- Une nouvelle application pour compenser un premier échec :
Lors de son allocution télévisée du 14 octobre 2020, le Président de la République a renforcé les dispositifs sanitaires et a également évoqué le remplacement de l’application StopCovid.
Ce nouvel outil numérique devrait être disponible sur les plateformes de téléchargement le 22 octobre 2020. Appelé Tous Anti-covid cette nouvelle application est venue répondre à l’échec de la première application StopCovid que les français n’avaient que très peu téléchargée. En effet, cette impopularité était notamment due au fait que Stop Covid reposait sur l’utilisation des données de localisation des téléphones portables afin d’étudier la circulation du virus et d’endiguer la chaine de transmission en identifiant les trajets des personnes infectées et les personnes ayant été en contact avec ces dernières.
Partant, ce traçage numérique associé aux tensions sociales du pays n’ont pas entrainé une adhésion massive à cette application.
Il est vrai qu’une application aussi intrusive soulève d’importantes questions quand à la protection des données personnelles des utilisateurs et de sa conformité au RGPD. Pourtant la Commission Européenne est venue apporter tout son soutien dans le développement de l’utilisation des applications ainsi que des données de localisation par les Etats membres. En effet, au moment où l’État français avait annoncé la mise en place de l’utilisation du traçage dans le suivi de la circulation du virus pour le déconfinement en mai 2020, la Commission Européenne avait déjà émis une recommandation afin de mettre en place un dépistage généralisé des populations au sein des États membres.
- Des applications validées par les autorités compétentes :
De plus, la CNIL est également allée dans le sens de la juridiction Européenne en autorisant la mise en place de cette application pour cause d’intérêt public malgré l’absence de preuves concrètes de l’utilité de cette application. Il est probable que la CNIL soit allée dans le sens de la Commission Européenne afin d’entamer une action en accord avec la politique européenne et ainsi optimiser l’efficacité des actions dans la lutte contre la propagation de la Covid-19 sur le territoire européen.
Cet avis de la CNIL était justifié par les engagements pris par le gouvernement notamment la garantie d’anonymat dans le traitement traitement des données. Cependant le fonctionnement même de ce genre d’application semble rendre le principe d’anonymisation impossible puisque l’objectif est d’identifier les personnes infectées et les contacts qu’elles auraient pu avoir.
Il semble donc que les institutions compétentes avaient jugé l’application conforme à la protection des données personnelles. Dans un souci d’une meilleure popularité, le gouvernement semble donc avoir opté pour une application moins intrusive puisque lors de sa présentation le Premier Ministre avait évoqué l’utilisation de l’application à des moments et dans des lieux précis comme lors de regroupement dans des restaurants où dans des réunions de famille. Ainsi le gouvernement espère que cet aspect moins intrusif dans la vie des citoyens les encouragera à davantage télécharger cette application afin d’augmenter son efficacité.
La CNIL n’a pas encore donné d’avis concernant cette nouvelle application si ce n’est que cette dernière ne devra en aucun cas être obligatoire sous peine de violer le RGPD.
* Une nouvelle application mais des problématiques persistantes :
Cependant il semble que les problématiques liées à la protection des données personnelles dans l’utilisation d’une telle application persistent. En effet l’anonymat semble toujours être difficilement garanti d’autant plus que Tous Anti-covid compte également sur la participation des restaurateurs et autres professionnels accueillants du public afin d’avoir des informations sur la circulations du virus et “identifier les foyers de contamination ». Partant, il conviendra de voir comment ces particuliers « identifieront » les foyers conformément au RGPD et comment le respect de la protection des données personnelles sera assuré.
Enfin, il est à noter que tous les pays Européens ont développé une application similaires, Immuni pour l’Italie qui repose sur un stockage des données anonymisées sur smartphone et sur serveur. L’Islande a fait le choix d’une application nommée Rakning C-19 qui repose sur une utilisation de la géolocalisation des smartphones et une anonymisation des données sur un serveur central. On note également l’Autriche avec Stopp Corona, la Finland avec Ketju, la Norvège avec Smittestopp, la République Tchèque avec eRouska.
Toutes ces applications reposent sur les principes de respect de la vie privée, de transparence dans le mode de fonctionnement, sécurité des données et volontariat. Il conviendra de s’interroger sur l’efficacité des ces applications dans la lutte contre la Covid-19 en comparant les taux d’utilisation des applications par rapport aux taux de circulation du virus.
Parmentier Louis.
Source bibliographique:
- Commission Européenne, communiqué de presse sur ec.europa.com, « Coronavirus: la Commission adopte une recommandation pour soutenir les stratégies de sortie au moyen de données et d’application mobile », publié le 8 avril 2020.
- La Quadrature du Net, « La CNIL s’arrête à mi-chemin contre Stop-Covid », 27 avril 2020.
- Les numériques, « StopCovid n’a pas marché place à tous AntiCovid ». 15 octobre 2020.
- La CNIL, La CNIL rend public son avis trimestriel adressé au Parlement sur les conditions de mise en œuvre des traitements SI-DEP, Contact Covid et StopCovid,, 14 septembre 2020.
- Les numériques, Coronavirus: la CNIL s’intéresse au cas des « cahiers de rappel » des restaurants et bars, 07 septembre 2020.
- La Croix, INFOGRAPHIE – Coronavirus : tour d’Europe des applications de traçage de contacts, 03 juin 2020.