Le dimanche 6 octobre 2019, alors que se déroulait la manifestation contre l’extension de la PMA à Paris, une équipe de journalistes de Quotidien, présente pour couvrir l’événement, a été agressée par des manifestants. Comme le montre une vidéo diffusée lors de leur émission du 7 octobre, ainsi que sur leurs réseaux sociaux, ces manifestants s’en sont pris, dans un premier temps, au matériel de l’équipe en détruisant totalement leur caméra. Mais ils ne se sont pas arrêtés là puisque la vidéo continue en les montrant agresser physiquement les journalistes tout en leur criant des insultes. L’équipe de journalistes a annoncé avoir porter plainte.
Ce n’est malheureusement pas un acte isolé. Si dans le monde entier des journalistes se font agresser, kidnapper, voire même tuer, alors qu’ils exercent leur métier pour informer au mieux le lecteur, en France les violences contre les journalistes ont commencé à se multiplier et se faire de plus en plus entendre depuis le début des manifestations des « gilets jaunes » en novembre 2018. Le 30 novembre 2018 France 3 Nouvelle-Aquitaine dénonce l’agression de 7 journalistes en 15 jours, le 22 décembre ce sont deux journalistes de France 2 qui sont agressés dans les Pyrénées Orientales et une équipe de BFMTV à Saint-Chamon (Loire). Ce ne sont là que des exemples de cette dernière année, mais les agressions de journalistes lors de manifestations remontent à plusieurs années en arrière, et bien qu’elles augmentent d’année en année, ce n’est pas du seul fait des « gilets jaunes ».
- Une atteinte à la liberté d’expression
En s’attaquant aux journalistes, outre que ce soit une grave atteinte aux droits de l’homme, les agresseurs s’en prennent directement au principe de la liberté d’expression, pilier de la démocratie, dont découle, entre autres, le principe de la liberté de la presse. En effet, « tout individu a droit à la liberté d’opinion et d’expression, ce qui implique le droit de […] répandre, sans considérations de frontières, les informations et les idées par quelque moyen d’expression que ce soit. » Par ailleurs, ils apparaissent également comme des défenseurs de cette liberté en jouant un rôle crucial dans l’accès à l’information pour les citoyens. Ils devraient avoir la possibilité de faire leur travail sans avoir à craindre pour leur intégrité.
En les empêchant d’exercer leurs missions d’informateur il s’agit là d’une forme de censure.
- Une préoccupation internationale
La sécurité des journalistes étant devenue un sujet de préoccupation, des mesures ont été mises en place pour la renforcer. Des actions ont été prises aux niveaux européen et international pour garantir une meilleure sécurité des journalistes, et donc protéger dans un même temps la liberté d’expression.
Le Conseil de l’Europe a affirmé en 2014, dans des Orientations de l’Union Européenne relatives à la liberté d’expression en ligne et hors ligne, que l’Union Européenne prendrait toutes les mesures nécessaires pour assurer la protection des journalistes, tant par la prévention qu’en insistant pour que de réelles enquêtes soient menées lorsque des violations sont commises. En 2015 il lance une plateforme de surveillance des menaces pesant sur la liberté des médias et la sécurité des journalistes, tout en offrant un mécanisme d’alerte précoce et de réponse rapide. Enfin, en 2016 il adopte une série de lignes directrices qui appellent les États membres à réviser leur législation nationale en matière de liberté des médias. Ces lignes directrices vont indiquer précisément les mesures à prendre pour prévenir les atteintes et protéger les journalistes.
Au niveau international, l’UNESCO et les Nations Unies ont collaboré dans le cadre du Plan d’action des Nations Unies pour la sécurité des journalistes pour, notamment, sensibiliser le public à ce sujet, créer des normes et élaborer des politiques publiques, ou encore renforcer les capacités des États membres en matière de mise en place, volontaire, de mécanismes pour mieux prévenir les attaques contre les journalistes, les protéger, et poursuivre en justice les auteurs de ces attaques.
Enfin, plusieurs ONG telles que le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), ou encore Reporters sans frontières (RSF), effectuent des surveillances des crimes commis à l’encontre des journalistes et tendent à venir en aide aux journalistes.
De voir que des actions sont réalisées au niveau international montre bien qu’il s’agit d’un sujet sensible et qu’il est essentiel de protéger à la fois les journalistes et les libertés d’expression et d’information. C’était déjà le cas quand ces institutions et organisations ont décidé d’agir, et c’est encore le cas aujourd’hui.
Sources :
Vidéo de l’agression des journalistes de Quotidien.
Article 19 de la DUDH de 1948.
LECLERC A., GAGNEBET P. et BERTEAU A., “« Gilets jaunes » : la violence contre des journalistes « prend une ampleur inédite »”, Le Monde, 26 novembre 2018.
HERREROS R., “L’agression de « Quotidien » à la manif anti-PMA condamnée par La Manif pour Tous”, Huffingtopost, 8 octobre 2019.
“« Gilets jaunes » : on a recensé les agressions de journalistes depuis le début du mouvement”, Franceinfo, 20 janvier 2019.
“Tendances mondiales en matière de liberté d’expression et de développement des médias: rapport mondial 2017/2018”, UNESCO, 2018.
“Plan d’action des Nations Unies sur la sécurité des journalistes et la question de l’impunité”, 2016.