine prescrite à l’article 1er de la loi du du 30 septembre 1986, à l’article 2-3-4 de la convention de la chaîne. » Direct 8 devra à l’avenir se conformer à l’obligation de respect de la dignité de la personne humaine sous peine de sanctions.
Une vague de poursuites pourrait être engagée par les avocats de DSK à la suite de cette affaire. En effet, de nombreuses photographies de DSK menotté ont été publiées dans les médias français, alors que la loi Guigou du 15 juin 2000 prévoit que la diffusion de l’image d’une personne menottée sans l’accord de celle-ci est punie de 15000 euros d’amende. Le texte de loi dispose que « lorsqu’elle est réalisée sans l’accord de l’intéressé, la diffusion sans l’accord de l’intéressé, la diffusion, par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, de l’image d’une personne identifiée ou identifiable mise en cause à l’occasion d’une procédure pénale mais n’ayant pas fait l’objet d’un jugement de condamnation et faisant apparaître, soit que cette personne porte des menottes ou entraves, soit qu’elle est placée en détention provisoire, est punie de 15000 euros d’amende. »
Par cette mise en garde le CSA tenait à rappeler que la diffusion de telles images pouvait porter atteinte à la dignité de la personne humaine et à la présomption d’innocence, alors que de nombreux médias français diffusaient les images de DSK menotté circulant en toute liberté sur des sites internet étrangers.
En réponse aux accusations du CSA, les médias français brandissent le droit à l’information. Thierry Thuillier, directeur des rédactions de France Télévision avait expliqué à l’Agence France Presse « deux raisons nous ont poussé à diffuser ces images: d’abord ce qu’elles racontent du système policier et judiciaire américain, différent du système français. Ensuite, ce qu’elles disent de l’état physique et psychologique de DSK. » Il convient de préciser que ces images ne sont pas tournées par les médias français mais par les médias américains et sont facilement accessibles pour le public français par le biais d’internet. Il devient alors compliqué pour les chaînes d’information françaises de les ignorer. L’arbitrage entre droit à l’information et dignité de la personne humaine devient difficile à effectuer.
Il faut rappeler qu’en France la liberté d’expression est garantie mais elle n’est pas absolue et des limitations sont nécessaires afin d’assurer le respect de l’ordre public. La liberté de tout dire pourrait restreindre la liberté d’autrui en lui infligeant des dommages directs ou indirects. La dignité de la personne humaine connait une consécration constitutionnelle en France, après le contrôle par le juge constitutionnel de la conformité des lois dites de « bioéthiques » du 29 juillet 1994 dans une décision du 27 juillet 1994. Ainsi, les principes de la liberté d’expression et du droit à l’information ne doivent pas méconnaître le principe du respect de la dignité de la personne humaine.
Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel appelle donc les médias français à la plus grande retenue dans la diffusion d’images de personnes mises en cause dans une procédure pénale.
Pauline DALMAN
Sources:
http://www.pcinpact.com/actu/news/63601-dsk-photo-menotte-presomption-innocence.htm
http://tele.premiere.fr/News-Tele/Direct-8-rappele-a-l-ordre-par-le-CSA-pour-une-photo-de-Dominique-Strauss-Kahn-2765336
http://www.programme-tv.net/news/tv/16733-dsk-menotte-les-chaines-repondent-au-csa/
http://www.droit-medias-culture.com/CSA-Liberte-d-expression-droit-a-l.html