Le 31 novembre 2011, l’ère de la télévision analogique prendra fin. En attendant, le taux de français équipés de récepteur TNT est en augmentation constante. Les scores d’audiences des chaînes de la TNT gratuite sont en pleines croissances. La toute puissance du groupe TF1 est mise à mal par la mutation du paysage audiovisuel français engendrée par l’arrivée de la TNT.
Le groupe TF1 au départ sceptique quant à la réussite de la TNT n’a pas investi, ni répondu aux appels d’offres relatifs à la création de nouvelles chaînes. Le succès de la TNT a conduit le groupe à perdre de nombreuses parts de marché. Conscient de son erreur, le groupe TF1 met en place une politique de rachat de chaînes afin d’augmenter sa présence sur la TNT pour ensuite récupérer les parts d’audience et les recettes publicitaires perdues.
Le choix de la première chaîne sera de racheter TMC et NT1. Cette manœuvre lui permettrait de disposer de trois chaînes gratuites. L’opération devra se soumettre au respect du droit de la concurrence ainsi qu’aux règles encadrant l’exercice de la liberté de communication. Il faut également ajouter à ces difficultés l’opposition farouche de la société métropole télévision (M6) qui usera de la quasi-totalité de l’arsenal juridique pour empêcher ou tout du moins freiner l’opération de rachat.
La procédure de rachat se déroule ainsi : le 24 juillet 2009, la société TF1 notifie à l’Autorité de la concurrence, en application de l’article L.430-3 du code de commerce, le projet d’acquisition de parts du capital du groupe AB. Ce qui conférerait à TF1, le contrôle des chaines NT1 et TMC. Conformément au règles combinées du code de commerce et de la loi du 30 septembre 1986, le 2 septembre 2009, l’Autorité de la concurrence, en vertu de l’article 41-4 de la loi du 30 septembre 1986 saisit pour avis le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA).
Les deux autorités, donnent leur aval à la société TF1 pour l’acquisition intégrale du capital du groupe AB, sous réserve du respect des engagements pris afin de limiter les effets négatifs de cette acquisition sur la concurrence ou sur la diversité de l’offre audiovisuelle.
Les engagements pris sont nombreux. Il s’agit d’une part, de maintenir la diversité de l’offre de programmes, de garantir l’indépendance de la ligne éditoriale de chacune des trois chaînes et de ne pas compromettre la diversité des opérateurs sur la TNT. D’autre part, l’autonomie des régies publicitaires de chacune des chaînes du groupe doit être maintenue. Le rachat ne doit pas nuire à la concurrence sur les différents marchés des droits. Autrement dit, le groupe s’engage à limiter les rediffusions de programmes sur les différentes chaînes, autrement dit TF1 ne diffusera pas une même série américaine sur les trois chaînes simultanément. Le groupe s’engage à ne pas se porter acquéreur pour plus de deux chaînes de droits sportifs. En effet par cette acquisition le groupe peut se positionner et diffuser largement une compétition sportive à l’instar de ce que réalise le groupe France télévision à l’occasion de Rolland Garros diffusé sur France 2, France 3 et France 4. La diffusion sur l’ensemble des chaînes du groupe offrirait un avantage certain pour la programmation et favoriserait la position du groupe sur ce marché. La force des engagements pris est à nuancer compte tenu de leur durée limitée : cinq ans à compter de la décision d’autorisation.
Le 31 mars 2010, M6 dépose une requête au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat (CE) demandant l’annulation et la suspension de l’autorisation, pour excès de pouvoir, de la décision autorisant l’acquisition. La demande de suspension est rejetée, reste au Conseil d’Etat à se prononcer sur le fond.
Le 30 décembre 2010, le Conseil d’Etat tranche de manière définitive la question relative à la validité de l’acquisition par TF1, des chaînes NT1 (100%) et TMC (80%). Par deux décisions, le CE confirme : d’une part l’autorisation accordée par le Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) et d’autre part la décision de l’Autorité de la concurrence. Il estime que les engagements « sont de nature à prévenir les effets anticoncurrentiels de l’opération » et « de nature à préserver la diversité de l’offre de programmes, à garantir le maintien d’une ligne éditoriale propre à chacune des trois chaînes et à ne pas compromettre une diversité suffisante des opérateurs ».
Quelques mois plus tard, les engagements pris devant l’Autorité de la concurrence et le CSA ont semble-t-il été tenus. Tout du moins en apparence, car les rediffusions sur NT1 et TMC des séries allemandes du type « Alerte cobra » ou encore « Le destin de Lisa », ainsi que de produits estampillés TF1 tels que « Julie Lescaux », « Une femme d’honneur » et bien d’autres constituent-ils un réel bienfait pour le téléspectateur ?
A vous d’en juger.
Matthieu Rastoll
Sources :
http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2010/12/31/le-conseil-d-etat-valide-le-rachat-de-nt1-et-tmc-par-tf1_1459369_3236.html
http://www.conseil-etat.fr/cde/fr/communiques-de-presse/rachat-par-la-societe-tf1-du-groupe-ab.html
http://www.conseil-etat.fr/cde/node.php?articleid=2201
http://www.conseil-etat.fr/cde/node.php?articleid=2199
http://lexpansion.lexpress.fr/economie/le-conseil-d-etat-valide-le-rachat-de-tmc-et-nt1-par-tf1_246144.html