Intelligence artificielle, médicament connecté, application pour smartphone, le recours aux drones, permettent une meilleure une offre des soins. Contrôler sa santé est devenu simple. Si ces innovations n’ont pas été pensées à la base pour le secteur médical, ce dernier est directement impacté par ces innovations. En effet, aujourd’hui les objets connectés permettent de redonner « la vue », l’intelligence artificielle permet d’anticiper les attaques cardiaques. Cependant, ces transformations ne sont pas sans conséquences. Entre disparition des médecins et piratages des systèmes, ces innovations font peur. Entre bon ou mauvais diagnostic, la santé de demain est au cœur des discussions et soulève de nombreuses interrogations.
Le diagnostic médical de demain : La non remise en cause de la présence humaine et les questions de responsabilité.
La complémentarité de l’homme avec l’intelligence artificielle et les objets connectés.
Et si une intelligence artificielle ou encore un objet connecté parvenait à poser un diagnostic médical comme le fait un médecin ? Cet objectif a été atteint ces dernières années.
Dans le cadre du cancer du sein, il apparait extrêmement difficile de détecter les symptômes et seul l’intervention d’un médecin permet en réalité de diagnostiquer la maladie. Cependant, aujourd’hui des objets du quotidien sont devenus intelligents et un simple soutien-gorge est en réalité capable de prévenir la maladie. Baptisé EVA, ce soutien-gorge a été créé pour améliorer la qualité de vie des femmes et notamment de celles qui présentent des prédispositions génétiques de la maladie. Ce soutien-gorge est composé de 200 biocapteurs qui permettent d’enregistrer les « la forme de la poitrine » ou « les changements de température » qui peuvent être des signes avant-coureurs de la maladie . Ce dispositif connecté en Bluetooth, est complété par une application mobile qui recueille les informations afin d’établir le diagnostic. Si l’objet connecté permet de poser un « diagnostic virtuel », l’intervention du médecin reste nécessaire pour poser un diagnostic définitif. Cependant, l’intelligence artificielle vient directement concurrencer les médecins puisque certaines intelligences artificielles sont capables de dresser des diagnostics beaucoup plus fiables que les médecins eux-mêmes.
Selon l’OMS, près de 20 millions de personnes « meurent des effets des maladies cardiovasculaires » et aujourd’hui des intelligences artificielles mises en place par des chercheurs de l’Université de Nottingham permettent de « déterminer avec davantage de précision qu’un médecin, les risques de crise cardiaque. ». En effet, quatre algorithmes ont été développés afin d’analyser 378 256 dossiers médicaux et « d’en extraire des modèles de profils pouvant développer des maladies cardiovasculaires. » L’un des algorithmes a pu « prédire 7,6% d’accidents de plus que les médecins, avec 1,6% de fausses alertes en moins ». Si grâce aux intelligences artificielles l’erreur diminue l’erreur ne disparait pas totalement.
Ainsi, une véritable complémentarité apparait entre l’intelligence artificielle, les objets connectés et les Hommes dans le domaine de la santé. La disparition du médecin dans l’élaboration diagnostic ne semble pas être à l’ordre du jour puisque ces technologies restent pour l’instant incertaine. Dans ce cadre-là, on peut supposer que l’impact des technologies au service de la santé dans l’élaboration du diagnostic médical constitue un « bon diagnostic ». Cependant, ces technologies soulèvent des questions en termes de responsabilité en cas de dommages causés par l’intelligence artificielle et les objets connectés.
Quelle responsabilité pour l’intelligence artificielle et les objets connectés ?
Le régime de responsabilité extracontractuelle est difficile applicable à l’intelligence artificielle et aux objets connectés. L’intelligence artificielle ne possède pas à l’heure actuelle de personnalité juridique et ne dispose pas de patrimoine au sens du droit Français. Dès lors ,il semble difficile d’appliquer l’article 1240 du code civil à l’intelligence artificielle car « l’intelligence artificielle ne sera pas en mesure de réparer le préjudice. » Cependant, si l’on se place du côté du régime spécial de la responsabilité du fait des produits défectueux, défini par les articles 1245 et suivants du code civil, la victime du « dommage causé par » un objet connecté ou une intelligence artificielle « serait fondée à agir contre le « producteur » sans s’interroger indéfiniment sur le « véritable responsable du sinistre », ce qui est plutôt favorable à la victime. Par ailleurs, l’article 1245-5 du code civil définit le producteur de manière large, ce qui permet à la victime d’avoir de véritable chance d’être indemnisée à condition qu’elle démontre que le caractère défectueux du produit est consécutif de son dommage. Cependant, les objets connectés ou encore les intelligences artificielles sont des éléments nouveaux et ce n’est qu’à l’heure actuelle que les dérives possibles apparaissent et au regard de l’article 1245-10 du code civil « le producteur est responsable de plein droit à moins qu’il ne prouve » « que l’état des connaissances scientifiques et techniques, au moment où il a mis le produit en circulation, n’a pas permis de déceler l’existence du défaut ». Dès lors les producteurs pourront invoquer cette disposition en cas de défaillance de l’objet connecté ou de l’intelligence afin de ne pas voir leur responsabilité engagée. Si l’ensemble des dispositions du droit commun semble être à priori, applicable aux objets connectés mais aussi à l’intelligence, ce dernier n’est pas en réalité adapté. Dès lors la mise en place d’un régime propre à l’intelligence artificielle et aux objets connectés semble être la solution idéale.
Par ailleurs, les innovations technologiques impactent aussi le cœur même de la santé puisque des nouvelles formes de soins et d’accès aux soins sont apparus.
Les nouvelles formes de soins et d’accès aux soins : Entre médicaments connectés, robots et drones.
Dans les quatre coins du monde, des nouvelles formes de soin et d’accès aux soins apparaissent. En effet, aujourd’hui les drones, les robots sont devenus des acteurs incontournables dans le domaine de la santé.
Aujourd’hui, plus de 800 millions de personnes ont un accès extrêmement difficile aux soins. Si les drones ont été utilisés pendant un temps pour prendre des clichés ou encore pour développer les modes de livraison d’Amazon, les drones s’imposent aujourd’hui comme « un mode de transport qui pourrait révolutionner l’aide humanitaire. ». En effet les drones permettent s’approcher de zones dangereuses sans mettre en danger une vie humaine. De plus, l’autonomie des drones a séduit et cette autonomie est devenue un atout dans pour le secteur de la santé. En effet, au cours du mois de septembre 2017, un drone qui transportait des échantillons de sang a réussi à parcourir une distance de 260 kilomètres. L’objectif premier de ce vol était en réalité la possibilité de l’utilisation des échantillons et l’appareil avait dès lors été équipé « d’une chambre froide capable de garder le sang à une température exacte. ». Ainsi, grâce aux drones , les régions les plus reculées pourront avoir accès à certains soins . Il existe un très grand nombre d’obstacles avant que ce système puisse se développer à grande échelle. Les obstacles sont de deux ordres à savoir technologiques et sécuritaires. Du côté de l’obstacle technologique, le drone est encore une technologie à mettre au point. En effet, un drone qui a été testé dans un désert pourra-il fonctionner de la même manière dans un environnement urbain et donc éviter les voitures ou encore les câbles électriques ? Du coté sécuritaire, les drones ne sont pas à l’abri des piratages et des chercheurs ont mis au point un « boitier capable d’intercepter la liaison entre un drone et sa télécommande radio pour permettre d’en prendre le contrôle en vol. ». Malgré les obstacles, les drones restent des outils prometteurs dans le domaine de la santé.
Afin d’améliorer la qualité des soins, les robots s’imposent comme une véritable solution dans les soins et à Singapour, « la médecine traditionnelle revit grâce à la technologie ». En effet, un nouveau robot a été mis en place pour soigner les sportifs. Il est possible de programmer les robots pour effectuer des taches extrêmement précises et c’est cette caractéristique qui a séduit le secteur médical. En effet, aujourd’hui, la présence des robots dans les blocs opérateurs est devenue omniprésente aux Etats Unis. En France, la chirurgie robotique tend à se développer. Elle permet aujourd’hui une meilleure récupération du patient, des opérations moins invasives. Mais le développement de la robotique dans le secteur médical reste incertain. En effet, les robots sont des machines et une machine peut être défectueuse ou encore tomber en panne. De plus, le développement de la robotique fait peur au plus grand nombre. Cependant, le robot reste « un opérateur dépendant » puisque c’est le médecin qui fixe le protocole. Si les robots se sont développés dans le domaine de la santé c’est avant tout parce qu’ils s’imposent comme « un instrument médical très précis ».
A côté des drones et des robots, des nouvelles formes de soin sont apparues ces derniers mois et sont aujourd’hui au cœur des débats. En effet, aux Etats Unis, un médicament connecté a été mis en place afin de contrôler la prise du traitement par le patient. Ce médicament est en réalité la « version numérique du médicament aripiprazole. Il traite la schizophrénie, les troubles bipolaires et sert de complément du traitement de la dépression ». Ce système est composé de quatre éléments à savoir le comprimé et son capteur, un patch et une application mobile. Cependant, cette nouvelle forme de prise de médicament, soulève évidemment des questions d’éthiques. Il s’agit bien d’une « pilule de surveillance » puisque « une fois ingérée, la pilule connectée vient se loger dans l’estomac des patients et cherchera à communiquer des données sur la prise des médicaments à un patch porté par le traité. » Le médecin sera dès lors en capacité de vérifier si le patient suit son traitement et donc de le surveiller. Une partie de la doctrine, estime que ce médicament connecté constitue une atteinte à la « liberté de faire et de décider » les patients. Comme étant surveillé, le patient pourra être dans l’obligation de prendre son traitement. Naturellement, cette technologie soulève encore une fois des interrogations sur la sécurité des données récoltées puisque le piratage reste possible.
Cependant, avec l’entrée en vigueur du Règlement général sur la protection des données, ces différentes interrogations semblent trouver des réponses. En effet, si ce règlement ne concerne pas directement ces nouveaux médicaments, ces derniers sont en réalité concernés par cette nouvelle protection des données personnelles. Les rédacteurs du RGPD, afin de limiter les risques liés au vol ou encore à la fuite des données personnelles, ont posé un certain nombre de principes afin de protéger de façon optimale les données personnelles. L’article 25 du RGPD consacre le principe de privacy by design. Le principe de privacy by design signifie que la protection des données personnelles doit être intégrée « dès l’origine dans l’architecture » du « produit ». Dès lors, dans le cadre des médicaments connectés, cela signifie que le responsable de traitement ou encore le fabricant du médicament devront être attentifs aux différentes mesures de sécurité. Par exemple, ils devront « notamment justifier la quantité et qualité des données demandées, l’étendue du traitement (collecte, stockage, gestion), la durée de conservation, l’accessibilité de ces données (correspondant à un accès restreint à un certain nombre de personnes). »
A côté du développement des soins et de l’accès aux soins, le carnet de santé est lui aussi impacté par les nouvelles technologies.
« Le carnet de santé 2.0 » : un meilleur suivi médical.
Approuvé par un grand nombre des organismes de santé, la nouvelle application de la Poste n’est pas un simple gadget. En effet, l’objectif de ce nouveau carnet de santé est de suivre le patient par son médecin et d’exercer une médecine préventive. En effet, au lieu de se rendre chez le médecin lorsque les premiers symptômes apparaissent, le médecin ainsi peuvent consulter l’état de santé. « La Poste estime qu’elle peut être particulièrement efficace pour suivre des patients souffrant de maladies chroniques ou des personnes venant tout juste d’être opérées. » Par l’homologation et par les partenariats avec des grands hôpitaux, La Poste s’impose sur le marché de la santé. Si en apparence cette application apparait particulièrement intrusive dans la vie privée, elle constitue en réalité une véritable avancée.
Si l’ensemble de ces technologies effraie, elles constituent de réelles avancées dans le domaine médical et la place du médecin ne semble pas être remise en cause. Cependant, ces innovations restent incertaines et notamment au niveau de la protection des données qu’elles peuvent récoltées mais aussi au niveau de leur fonctionnement. Ainsi, le diagnostic des innovations technologiques au service de la santé reste discutable et seul le temps pourra répondre à la question suivante : Les innovations technologiques au service de la santé : Bon ou mauvais diagnostic ?
SOURCES :
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