Les pratiques de Facebook en matière d’archivage des données des utilisateurs et de leur utilisation à des fins commerciales a conduit la Commission européenne à modifier pour janvier 2012 la directive de 1995 concernant les données personnelles. C’est la publicité ciblée automatique qui est particulièrement visée par la Commission laquelle projette désormais d’imposer l’accord préalable de l’utilisateur pour l’activation de cette fonction.
Facebook offre plusieurs types de publicités dont l’une d’entre elles s’appelle « Social Ads » ou en français « Annonces Sociales ». Cela fonctionne comme suit : l’annonceur s’adresse à Facebook en précisant la catégorie de la population qu’il désire viser, par exemple en fonction de l’âge, du sexe, des centres d’intérêts, de la localisation des personnes, puis lui transmet le texte et le lien publicitaire qu’il souhaite voir publier. C’est le réseau social qui se charge de les afficher sur les profils correspondants de ses utilisateurs. Ainsi la publicité est personnalisée, mais la protection de l’identité des utilisateurs semble réalisée puisque seul Facebook y aurait accès. Aucune donnée personnelle n’est transmise à l’annonceur.
Le Sunday Telegraph a mené une enquête révélant que Facebook ne se contente pas d’utiliser les informations déclarées par l’utilisateur, il collecte chaque agissement, changement de statut, interaction avec famille et amis, et même les conversations privées, pour en déduire la publicité la plus pertinente. Un annonceur peut envoyer de la publicité pour des photographes professionnels de mariages à une personne venant de changer son statut relationnel en « fiancé ».
Facebook va plus loin en prenant également en compte le comportement des amis de l’utilisateur. Il est possible en effet d’avertir ces derniers de l’intérêt de l’utilisateur pour un produit sponsorisé vanté par l’intermédiaire du service publicitaire « d’annonces sociales ». Facebook a amélioré ce concept au travers d’un système de partenariat publicitaire nommé « beacon », avec des sites internet externes. Celui-ci permet par exemple aux utilisateurs de Facebook de connaitre la liste des livres que leurs amis souhaiteraient se procurer sur Amazon et ainsi de pouvoir éventuellement les leur offrir. Les partenaires tracent également les achats des utilisateurs du réseau social et envoient les détails à Facebook. Ce dernier affiche ensuite une publicité renseignant tous les « amis » de l’utilisateur sur les achats que celui-ci a effectués.
Ces pratiques sont très inquiétantes en ce qu’elles permettent d’observer, analyser et enregistrer l’intimité des utilisateurs et leurs données personnelles. De plus, deux nouvelles fonctionnalités vont être introduites sur Facebook, allant encore plus loin dans la vie privée de l’internaute. La première s’appelle Timeline et permettra à l’utilisateur de raconter l’histoire de sa vie sur une seule page à travers des photos, des vidéos, des commentaires etc. Cette incitation à parler encore plus de soi donnera la possibilité à Facebook de collecter toujours plus de données personnelles sur ses utilisateurs et de les revendre ensuite aux annonceurs. L’autre fonctionnalité se nomme Open Graph et donnera la possibilité à l’utilisateur de partager toutes ses activités avec ses contacts, pour faire savoir par exemple quelle musique il écoute et ce qu’il fait en même temps, le film ou l’émission qu’il est en train de regarder, avec qui, à quel endroit.
Avec ces outils, le réseau social pourra encore mieux cibler les habitudes de consommation et proposer alors des publicités comportementales adaptées à chaque utilisateur.
Face à ces pratiques, l’Union européenne propose une limitation. Viviane Reding, la vice-présidente de la Commission européenne a déclaré que « les utilisateurs devraient avoir le contrôle de leurs données. C’est pourquoi, la loi européenne devrait exiger que les consommateurs donnent leur consentement avant que [celles-ci] ne soient utilisées. Les consommateurs devraient avoir le droit d’effacer leurs données n’importe quand, en particulier quand [ils les] ont postées sur Internet ». Elle ajoute que les médias sociaux devraient être « plus transparents concernant la façon dont ils fonctionnent. Les utilisateurs doivent savoir quelles données sont collectées et utilisées ultérieurement, et à quelles fins ». Elle souhaite également que les données des consommateurs européens soient protégées « quel que soit le pays dans lequel ils vivent et peu importe le pays dans lequel les entreprises qui exploitent les données personnelles sont établis ». Bien que Facebook soit basé aux Etats-Unis, il pourrait alors se voir imposer les règles européennes et de lourdes amendes seront prévues.
Sources :
ŒILLET A. « Protection des données privées : l’UE va sévir contre les réseaux sociaux », Clubic.com, mis en ligne le lundi 28 novembre 2011, consulté le 10 décembre 2011 :http://www.clubic.com/internet/facebook/actualite-461404-partage-donnees-privees-ue-sevir-facebook.html
VATIN O. « L’Europe veut empêcher Facebook de recourir à la pub ciblée », Linformaticien.com, mis en ligne le 29 novembre 2011, consulté le 10 décembre 2011 : http://www.linformaticien.com/actualites/id/22382/l-europe-veut-empecher-facebook-de-recourir-a-la-pub-ciblee.aspx
BENAYOUN A. « Facebook révolutionne (encore) le réseau social », Degroupnews.com, mis en ligne le 23 septembre 2011, consulté le 10 décembre 2011 : http://www.degroupnews.com/actualite/n6815-facebook-reseau_social-internet-musique-donnees_personnelles.html
CNIL « La publicité ciblée en ligne », CNIL, Communication présentée en séance plénière le 5 février 2009 : http://www.cnil.fr/fileadmin/documents/La_CNIL/actualite/Publicite_Ciblee_rapport_VD.pdf