Le Conseil Constitutionnel et l’exception de vérité

En matière de diffamation, il existe différents moyens de défense, parmi lesquels figurent l’exception de vérité. Elle est une excuse grâce à laquelle une personne poursuivie pour diffamation pourra s’exonérer de toute responsabilité et donc échapper à la condamnation si elle prouve la vérité des faits. Elle est prévue par la loi du 29 Juillet 1881 à l’article 35.

La vérité des faits diffamatoires peut toujours être prouvée, mais son utilisation est limitée par le texte de loi lui-même qui l’exclut dans certains cas et notamment lorsque l’accusation se réfère à des faits qui remontent à plus de 10 ans (Article 35 alinéa 5).

Cette limite a pour objet d’éviter que la liberté d’expression ne conduise à rappeler des faits anciens portant atteinte à l’honneur et à la considération des personnes qu’elles visent; ainsi elle poursuivrait un objectif d’intérêt général de recherche de la paix sociale.

C’est sur ce point que le Conseil Constitutionnel a été saisi le 21 Mars 2011 par la Cour de Cassation, dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité relative à la conformité de cet alinéa de l’article 35 de la loi de 1881 aux droits et libertés garantis par la Constitution.

Les juges du Conseil vont considérer que cette interdiction revêt un caractère général et absolu, car elle « vise sans distinction (….) tous les propos écrits résultant de travaux historiques ou scientifiques ainsi que les imputations se référant à des évènements dont le rappel ou le commentaire s’inscrivent dans un débat public d’intérêt général ». Elle constitue pour les juges une atteinte disproportionnée au but poursuivi.

Cette limite apparaît comme une atteinte disproportionnée à la liberté d’expression, ainsi elle méconnaît l’article 11 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen selon lequel La libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux de l’homme; que cette liberté est d’autant plus précieuse que son exercice est une condition de la démocratie et l’une des garanties du respect des autres droits et libertés ; que les atteintes portées à l’exercice de cette liberté doivent être nécessaires, adaptées et proportionnées à l’objectif poursuivi ;

Dans une décision du 20 Mai 2011, le Conseil Constitutionnel déclare cette alinéa contraire à la Constitution. Cette déclaration s’applique, dès la publication de la décision des juges du Conseil, à toutes les accusations de Diffamation non jugées définitivement.

Lucie Lefevre

http://porlonsadry.wordpress.com/2011/05/23/la-censure-des-limites-temporelles-de-l%E2%80%99exception-de-verite-par-le-conseil-constitutionnel/

http://www.20minutes.fr/article/727644/diffamation-sages-censurent-disposition-loi-presse

http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2011/2011-131-qpc/decision-n-2011-131-qpc-du-20-mai-2011.97111.html

http://www.lemonde.fr/actualite-medias/article/2011/05/20/une-disposition-de-la-loi-sur-la-liberte-de-la-presse-censuree_1524865_3236.html