Le gouvernement lançait en octobre 2017 un programme de transformation de l’administration intitulé « Action publique 2022 » reposant sur divers principes dont celui donné à la transformation numérique des administrations. Une mesure est devenue fondamentale, la dématérialisation de l’intégralité des services publics à l’horizon 2022.
Les enjeux de la dématérialisation des services publics
« L’objectif du gouvernement est de dématérialiser d’ici 2022 les 250 démarches “phares” les plus utilisées par les citoyens »
Bien plus qu’une simple tendance, la dématérialisation est au coeur de la transformation des entreprises mais aussi des administrations françaises. Elle permet un accès rapide aux informations et documents administratifs puisqu’ils deviennent accessibles numériquement mais offre aussi la possibilité de réaliser une grande part des démarches en ligne. L’innovation numérique est perçue comme permettant une amélioration des services publics car la volonté est claire, simplifier l’accès aux formulaires administratifs, éviter un déplacement systématique et obligatoire des usagers à des horaires parfois difficilement conciliables avec une vie professionnelle et permettre in fine le désengorgement des administrations.
Cette transformation passe donc par une ambition de proximité des services de l’Etat. Concernant la question centrale de l’effectivité de ces mesures, au dernier trimestre 2018, certains services publics notamment le service des impôts pour les particuliers, la sécurité sociale ou Pôle emploi avaient déjà publié un retour sur la qualité de leurs services dématérialisés, plutôt positif.
Dans la même logique, France Connect simplifie les démarches administratives en ligne, le site est le support de dématérialisation de plusieurs administrations permettant un accès facilité à différents services en ligne (ANTS, assurance retraite, etc…). Ce service va plus loin puisque l’usager par le biais d’un seul compte et identifiant peut désormais accéder à l’ensemble des démarches.
Malgré une bonne volonté remarquée des pouvoir publics à fournir un service au plus près des usagers, certains citoyens restent sur le banc de touche. En cause, une méconnaissance des outils informatiques, une absence d’équipement numérique ou encore un illectronisme total qui accentue la fracture numérique sur le territoire français.
La fracture numérique et l’illectronisme vers une rupture d’égalité devant le service public ?
« L’administration doit assurer, notamment aux personnes vulnérables ou n’utilisant pas l’outil numérique, des possibilités de communication et de médiation adaptées à leurs besoins et à leur situation ».
30% de la population françaises reste éloignée du numérique. Selon l’INSEE c’est près de 17% qui ne saurait pas utiliser internet, touchée par l’illectronisme. L’illectronisme devient le nouveau mal de notre génération ; il révèle une inhabileté numérique entrainant une difficulté voire une incapacité à utiliser les appareils numériques et outils informatiques en raison d’un manque partiel ou total de connaissances. Ce concept transpose celui d’illettrisme dans le domaine de l’informatique, à l’ère de la dématérialisation.
La marche rapide vers un tout numérique à l’horizon 2022, met en exergue la problématique de l’accessibilité pour ces personnes connaissant peu ou pas les outils informatiques. La simplification et l’accessibilité des démarches administratives représenteraient pour elles une barrière, les éloignant inéluctablement des services publiques administratifs.
L’accompagnement des usagers en cause ?
Le défenseur de droits tirait la sonnette d’alarme en décembre 2018 sur l’impact négatif de la dématérialisation des services publics notamment pour les citoyen les plus vulnérables. Déclarer ses impôts, faire une demande de bourse ou d’allocation, ses démarches courantes deviennent pour une partie non négligeable de la population un réel obstacle.
Comme palliatif, a été mis en place le Pass Numérique qui permet à un usager en difficulté d’accéder gratuitement à une formation et à un accompagnement lui enseignant les compétences nécessaires pour réaliser ses démarches administratives en ligne. Le 3ème Comité interministériel de la transformation publique de juin 2019 évoquait le déploiement de 1000 Pass sur tout le territoire… ce chiffre semble assez minime en rapport au nombre de personnes touchées par une grande difficulté face au numérique. Alors qu’aujourd’hui, ne pas avoir accès à internet ou ne pas savoir se servir des outils numériques représente un véritable handicap.
Le recours aux médiateurs du numérique
Si l’accès à Internet se développe, de larges inégalités persistent notamment chez les personnes moins diplômées, les ménages aux revenus modestes et les personnes les plus âgées. Les pouvoirs publics ont répondu afin de soutenir les exclus du numériques, notamment en impliquant les médiateurs du numérique dans la transformation du paysage administratif.
Le médiateur numérique aide les individus à utiliser et comprendre les outils informatiques, il favorise l’appropriation des technologies. Il est au cœur de la transformation numérique car au plus près des usagers, il est l’aide physique indispensable après les proches qui restent pour plus de 36% l’aide privilégiée.
Les autres mesures palliatives à l’illectronisme
C’est le cas du plan d’accessibilité téléphonique qui visera a accompagner les usagers à distance. Pour favoriser cette mesure, à partir du 1er janvier 2021, les administrations d’État, leurs établissements publics et les organismes gérant un service public administratif ne pourront plus recourir à un numéro téléphonique surtaxé dans leurs relations avec le public, afin que le coût ne viennent pas entacher la relation des usagers avec le service public.
Mais aussi de la création de 300 maisons « France Services », ces maisons doivent regrouper des services polyvalents de l’État, des opérateurs (allocations familiales, caisses de retraites, assurance maladie, etc.) et des collectivités locales qui permettront un renouveau des ancien services administratifs. Un seul lieu physique pour plusieurs service administratifs. Mais aussi un service public qui se déplace au plus près des usagers, car ces maison pourront prendre pour quelques unes la forme de bus mobiles. Lorsque l’on sait que dans certaines villes ou villages éloignés et/ou peu peuplés, l’accès à un service public physique peut être compliqué voire impossible, cette solution semble offrir une réponse satisfaisante aux problématiques liées la dématérialisation. Pour autant elle ne règle pas la cause première, un manque crucial d’éducation numérique, mais aussi parfois une absence de débit suffisant …
En tout état de cause, la dématérialisation engage un processus positif pour les usagers et sera dans quelques années la référence en matière de service public, les longues files d’attentes n’étant plus qu’un mauvais souvenir. Pour autant, les services publics doivent continuer à accompagner les plus fragiles numériquement afin de ne pas créer une rupture d’égalité devant le service public.
Sources :
Fracture numérique, l’illectronisme touche 17% de la population, vie-publique.fr
Dématérialisation, quelle politique pour les exclus du numérique, vie-publique.fr
e-administration, vie-publique.fr
Dématérialisation des démarches administratives, défenseurdesdroits.fr
Bilan et perspective du 3ème comité interministériel de la transformation publique, gouvernement.fr
NEC, numérique en commun