La place des femmes dans la culture, et dans les médias en particulier, est devenue une question récurrente au cours de ces derniers mois. Qu’il s’agisse du ministère de la culture et de la communication ou du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA), toutes les institutions mettent actuellement en place des dispositifs afin d’essayer de mettre fin aux inégalités entre les hommes et les femmes dans les médias.
C’est dans ce contexte que le Sénat a publié en juin dernier un rapport d’information abordant le thème de la place de la femme dans l’art, la culture et les médias. Constatant que l’image de la femme dans les médias en général, et dans la presse féminine en particulier, était très souvent stéréotypée et ne correspondait pas à la réalité, le rapport met également en avant l’absence de femmes à des postes de direction stratégique, aussi bien dans le secteur privé que public.
Afin de lutter contre les stéréotypes et les inégalités, le rapport préconise notamment que «soit spécifiquement identifiée la question des inégalités entre les femmes et les hommes dans l’organisation et le contenu des travaux du CSA, en créant une mission qui aurait pour compétence : de réfléchir aux modalités d’une action de vigilance vis-à-vis des chaînes, qui passera soit par la rédaction d’une délibération sur cette question – expression d’un pouvoir unilatéral du CSA -, soit par l’élaboration d’une charte de l’antenne, en partenariat avec les diffuseurs; de faire un bilan annuel sur cette question, à l’instar du bilan sur la diversité ; d’étudier les moyens d’introduire la clause de responsabilité sociétale envers les femmes lors de tout accord d’autorisation délivré aux chaînes privées.»
Ainsi, depuis sa création début 2013, le groupe de travail « Droits des femmes » du Conseil supérieur de l’audiovisuel a engagé de nombreuses actions en vue d’améliorer la représentation des femmes sur les services de communication audiovisuelle.
Le groupe de travail a publié ce mercredi 12 février 2014, le bilan des ses premiers travaux.
Constat de l’inégalité hommes-femmes dans les médias français
Les femmes sont encore aujourd’hui sous-représentées dans les médias et notamment à la télévision. C’est ce qu’indique le baromètre du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) pour l’année 2013.
1527 programmes diffusés sur 16 chaînes gratuites et sur Canal+ ont été étudiés à la loupe. Il en résulte que la présence des femmes à l’antenne atteint péniblement les 37%. C’est certes d’avantage qu’en 2012, où ce pourcentage plafonnait à 35%. Or, ces chiffres ne sont pas du tout représentatifs de la société française actuelle. En effet, les femmes représentent 52% de la population et 56% de l’audience télévisée. Sylvie Pierre-Brossolette, présidente du groupe de travail «droits des femmes» au CSA déplore que «le baromètre de 2013 montre que dans l’ensemble, les choses ne bougent pas beaucoup. Et si on relâche la pression, on sent que ça peut vite retomber.»
Face à la pression du CSA, France Télévisions a déjà promis l’été dernier de faire bouger les lignes, aussi bien en interne qu’à l’antenne, en passant notamment à 30% le nombre d’expertes dans les journaux télévisés, les magazines d’information ou d’actualité d’ici la fin 2014. Pour ce qui est du groupe Radio France, plus réticent au d»part, a fini par suivre le mouvement en garantissant, entre autres, 30% de femmes invitées dans les matinales.
Concernant TF1, la chaines s’engage simplement sur un bilan de présence des expertes des les programmes, quand M6 promet de poursuivre la recherche d’expertes afin d’établir un liste d’intervenantes. Canal+ prévoit la mise en place d’une «cellule ad hoc destinée à améliorer la place des expertes sur ses antennes», tel qu’on peut le lire dans le bilan des premiers travaux de groupe de travail «droits des femmes».
Pour ce qui est des radios, Skyrock n’a même pas détaillé ses intentions, et le groupe RTL 5RTL, Fun Radio et RTL2) compte mettre en place une série d’indicateurs permettant de suivre, émission par émission, sa féminisation. Quant au groupe Lagardère (Europe 1, Virgin Radio, RFM), il s’appuiera sur des sondages réguliers.
Quoiqu’il en soit, le CSA pourra bientôt compter sur une arme de poids pour être plus audible et féminiser l’audiovisuel. La loi sur l’égalité hommes-femmes, qui devrait entrer en vigueur cet été, conférera au gendarme de l’audiovisuel un pouvoir de contrôle, voire de sanction en cas de non-respect des objectifs fixés par le gouvernement. «La loi arrive, on ne va pas les lâcher. Néanmoins, il ne s’agit pas de faire des quotas ou d’arriver à une parfaite parité. Il s’agit simplement d’être un peu plus juste», rassure Sylvie Pierre-Brossolette.
Projet de loi sur l’égalité hommes-femmes : vers une augmentation des pouvoirs de contrôle du CSA
Le projet de loi sur l’égalité entre les hommes et les femmes, qui devrait entrer en vigueur cet été, aborde notamment la question de la représentation des femmes dans les les médias audiovisuels. Il confère au CSA de nouvelles compétences afin qu’il assure le respect des droits des femmes dans les médias. A ce titre, ce dernier veillera, dans les programmes audiovisuels, à une juste représentation des femmes ainsi qu’à la promotion de l’image de la femme et de l’égalité entre les hommes et les femmes. Il veillera également à la lutte contre la diffusion de stéréotypes sexistes et d’images dégradantes des femmes.
Par ailleurs, le CSA sera chargé de fixer les conditions de diffusion de programmation contribuant à la lutte contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes auxquelles les services de télévision seront soumis. Cette obligation sera limitée aux seules chaînes nationales hertziennes (les chaînes TNT) qui concentrent 90% de l’audience télévisée.
La responsabilité des société du secteur public est également envisagée dans le projet de loi pour qu’elles conduisent des action non seulement sur la prévention des violences mais également pour la promotion de l’égalité entre les hommes et les femmes et contre les préjugés sexistes.
Le Conseil supérieur de l’audiovisuel s’est montré très favorable à cette mesure. Lors de son entrée en fonction, le nouveau président de l’institution, Olivier Schrameck avait déjà fait de la question des femmes dans les médias une priorité de son mandat. Le régulateur a néanmoins regretté que le texte ne prévoit pas «une disposition lui permettant d’engager également un dialogue avec les éditeurs concernant leur propre structure afin qu’ils concilient leurs objectifs de développement avec celui de la protection des droits des femmes.»
SOURCES :
J4M, «Place des femmes dans les médias : le CSA comme solution aux inégalités ?», Jurist4Medias, publié le 08 juillet 2013, consulté le 27 février 2012, http://www.jurist4medias.fr/2013/07/08/place-des-femmes-dans-les-medias-le-csa-comme-solution-aux-inegalites/
J4M, «Projet de loi pour légalité entre les femmes et les hommes : adoption du texte par le Sénat», Jurist4Médias, publié le 20 septembre 2013, consulté le 27 février 2014, http://www.jurist4medias.fr/2013/09/20/projet-de-loi-pour-legalite-entre-les-femmes-et-les-hommes-adoption-du-texte-par-le-senat/
SALLE (C.), «Le CSA veut renforcer la place des femmes à la télévision et à la radio», Le Figaro, publié le 12 février 2014, consulté le 27 février 2014, http://www.lefigaro.fr/medias/2014/02/12/20004-20140212ARTFIG00013-le-csa-veut-renforcer-la-place-des-femmes-a-la-television-et-a-la-radio.php