Le groupe Canal+, a annoncé, le 13 octobre 2011, lors d’une conférence le lancement de sa nouvelle offre, Canalplay Infinity. C’est un service de VOD par abonnement, appelé SVOD, disponible à partir du 8 novembre prochain pour 9,99€/mois et sans engagement. Cette offre est novatrice en France et pourrait contribuer à lutter contre le téléchargement illégal mais la législation française représente un frein à son développement.
Une nouvelle forme d’exploitation de l’œuvre audiovisuelle arrive en France, le SVOD (Subscription Video On Demand). Canal+ lance Canalplay Infinity, suite logique de leur plateforme de VOD, Canalplay, qui rencontre un succès par rapport à ses concurrents avec 700.000 utilisateurs par an. Lors d’une conférence de presse le PDG du groupe Canal+, Bertrand Méheut, a présenté officiellement cette nouvelle offre. SFR et Canal+ appartenant au même groupe (Vivendi), vont développer cette offre ensemble. Ainsi, à partir du 8 novembre prochain les abonnés à la neufbox de SFR pourront souscrire à l’offre de Canalplay Infinity pour 9,99€/mois sans engagement de durée. En démarrant avec SFR, Canalplay Infinity sécurise au moins un fournisseur d’accès à internet, fait indispensable pour recruter les premiers milliers d’abonnés. Cette offre devrait rapidement s’étendre aux abonnés des opérateurs tels que Free et Bouygues Télécom mais elle sera aussi accessible sur internet, téléviseurs connectés et même sur Xbox 360 au début de l’année 2012 et enfin sur les décodeurs Canal+. A terme, le but est que ce service soit accessible à tous. De plus, Canalplay Infinity est multi écrans, les abonnés auront alors accès aux contenus depuis leurs ordinateurs, tablettes et smartphones. La facilité d’accès est grande ce qui peut contribuer à son développement rapide souhaité par ses initiateurs.
Canalplay Infinity est souvent présenté comme « le Netflix à la française », SVOD dominant sur le marché américain, pour seulement 7,99$/mois. Ce système étant adopté par plus de 25 millions d’abonnés aux Etats-Unis arrive à dépasser la fréquentation des sites de téléchargement illégal, une vraie prouesse de nos jours. L’arrivée de ce concurrent, représente une menace pour le marché français. Netflix, comparé à Canalplus Infinity, peut négocier directement avec les studios le temps d’attente avant la diffusion du film sur la plateforme de SVOD. En effet, la loi américaine étant beaucoup plus souple Netflix peut présenter une offre plus récente et donc plus attractive aux yeux du public. Les films arrivent la plupart du temps en SVOD juste après leur exploitation en VOD, qui elle-même arrive la plupart du temps trois mois après leurs sorties en salles. Pour ce qui est des séries, les derniers épisodes des séries les plus appréciées telles que Grey’s Anatomy ou Dr. House aux Etats-Unis sont disponibles sur Netflix juste après leur diffusion à la télévision. Le système américain permet de visionner une œuvre très rapidement sur plusieurs supports en même temps après sa sortie en salle mais laisse peu de temps pour l’exploitation de l’œuvre sur chaque support. Cette offre permet de proposer une fenêtre d’exploitation de plus pour un film avec cette offre très séduisante financièrement et qualitativement.
Canalplay Infinity, cependant, va devoir surmonter les barrières législatives installées en France pour proposer une offre attractive. Le droit français impose un ordre et des délais pour les diverses exploitations d’une œuvre cinématographique, appelé la chronologie des médias. Un premier effort a été fait pour favoriser l’offre légale avec l’arrêté du 9 juillet 2009 qui réduit le temps d’attente entre la sortie en salle du film et son exploitation sur les autres supports. Aujourd’hui, il faut attendre quatre mois pour que le film soit disponible en DVD après sa sortie en salle, un an pour qu’il soit diffusé sur une chaîne payante de cinéma et 30 mois pour une diffusion sur une chaîne gratuite. Pour la SVOD, ce délai est de 36 mois, soit trois ans. La chronologie des médias a été modifiée dans le but de lutter contre le téléchargement illégal. Mais ces délais sont encore trop longs pour réellement faire diminuer le point noir de l’industrie cinématographique. Ce mode d’exploitation pour une œuvre audiovisuelle arrive en dernier sur la liste des supports d’exploitation payants. Le catalogue proposé ne sera donc pas récent, aucun film datant d’avant 2008 ne sera visible ce qui risque de freiner son développement. En ce qui concerne les séries, le problème sera le même car entre le moment où elles sortent aux Etats-Unis et celui où elles sont disponibles sur un SVOD en France il se sera écoulé au minimum un an. Cependant, canal+ compte se rattraper en proposant toutes ses créations originales dés leurs premières diffusions sur la chaine cryptée telles que les séries Braco et Borgia. Celles-ci seront alors valorisées par la rapidité de leur disponibilité sur le SVOD.
Canal+ doit alors redoubler d’effort pour rendre son offre intéressante et compétitive en attendant. En effet, Netflix fait son arrivée en Europe en commençant par le Royaume-Unis et l’Espagne. La France n’est pas encore envisagée dans les prochaines années, la législation française n’étant pas propice au développement de ce genre de service. Mais la concurrence est là. Des sites tels que Dailymotion ou Allociné en partenariat avec le fournisseur d’accès à internet free ont prévu d’arriver sur le marché de la SVOD d’ici la fin de l’année. Le groupe Canal+, espère bénéficier de son avance pour récolter une part importante du marché vis-à-vis de ses concurrents prochains.
Pour que le système de SVOD fonctionne en France il serait bon d’envisager plusieurs solutions : le SVOD est un service payant alors pourquoi pas réviser la chronologie des médias afin de réduire le temps d’attente pour son exploitation ou encore inciter les producteurs à exploiter leurs catalogues de films sur un SVOD. Canal+ étant déjà une chaine payante, dont sa programmation est accès en grande partie sur les films et séries, a tout intérêt à diversifier ses sources de revenu car il se pourrait que les abonnés fidèles à la chaine préfèrent un service tel que Canalplay Infinity ou le service d’un autre opérateur de SVOD.
A l’heure où tout est disponible dans l’immédiat il semble que cette attente de 3 ans paraisse encore trop longue pour séduire les cinéphiles. Pour avoir accès aux films récents plus rapidement ils devront se tourner vers les DVD ou la VOD pour les offres légales ou malheureusement vers le téléchargement illégal. C’est pourquoi le groupe Canal+ présente, en l’état actuel des choses, Canalplay Infinity, comme un service complémentaire et additionnel aux autres services proposés dans ce domaine, en attendant le développement de la TV connectée et la modification de la chronologie des médias en France.
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