Le 12 décembre 2012 sortait le film attendu par toute une communauté de fans depuis deux décennies : Le Hobbit : un voyage inattendu, réalisé par Peter Jackson et distribué par Warner Bros. Ce film a fait l’objet de beaucoup de controverses et de difficultés, notamment juridiques, avant de voir le jour.
Après avoir résolu le problème du réalisateur[1], une autre difficulté s’est présentée menaçant de causer un surcoût à la production : le boycott du film demandé par le syndicat d’acteurs néo-zélandais. Ce syndicat réclamait à la production une revalorisation des droits des acteurs, celle-ci menaçait en réponse de délocaliser le tournage en Europe[2]. Cette affaire a été réglée par une loi déposée par le Premier ministre néo-zélandais, John Key, afin d’aménager la législation et permettre de tourner le film sur le territoire néo-zélandais. Le gouvernement a ainsi exclu de la définition légale d’employé toutes les personnes participant au travail de la production cinématographique, privant ainsi de tout droit et de toute protection liés à l’emploi les néo-zélandais qui travaillent de dans ce secteur évitant toute possibilité de grève et d’actions syndicales. Ce choix politique nous semble des plus critiquables, même si cela a permis à la Nouvelle Zélande de réaliser de très importants bénéfices[3].
Il faut également citer la banqueroute de la MGM, les démêlés financiers de New Line et de Peter Jackson sur les dépenses de production et les recettes sur les éditions DVD et Blu-Ray,… mais surtout les revendications des héritiers de J. R. R. Tolkien, auteur des livres Le Seigneur des anneaux et Bilbo le Hobbit.
Le droit d’auteur et le monde de Tolkien
En effet, les héritiers de Tolkien ont toujours eu à cœur de protéger l’œuvre de leur ancêtre en interdisant des adaptations contraires à leur vision. Ils ont notamment poursuivi l’auteur américain Stephen Hillard pour avoir écrit un livre dont le personnage principal est J. R. R. Tolkien, considérant que cet ouvrage portait atteinte au nom, à la personnalité et la réputation de leur ancêtre, et demandé la cessation de la vente du livre. Leurs revendications n’ont pas été entendues par le juge américain qui a considéré que l’œuvre inspirée par la vie d’une personne célèbre relevait de la liberté d’expression.
Mais les ayant-droits de Tolkien ont surtout poursuivi les sociétés de production pour obtenir des compensations financières tant sur les adaptations du Seigneur des anneaux et sur celles de Bilbo. Ainsi, en décembre 2007, ils ont demandé 220 millions de dollars à la société New Line pour l’adaptation de Bilbo considérant que la société n’avait pas respecté l’accord signé au préalable avec Tolkien. En septembre 2009, un accord financier, dont le montant est resté secret, a été trouvé.
Récemment encore les héritiers de Tolkien ont fait parler d’eux. La semaine précédant l’avant première mondiale du film ils ont poursuivi les sociétés Warner Bros et New Line pour avoir usurper des droits qui ne leurs étaient pas dévolus et ont réclamé 80 millions de dollars. Ils reprochent aux sociétés de ne pas avoir respecté l’accord signé avec J. R. R. Tolkien qui leur conféraient le droit de sortir des produits tangibles basés sur ses livres. Pour les ayant-droits, le fait d’avoir autorisé le développement de jeux vidéos téléchargeables et la diffusion d’images des personnages sur des distributeurs automatiques ne sont pas selon eux des produits tangibles faisant partie de l’accord.
Cette affaire, occultée par le succès du film et sa promotion retentissante, n’a pas fait couler beaucoup d’encre. Pour autant elle fait écho à deux autres affaires concernant un autre monde fantastique : celui des supers héros.
Le droit d’auteur et les supers héros.
En effet, les deux sociétés d’édition, désormais sociétés de production, de comics ont fait aussi parler d’elle ce trimestre. Dans la première affaire, DC Comics[4] a gagné son procès contre les héritiers des créateurs de Superman. Ces derniers revendiquaient un nouveau partage des droits d’auteur qui avaient été cédés à la National Allied Publications (futur DC Comics) pour 130 dollars par leurs ancêtres. Les créateurs du super héros ont passé leur vie entière à tenter de récupérer leurs droits face au succès mondial de ce personnage. Ils ont fini par obtenir d’une part le versement de 200 000 dollars et d’autre part une rente annuelle de 35 000 dollars pour chacun d’entre eux jusqu’à la fin de leur vie. Leurs héritiers ont eu moins de chance, la décision du 17 octobre 2012 a donné à la Warner Bros, propriétaire de DC Comics, l’ensemble des droits d’auteur pour l’utilisation de Superman pour toutes les adaptations possibles. Pour le juge les droits d’auteur ont été légalement acquis par la National Allied Publications, donc par la Warner.
La seconde affaire concerne non pas un personnage imaginaire mais un auteur tout autant célèbre que Tolkien : Stan Lee. En 2009 Walt Disney Company a racheté la société Marvel Entertainment acquérant par là même les différents droits d’auteur et d’adaptation des personnages Marvel dont le succès cinématographique n’est plus à démontrer. Rappelons que Stan Lee est l’auteur de la majorité des personnages édités par Marvel et a fait le succès de la marque. En 1998, Stan Lee a créé la société Stan Lee Media Inc. mais ne participe plus à la vie de cette société depuis une dizaine d’années. Pour autant cette société a porté plainte contre la société Walt Disney considérant que les droits d’auteur sur les personnages Marvel n’ont pas été correctement cédés lors de l’achat de la société Marvel. Le Figaro rapporte que la société Stan Lee Inc. avait déjà soulevé cet argument dans une précédente affaire dans laquelle elle avait été déboutée face à la société Marvel, laissant présager une solution identique pour l’affaire qui nous intéresse.
SOURCES
GARCIA M., “Le Hobbit, les héritiers de Tolkien attaquent les producteurs”, mise en ligne le 22 novembre 2012, consulté le 29 décembre 2012, http://www.lexpress.fr/culture/cinema/le-hobbit-les-producteurs-attaques-par-les-heritiers-de-tolkien_1190571.html
JESS C., “Le Hobbit contre les syndicats”, mise en ligne le 14 décembre 2012, consulté le 29 décembre 2012, http://www.equaltimes.org/fr/in-depth/the-hobbit-vs-the-unions
RÉROLLE R., “Tolkien, l’anneau de la discorde”, mise en ligne le 5 juillet 2012, consulté le 29 décembre 2012, http://www.lemonde.fr/culture/article/2012/07/05/tolkien-l-anneau-de-la-discorde_1729858_3246.html
VERTALDI A., “Warner Bros conserve intégralement Superman”, mise en ligne le 18 octobre 2012, consulté le 29 décembre 2012, http://www.lefigaro.fr/bd/2012/10/18/03014-20121018ARTFIG00571-warner-bros-conserve-integralement-superman.php
[1] Guillermo del Toro (Hellboy, Le labyrinthe de Pan) devait au départ réaliser le film. Il s’est retiré du projet après deux années de travail pour des raisons de pressions trop élevées autour du planning de production. Suite à ce départ précipité, Peter Jackson a décidé de produire et de réaliser le film en créditant Guillermo del Toro en tant que scénariste.
[2] Des recherches de lieux de tournage avaient été effectuées
[3] Des experts ont estimé que le tournage allait rapporter des dizaines de milliards de dollars sans compter l’augmentation du tourisme.
[4] Filiale de Warner Bros